Revue d'histoire arménienne contemporaine II Partie IV Hans Bauerfeind : journal de 1915

LE JOURNAL DE HANS BAUERNFEIND

A - Désarmement, fouilles à domicile, arrestations,
tortures et massacre des hommes

2 avril 1915 — [...] Tout à l’heure un prêtre arménien nous a rendu visite (le remplaçant du vartabed ). Nous avons naturellement parlé de la guerre, de la mobilisation, etc. Des sept cents Arméniens de Malatia incorporés dans l’armée, plus de cent cinquante sont déja morts et le plus souvent à cause des maladies — cela veut dire à cause du manque de soins, des conditions de vie catastrophiques [...] [...] Vorhin war ein armenischer Priester hier (Vertreter des Wardabed). Mit ihm sprachen wir natürlich auch über Krieg, Mobilmachung usw. Von den 700 aus Malatia eingezogenen Armeniern sind bereits über 150 tot und zwar meist infolge von Krankheiten, d(as) h(eißt) infolge mangelnder Fürsorge. Entsetzliche Zustände! [...] (p. 3).
16 avril 1915 — [...] La veille, Garadeb [=Garabèd], notre cuisinier et acheteur, est revenu sans fusil. Au matin, ils l’ont subitement mis en prison, lui ont enlevé son fusil et son sabre-baïonnette. Pendant toute la journée, ils ne lui ont rien donné à manger et pour aller aux toilettes, il était accompagné par un saptieh. Son supérieur étant à Arschadagh, son remplaçant a prétendu avoir reçu un télégramme d’Adiaman selon lequel Garabèd devrait s’y rendre ce matin. Afin qu’il ne s’évade pas, on l’a mis en prison, et tout cela sans aucune possibilité d’informer quiconque. On aurait dû, en principe, le conduire à la prison d’Adiaman dès ce matin, si le commandant n’était pas revenu et n’avait averti qu’on ne pouvait tout simplement pas expédier une personne étant à la disposition des Allemands, sans consultation du mutessarif. Ainsi fut-il libéré le soir même [...] [...] Gestern abend kam Garadeb (Karapet; die Hrsg.) (unser Koch und Einkäufer) ohne Gewehr zurück. Man hatte ihn morgens Knall auf Fall ins Gefängnis gesteckt, ihm Gewehr und Seitengewehr abgenommen, den ganzen Tag nichts zu essen gegeben, als er zum Abort gehen wollte, einen Saptieh mitgegeben. Sein Vorgesetzter war in Arschadagh, sein Stellvertreter behauptete, ein Telegramm aus Adiaman bekommen zu haben, wonach Garabèd heute früh nach dort abgehen müsste. Damit er nicht entflöhe, hielt er es für nötig, ihn einzusperren, alles, ohne irgend eine Gelegenheit zu bieten, Nachricht zu geben. So wäre er heute früh direkt aus dem Gefängnis nach Adiaman abgeschoben worden, wenn nicht gestern abend sein Kommandant zurückgekommen wäre und darauf aufmerksam gemacht hätte, daß man den, weil er den Deutschen zur Verfügung gestellt sei, nicht ohne weiteres fortschicken könne ohne vorher die Sache dem Mutessarif vorzulegen. So wurde er denn abends befreit [...] (p. 6).
19 avril 1915 — [...] D’après un nouvel ordre, les Arméniens — cela veut dire les citoyens ottomans chrétiens — ne sont plus admis à porter des armes et ne seront employés que pour des travaux. C’est la raison pour laquelle Gar[abed] ne peut plus être saptieh et le gouvernement ne peut plus l’employer comme quoi que ce soit. Le commandant nous a aimablement proposé de laisser entièrement Garabèd à notre [disposition]. Nous avons poliment refusé sa proposition, d’une part pour pas trop abuser de la complaisance du gouvernement, d’autre part à cause de nous et surtout de Garabèd, car on n’a dorénavant pas assez de travail pour lui dans la mission. Si nous l’employons malgré tout, cela fera sans doute naître des querelles et des jalousies. D’autre part Garabèd pourrait revendiquer un salaire, au moins pour lui-même, bien que toute sa famille ait le gîte et le couvert à Bethesda et qu’il évite d’aller à la guerre par notre seule grâce. Nous avons en effet demandé que Garabèd ait le droit de rester chez nous, ne soit pas déporté et reste à notre disposition pour le cas où nous en aurions besoin. On y a volontiers consenti [...] [...] Es ist eine neue Verordnung eingetroffen, nach der Armenier, d.h. die christlich osmanischen Staatsangehörigen, überhaupt keine Waffen mehr tragen dürfen, sondern nur noch für Arbeiten verwendet werden dürfen. Gar[abed] kann also auch deshalb nicht weiter Saptieh sein, sondern die Regierung kann ihn nach Belieben zu ihren Zwecken verwenden. Der Komm[andant] machte uns das überaus liebenswürdige Anerbieten, uns Garabèd vollständig zur Verfügung zu stellen. Wir lehnten dies aber dankend ab, teils um das Entgegenkommen der Regierung nicht unnötig viel in Anspruch zu nehmen, besonders aber um unserer und Gar(abed)s willen, denn für Gar(abed) ist jetzt längst nicht genug Arbeit. Wenn wir ihn nun doch wieder beschäftigen, würde es unfehlbar Streit und Eifersüchteleien geben und Gar(abed) würde, obwohl seine ganze Familie hier freie Station genießt und er nur um unseretwillen nicht in den Krieg geschickt wurde, im Stillen Gehaltsansprüche darauf gründen. Wohl aber haben wir uns ausgebeten, daß Gar(abed) hier wohnen bleiben, also nicht fortgeschickt werden darf, und daß er uns, so oft wir ihn brauchen, nach unserem Belieben zur Verfügung gestellt wird. Das wurde uns gern gewährt [...] (p. 6).

4 mai 1915 — Il paraît que le gouvernement a perdu toute confiance dans les Arméniens. Au cours d’une visite chez Khosrov effendi (le pharmacien, ami de la maison), sa mère, qui était toute seule à la maison, nous a raconté que le gouvernement avait procédé à des perquisitions dans nombre de maisons arméniennes, [et] également chez eux. Ils sont à la recherche des armes, de livres, de journaux, de lettres et des réfugiés. Plusieurs arrestations ont eu lieu. Il est compréhensible que la population arménienne commence à s’inquiéter [...]

Die Regierung scheint jedes Zutrauen zu den Armeniern verloren zu haben. Als wir Sonntag bei Chosroff Effendi (Apotheker, Hausfreund) einen Besuch machten, erzählte uns die alte Mutter, die wir allein zu Hause trafen, daß die Regierung in vielen armenischen Häusern u(nter) a(nderem) auch bei ihnen, Haussuchung veranstaltet habe. Sie suchen nach Waffen, Büchern, Zeitungen, Briefen und Flüchtlingen. Mehrere Verhaftungen sind schon erfolgt. Der armenischen Bevölkerung bemächtigt sich begreiflicherweise eine gewisse Erregung [...] (p. 7).
10 mai 1915 — Il est certain que le gouvernement procède à de sévères perquisitions dans les maisons [et] se comporte imprudemment, ce qui provoque de l’aigreur au sein de la population. Je suis allé dans la ville: la population arménienne est agitée et dans l’appréhension. Les femmes sont les pires; elles ont une mauvaise langue bien effilée et prennent des libertés avec la vérité [...] [...] Ein(e)s ist sicher: Die Regierung hält hier strenge Haussuchungen, geht unverständig vor, was beim Volk Erbitterung hervorrufen muß. Ich war in der Stadt, das armenische Volk ist aufgeregt und furchtsam. Am schlimmsten sind die Frauen, die ihre bösen Zungen arbeiten lassen und die Wahrheit und Lüge nicht unterscheiden können [...] (p. 9).

16 mai 1915 — Les perquisitions domiciliaires et les arrestations continuent. Une très bonne fille [Veronika] sabathiste (de la famille Bonapartian) a été arrêtée [et] envoyée à Mezré parce qu’ils ont trouvé chez elle quelques chants arméniens écrits de la main de son pasteur. De notre point de vue, il s’agit d’un fait inoffensif et d’une méprise cruelle de la part du gouvernement. Désormais, la désertion se transforme en jeu de cache-cache avec le gouvernement. En cherchant des armes, on a trouvé un de nos maîtres, le tailleur de pierre Megerditch varbèd, dénoncé par un enfant. Il s’était caché pendant sept mois dans un bardeau. Un cousin de notre ami Bardrian, Edward, fut arrêté avant-hier en compagnie de quelques amis. Des gens pareils restent un certain temps en prison, sont envoyés à Mezré, etc., et puis ils recommencent leur jeu [...]

Die Haussuchungen und Gefangennahmen gehen weiter. Ein sehr braves Mädchen (Veronika, d. Hrsg.), Sabathistin (Familie Bonapartian), ist gefangen nach Mesereh geführt, weil bei ihr einige geschriebene, von ihrem Prediger verfaßte armenische Lieder gefunden worden sind. Soweit wir die Sache beurteilen können, eine ganz harmlose Sache und ein grausamer Mißgriff der Regierung. Das Desertieren ist zu einer Art Versteckenspielen mit der Regierung ausgeartet. Einer unserer Meister, Steinhauer Megrditsch Warbed (Mrkttitsch Warpet; die Hrsg.) wurde vor einigen Tagen hier gelegentlich der Suche nach Waffen infolge der Aussage eines Kindes in einer Vorratskiste gefunden, nachdem er sich 7 Monate versteckt gehalten hatte. Ein Vetter unseres Bekannten Bardrjan, Jedward, wurde vorgestern mit einigen Freunden gefaßt. Solche Leute werden dann einige Zeit gefangen gehalten, nach Mesereh geschickt usw., bis sie ihr Spiel wiederholen. [...] (p. 9).

17 mai 1915 — [...] La fille doit être condamnée à trois ans de prison. Le recueil de chants concerné comprenait deux chants révolutionnaires. Elle l’avait acheté chez un jeune homme de vingt-quatre ans. Celui-ci ne fut pas puni du tout, parce qu’il avait fait noter sur ses papiers qu’il est âgé de seize ans. Se faire enregistrer dans ses papiers plus jeune qu’on ne l’est en vérité est une mauvaise habitude très répandue ici, destinée à obtenir des avantages concernant le service militaire. La fille avait ajouté de sa main des chants religieux aux chants révolutionnaires [...]

Le bruit court que le Dr. Mikaël a également été de nouveau emprisonné à Erzeroum. Le professeur Samuel [Tamrazian] doit de même être en prison. C’est le fils du Badwelli [pasteur protestant] de chez nous; il a fait ses études de musique à Charlottenbourg, [un quartier de Berlin]; il a récemment passé quelques jours ici avant d’aller s’installer à Kharpout. à présent, c’est au tour des jeunes de dix-huit et dix-neuf ans à être mobilisés — cela concernerait aussi Krikor.

[...] Das Mädchen [...] soll zu drei Monaten Gefängnis verurteilt sein. Das betreffende Liederbuch enthielt zwei revolutionäre Lieder. Sie hatte es von einem 24jährigen Manne gekauft. Letzterer ging straffrei aus, weil er amtlich auf 16 Jahre eingetragen war. Dieses Jüngerschreibenlassen ist ja eine allgemein hier verbreitete Unsitte. Man bezweckt damit Vorteile bezgl. (bezüglich; die Hrsg.) des Militärdienstes. Das Mädchen hatte hinter den vorhandenen Liedern geistliche Lieder handschriftlich nachgetragen [...] (p. 12).

Nach den neuesten Gerüchten soll, wie schon oft erzählt wurde, auch Dr. Micael in Erzerum wieder im Gefängnis sitzen. Auch Prof. Samuel (Tamrasjan; die Hrsg.), Sohn des hiesigen Badwelli (prot. Prediger), der in Charlottenburg (Berlin; die Hrsg.) Musik studiert hat, neulich einige Zeit hier war und jetzt wieder in Kharput ist, soll gefangen sein. Jetzt sollen auch die 18/19jährigen eingezogen werden, das würde auch Kirkor (Krikor bzw. Grigor; die Hrsg.) treffen (p. 12).

26 mai 1915 — [...] Le müffetişdélégué par Constantinople dans la ville et logeant chez Haschim bey est le fonctionnaire turc le plus agréable, délicatement instruit et viril qu’on ait jamais rencontré — on a eu l’impression d’être en compagnie d’un fonctionnaire allemand distingué, ou encore d’un inspecteur des écoles [...] Le mauvais côté des faits mentionnés ci-dessus est que presque tous les jours on emprisonne quelques Arméniens sans cause apparente. Hier ce fut douze Arméniens, parmi lesquels le pharmacien Khosrov effendi. Ces actes arbitraires commencent à nous répugner. Krikor va être mobilisé grâce aux efforts du muhasebeschi, mais il va être incorporé dans un bataillon de travail, de manière à ce qu’il reste à notre disposition pour nos travaux. La cause est entre les mains du commandant de la gendarmerie [...]

[...] Der Müfetisch (Inspektor; Deportationsinspektor? die Hrsg.) aus Konstantinopel, der hier ist und bei Haschim Bej wohnt, ist der angenehmste, fein gebildeste und männlichste türkische Beamte, den wir je gesehen haben. man fühlte sich gerade wie mit einem feinen deutschen Beamten, etwa Schulrat, zusammen. [...] Eine Kehrseite zu obigen: Die Willkür, mit der fast täglich einige Armenier ohne erkennbaren Grund gefangen gesetzt und vor Gericht gestellt werden, gestern zwölf, darunter auch der Apotheker Chosroff Eff(endi), beginnt uns mehr und mehr zu befremden. - Krikor soll auf Bemühungen des Muhasebedschi (Rechnungsrat; die Hrsg.) hin als Soldat geschrieben werden, jedoch für die Arbeitergruppe und zwar so, daß er uns als Arbeiter zur Verfügung gestellt wird. Die Sache liegt in den Händen des Gendarmeriekommandanten [...] (p. 12).

27 mai 1915 — Juste après ma visite chez le commandant, Krikor a été convoqué par les autorités pour être mobilisé tout de suite et sans problème. Il nous a été renvoyé pour n’importe quel emploi: il lui faut seulement quérir ses trois pains de munition par jour, c’est tout. Il en est ravi, ses parents le sont davantage [encore]. Cela est également avantageux pour nous, quoique nous ayons eu à nous plaindre de Krikor ces derniers mois — il se domine dorénavant, sachant bien qu’il est entre nos mains et qu’il serait tout de suite expédié si nous le licentions [...]

[...] à présent, le gouvernement fait aussi perquisitionner chez les pauvres — jusqu’alors les mesures d’extorsion avaient été prises tout particulièrement contre les couches «élevées». On déterre des armes même dans les champs. Les Arméniens se trahissent réciproquement.

Kaum war ich gestern beim Kommandanten gewesen, als auch schon Krikor zur Regierung geholt wurde, um dort sofort und ohne geringste Schwierigkeit als Soldat geschrieben zu werden. er wurde uns sofort zur beliebigen Verwendung überwiesen, soll nur täglich seine drei Soldatenbrote abholen. er ist glücklich, seine Eltern natürlich erst recht. Und für uns ist es auch äußerst günstig. Zwar hatte Krikor in der letzten Zeit zu manchen Klagen Anlaß gegeben, aber er nimmt sich jetzt natürlich sehr zusammen, da er ja völlig in unserer Hand ist und recht gut weiß, daß er, falls wir ihn entließen, sofort weggeschickt werden würde [...] (p. 13).

[...] Nun muß die Regierung auch bei Armen suchen lassen, während bisher alle die strengen Erpressungsmaßregeln — Gefängnis, Prügel usw — nur gegen «bessere» Stände angewandt wurden. Auch aus den Feldern werden Waffen ausgegraben. Die Armenier verraten sich gegenseitig (p. 13).

28 mai 1915 — [...] Le muhasebeschi nous a demandé aujourd’hui, pour lui et sa famille, de loger huit ou quatorze jours chez nous. Le motif invoqué est qu’il habite en face de la prison où on bastonne tous les jours des Arméniens — probablement au-delà de toute mesure, car un prêtre arménien (catholique) assez âgé en est déja mort — [et] ils ne le supportent plus [...] Quoique nous n’en ayons pas de preuves, il va de soi que des innocents sont également concernés par ces mesures violentes prises contre les Arméniens du fait de la méfiance bien fondée [du gouvernement à leur égard]. Il court tant de bruits parmis les gens [...] C’est toute une histoire. Mais il paraît qu’il arrive vraiment que des gens achètent des fusils en cachette, uniquement pour être en mesure d’en fournir un au cas où ils seraient forcés de le faire à coups de bâton ou par l’emprisonnement.

[...] Der Muhasebedschi bat heute, für acht bis 14 Tage mit seiner Familie bei uns wohnen zu dürfen. Sein von ihm angegebener Grund ist folgender: er wohnt dem Gefängnis gegenüber; dort werden jetzt jede Nacht Armenier verprügelt, scheinbar oft maßlos, denn ein ziemlich alter armenischer Priester (katholisch) ist infolgedessen gestorben. Das könnten sie nicht mehr ertragen [...] Die Gewaltmaßregeln gegen Armenier treffen natürlicherweise, da einmal das berechtigte Mißtrauen da ist, auch öfters Unschuldige, obwohl wir bisher dafür keine Beweise haben. Denn die Gerüchte im Volk..., na, darüber könnte man ja Bücher schreiben! Doch scheint es tatsächlich vorzukommen, daß Leute heimlich Gewehre kaufen, um welche abliefern zu können, wenn sie durch Prügel und Gefängnis dazu gezwungen werden sollen (p. 14).

31 mai 1915 — [...] On a condamné la fille à un an de prison [...] Il vaudrait mieux la détenir isolément et à l’écart des autres femmes, qui sont pour la plupart affreusement dépravées. Son cas fut aggravé par le fait que le frère de la fille aurait déserté [au profit] du côté russe, ce que sa mère a passé sous silence. Hélas, on ne peut plus croire personne ici [...]

[...] Das Mädchen ist zu einem Jahr Gefängnis verurteilt [...] Jedenfalls soll das Mädchen in Einzelhaft gehalten werden, nicht mit den meist entsetzlich verdorbenen übrigen Frauen zusammen. Der Fall wird so schwer aufgefaßt, weil der Bruder des Mädchens zu den Russen übergegangen sein soll, wovon die Mutter nichts sagte. Man kann eben hier schließlich niemanden mehr glauben [...] (p. 16).

9 juin 1915 — Aujourd’hui, nous avons appelé le médecin arménien de la ville pour qu’il nous rapporte tout ce qui s’est passé, notamment concernant le cas de Khosrov effendi. Celui-ci avait en effet tenté de se suicider, avait pris une dose énorme de morphium, et tenté en outre de s’ouvrir les veines avec une pièce de tôle. Pour être sûr [de son fait, il avait aussi sur lui de la strychnine et de l’arsenic. Le médecin qui fut immédiatement appelé arriva à point nommé pour lui sauver la vie. Les motifs: «Mon peuple me considère coupable; les autorités ne me comprennent pas et refusent de me croire. C’est pourquoi je suis las de vivre». A coup sûr, la peur inexprimable des coups de bâton a joué également son rôle. Ces coups doivent en effet être souvent inhumains. Quand les gens sont battus, on les jette à demi-morts dans l’eau, pour qu’ils reprennent conscience, puis ils sont de nouveau battus. Ce sont des paysans forts qui les battent uniquement en présence des policiers: pas un seul haut fonctionnaire n’est de la partie. On raconte qu’on a parfois renvoyé à la maison des gens de crainte qu’ils ne meurent de ces coups, ce qui est déja arrivé une fois. Trois personnes auraient mystérieusement disparu: on dit qu’elles auraient été jetées dans le Tochma-sou, [affluent de l’Euphrate]. Mais cela ne nous paraît pas croyable. Selon la description du médecin de la ville, la prison comprend une salle de 160 mètres carrés, basse, sombre, humide, pourvue d’un unique minuscule soupirail au plafond, dans laquelle deux cents Arméniens sont à présent enfermés. Il y a en outre une petite cour avec un cabinet et un puis. Pendant la nuit, les prisonniers font leurs besoins dans une boite en fer blanc qu’on vide le matin [...]

[...] à l’occasion des adieux du müffetiş qui ont eu lieu dans la cour de l’école, tous les notables de la ville étaient présents. Le müffetişy fit voir un exemplaire d’un journal répréhensible illustré avec des reproductions d’un grand nombre de fusils, de bombes et de choses semblables qu’on aurait trouvé chez des Arméniens de Kuharea [=Kütahiya?], Dyarbékir, etc., entassés dans plusieurs pièces. Le remplaçant du mutessarif m’a également raconté qu’on aurait trouvé hier, à Mezré, 5000 bombes. Le peuple turc est de plus en plus excité contre les Arméniens, l’atmosphère est extrêmement tendue, mais on ne remarque pas d’hostilité manifeste [...]

Wir bestellten uns heute den armenischen Stadtarzt herauf und ließen uns von ihm über alles berichten, insbesondere über den Fall Chosroff Effendi. Letzterer hatte sich also tatsächlich vergiften wollen, hatte eine riesige Dose Morphium genommen, auch versucht, sich mit einem Stück Blech die Pulsader aufzuschneiden. Für alle Fälle hatte er auch Strichnin und Arsenik bei sich. Der schnell herbeigerufene Stadtarzt konnte gerade noch sein Leben retten. Gründe:»Mein Volk wirft alle Schuld auf mich; die Regierung versteht mich nicht und will mir nicht glauben; also will ich auch nicht mehr leben.» Sicher hat auch die namenlose Angst vor Schlägen stark mitgespielt. Die sollen allerdings oft unmenschlich sein. Wenn die Leute halbtot geschlagen sind, werden sie ins Wasser geworfen, bis sie wieder zu Bewußtsein kommen, um dann weiter geschlagen zu werden. Starke Dorfleute prügeln, und nur Polizisten sind dabei, kein höherer Beamter. Einige Leute soll man nach Haus geschafft haben, aus Furcht, daß sie infolge der Schläge sterben würden, wie es ja einmal vorgekommen sei. Drei Leute sollen auf geheimnisvolle Weise verschwundens ein. Man sagt, sie seien des nachts in den Tochmanssu geworfen (Nebenfluß des Euphrat), das erscheint uns aber doch nicht glaubhaft — Das Gefängnis ist nach Beschreibung des Stadtarztes ein Raum von etwa 160 Quadratmeter Größe, niedrig, dunkel, feucht, mit nur einem winzigen Luftloch an der Decke, in dem augenblicklich 200 Armenier eingesperrt sind. Dazu gehört ein kleiner Hof mit Brunnen und Abort. Nachts machen die Gefangenen ihre Bedürfnisse in einem Blechgefäß innen ab, das morgens ausgegossen wird [...] (p. 20).
[...] Bei der Verabschiedung des Müfetisch (Deportationsinspektor? die Hrsg.) im Hof der Schule waren sämtliche Spitzen zugegen. er zeigte dort eine Nummer einer Kriminal-Zeitschrift mit Abbildungen von Massen von Gewehren, Bomben und dergleichen, die bei Armeniern in Kuharea (Kütahiye?; die Hrsg.), Diarbekir usw. gefunden sein sollen und in einzelnen Zimmern zusammengebracht waren. Der Stellvertreter des Mutessarif erzählte mir außerdem, gestern seien in Mesereh an 5000 Bomben gefunden. Das türkische Volk wird mehr und mehr gegen die Armenier aufgereizt; die Atmosphäre ist äußerst gespannt, doch sind offene Feindseligkeiten nicht zu bemerken [...] (p. 20).

La lettre de Hans Bauernfeind au kaimakam d’Arha (écrite en francais)

Malatia, 9 juin 1915 — Monsieur, Excusez que je prends la liberté de m’adresser à vous par écrit. à cause de ne pas pouvoir vous causer seul, il ne me reste pas d’autre moyen. Comme la question arménienne est une affaire extrêmement importante et ne laisse pas de tranquillité à personne, nous aussi ne pouvons pas rester indifférents. Cette affaire exige bien de la sévérité et de la rigueur, mais tout autant de sagesse et de recherches et informations scrupuleuses. Nous savons fort bien que nous n’avons aucun droit officiel de nous meler à cette affaire, mais d’autre part, quelques raisons m’engagent néanmoins à vous adresser, en cette affaire, quelques lignes. Nous connaissons par propre expérience l’état de la population de Malatia, de différentes nations; nous savons suffisamment les circonstances de maintenant; nous sommes, dans l’affaire présente, pour ainsi dire neutres, soyants en même temps les confédérés du gouvernement et du peuple ottoman et d’autre part, par notre travail naturellement en contact avec la nation arménienne. Je vous assure, Monsieur, que nous en sommes bien loin de prendre le parti des Arméniens; au contraire, comme je vous ai dit l’autre jour, nous cherchons à corriger leurs fautes à toute occasion, et nous parlons à eux souvent d’une extrême sévérité. Mais, selon votre propos de l’autre jour, je dois supposer que vous ne vous trouvez pas encore tout à fait au courant sur les événements qui se passent ici, à l’heure présente. Voilà pourquoi je vous prie de bien vouloir me permettre de [at]tirer votre attention sur quelques points:

1) Nous sommes bien consternés par le fait que, en plusieurs endroits, les Arméniens ont pris le parti de nos ennemis, de même qu’aussi à Malatia ont été trouvées tellement d’armes défendues, et que la population ne les a pas délivrées sur le premier ordre. Mais nous sommes tout à fait convaincus qu’ici la peur a joué dans cette affaire un rôle beaucoup plus important que des intrigues révolutionnaires. Nous savons de même qu’ici beaucoup d’Arméniens, par force de violence, au moyen de coups et d’autres intimidations, ont été obligés, n’ayant pas eux-mêmes d’armes qu’ils pourraient délivrer au gouvernement, de les acheter d’autres personnes pour les retourner au gouvernement, sinon de dénoncer, pour s’affranchir eux-mêmes, d’autres personnes, soit coupables, soit innocentes, ou de chercher d’autres moyens de mensonge ou de fausseté plus ou moins vils et bas.

2) Au cause de cela assez d’hommes ont été mis en prison et on été bastonnés qui sont, eux-mêmes innocents, et les noms des quels seulement ont été dénoncés par des traîtres perfides. Certainement, il faut punir sévèrement les coupables, mais, avant tout, la culpabilité est à prouver par les moyens du droit public. Bastonner ou mettre en prison des personnes, seulement à cause d’un soupçon, cette pratique ne nous semble pas légitime. Nous serions bien contents si nous nous trompions, mais nous avons raison de craindre que des choses pareilles se sont passées plusieurs fois.

3) De même l’exécution de la peine de bâton n’a ni règle ni mesure et transgresse souvent les lois de l’humanité. Il nous semble absolument nécessaire que, à l’occasion d’une telle responsabilité, l’exécution de la peine ne se passe pas sans contrôle de fonctionnaires plus haut que des agents de police. Je répète: nous serions heureux de comprendre que nous voyons trop noir, mais les indices sont trop clairs et convaincants.

4) Plusieurs détails: Micael eff[endi] Tschanian et son fils Mihran, et le pharmacien Chosroff eff[endi] Kescheschian. Les deux premiers sont, dans l’affaire présente, absolument innocents et désintéressés, ne se sont jamais mêlés à des affaires pareilles, mais ont été calomniés de la manière la plus basse. Nous les connaissons depuis longtemps, de même Chosroff eff[endi]. Celui-ci était le chef du parti des «Taschnakzagan», mais ses intentions et efforts n’étaient point dirigés contre le gouverment, de manière révolutionnaire, mais il travaillait seulement pour les intérêts légitimes de sa nation, comme chaque parti le fait de même. Son influence n’était point dangereuse et contraire. Maintenant, sa situation s’est fort aggravée à cause de basses calomnies — beaucoup d’Arméniens ont, pour se délivrer eux-mêmes, dénoncé son nom, et parce que, dans les circonstances présentes, chaque affaire se présente beaucoup plus grave que dans l’état normal. Outre cela, dans sa situation dangereuse et fort pénible, calomnié par ses compatriotes, mal compris par le gouvernement, dont il est un sujet fidèle, il a nouvellement, tout à fait perdu la tête, de manière qu’il allait s’empoisonner. Sur son bon sens n’existe, cependant, aucun doute.

5) Si vous voulez bien accepter, Monsieur, notre conviction: si le gouvernement par force, veut trouver ici des choses qui n’existent vraiment pas, et continuellement emploie des moyens de violence aussi envers des innocents, nous craignons que la population arménienne, de plus en plus, devient troublée et préoccupée. Cependant, si le gouvernement fait voir, outre la sévérité nécéssaire, aussi plus de bienvaillance, libéralité et d’une légalité scrupuleuse, nous espérons sûrement que la population arménienne apprendra une leçon de ces jours bien pénibles pour tout le monde, et que, dans l’avenir, il prendra une [attitude] plus loyale. Il y a parmi eux des séducteurs très bas et, malheureusement, la population est, en général, assez stupide pour se faire séduire.

Comme pour nous, de même pour le gouverment et le bien du pays, il est d’une extrême importance que, parmi le gouvernement et la nation arménienne, soit établi un entendement sincère, surtout dans les circonstances présentes. Dans ce but, ma conscience m’engage, Monsieur, de tirer votre attention et votre conscience sur les points ci-dessus mentionnés.

Agréez, Monsieur, l’expression de nos sentiments les plus sincères,

Votre dévoué, P. Hans Bauernfeind

 

14 juin, le matin — [...] Gabriel eff[endi], l’avocat, est de nouveau en prison depuis hier. Je viens de rentrer d’une visite chez Mustapha agha. Il est complètement sous l’influence de son entourage arménien. Il m’a assuré maintes fois que le gouvernement fait disparaître en secret, chaque nuit, trois [ou] quatre prisonniers, qui seraient battus à mort ou jetés dans l’eau. On les emmènerait dans sa voiture. Un prêtre, parent du Dr. Mikaël, un certain Bontchüklian, serait mort. Nous les avons tous deux connus, mais n’avons pas de nouvelles sûres. Les femmes visitent la prison pour apporter de la nourriture et apprennent alors que cela ne sera plus nécessaire, sans plus de détails. Le fait un peu obscur que les corps ne sont pas remis [aux familles], mais enterrés en cachette, est pour nous explicable, car sinon on vénérerait les morts comme des martyrs et des saints et il pourrait se développer des émeutes [...] (p. 28).

La mobilisation est appliquée sévèrement, mais les Arméniens ne sont employés que pour des travaux [...]

[...] Gabriel Eff(endi), der Rechtsanwalt, ist seit gestern wieder im Gefängnis. Ich war eben bei Mustapha Agha. Der steht völlig unter dem Einfluß seiner armenischen Umgebung. er versicherte mir wiederholt, die Regierung ließe jede Nacht 3, 4 Gefangene heimlich verschwinden, die totgeschlagen oder ins Wasser geworfen würden. Mit seinem Wagen würden sie fortgebracht. Ein Priester, Verwandter von Dr. Micael, soll tot sein, ebenso ein gewisser Bontschüklian; beide kannten wir, aber haben noch keine bestimmte Nachricht. Die Frauen kommen ins Gefängnis, um Essen zu bringen, erfahren dann, daß es nicht mehr nötig sei, bekommen aber keine nähere Nachricht. Die an sich etwas mysteriös erscheinende Tatsache, daß die Leichen nicht ausgeliefert, sondern heimlich vergraben werden, erklären wir uns damit, daß im anderen Falle die Toten als Märtyrer und Heilige verehrt werden und möglicherweise Unruhen entstehen würden [...] (p. 28)
Die Aushebungen werden streng gehandhabt, die Armenier aber nur zu Arbeiten verwendet [...] (p. 29).

15 juin 1915 — Ce matin des femmes sont venues chez nous en pleurant et en suppliant: on n’accepte plus la nourriture pour les prisonniers, on a renvoyé leurs habits; cela veut dire que beaucoup sont morts, naturellement assassinés en secret. Quoique nous ne comprenions et ne connaissions pas encore les faits véridiques, nous considérons tout cela comme des bruits en l’air, car trop souvent on a vu qu’on a diffusé avec conviction les nouvelles les plus exagérées et dérisoires. Sur toutes ces histoires, je pourrais écrire un roman. Je n’ai pas envie d’aller sans cesse chez le commandant. Le Badwelli m’a supplié instamment de visiter la prison avec lui et d’y prêcher aux prisonniers. Il va de soi que cela est tout à fait inimaginable. Aujourd’hui les prisonniers turcs libérés, deux cent cinquante personnes, sont partis pour la guerre en grande pompe, escortés d’une foule de gens, de chevaux, de tambours, des écoliers chantants [...]

Heute früh kamen wieder Frauen, heulten, flehten inständig: Für die Gefangenen wird kein Essen mehr angenommen, die Kleider wären zurückgeschickt; also sind viele tot, natürlich heimlich umgebracht. Obwohl wir den wahren Sachverhalt noch nicht verstehen und kennen, halten wir das natürlich alles für leere Gerüchte; denn gar zu oft haben wir ja erlebt, daß mit aller Bestimmtheit die ungeheuerlichsten, blödsinnigsten Behauptungen und Nachrichten verbreitet werden. Wollte ich das alles erzählen, würde ich Bände füllen. Fortwährend zum Kommandanten möchte ich natürlich auch nicht gehen. Der Badwelli forderte mich dringend auf, mit ihm ins Gefängnis zu gehen und den Gefangenen zu predigen. Natürlich ganz undenkbar.
Heute zogen die türkischen entlassenen Gefangenen, 250 an der Zahl, als Freiwillige in den Krieg ab, mit großem Gepränge an begleitendem Volk; Pferde, Trommeln, singende Schüler [...] (p. 29).

16 juin 1915 — [...] Maintenant nous sommes convaincus que des prisonniers meurent et sont enterrés en secret. Par contre, nous ne croyons pas que le gouvernement y soit mêlé au point qu’il les fasse mourir. Il est compréhensible qu’il ne remette pas les corps, car exhiber les corps signifierait causer une grande excitation dans la ville (à notre connaissance [et] jusqu’à présent, deux ou trois cas sont seulement confirmés). Nous avons à présent découvert où on les enterre. D’abord je n’ai pas pris au sérieux ce que Krikor avait observé, mais hier j’ai constaté moi-même qu’à la pointe sud de notre champ numéro 11, où la rigole de Chorate tourne au nord (voir le plan de notre terrain), cinq hommes travaillaient à la tranchée de tir restante des manœuvres. Quand ils nous ont aperçus, ils ont abandonné toute de suite leur tâche et ont quitté [les lieux] en toute hâte. Toutefois, lorsque nous nous sommes approchés d’eux, ils ne nous ont pas évités, mais ont salué très gentiment et très poliment. Ils ont cherché avec zèle à me faire changer mon projet d’inspecter les travaux du canal [effectués] par nos hommes là-haut — nous sommes en train d’irriguer —, sous prétexte qu’il faisait trop chaud pour y monter [...] Je leur ai demandés ce qu’ils avaient à creuser sur notre champ. Ils ont répondu aussitôt, hâtivement et avec zèle, bref de manière suspecte: «C’est rien du tout, c’est rien du tout». J’ai dit: «Mais vous n’y creusez pas pour rien!» Ils ont répondu, embarrassés, qu’ils avaient enfoui certaines choses nauséabondes provenant de l’hôpital. En effet on avait récemment brûlé et dispersé des hardes, des draps et choses similaires venant de l’hôpital. Mais dans ce cas-là, il s’agit sans doute d’une misérable excuse. D’abord, pourquoi ces cachotteries? Deuxièmement, se dégageait de cette fosse une odeur de putréfaction indéniable, quoiqu’on ne vît à la surface que les ordures habituelles. Pour enterrer un animal on ne se serait pas donné autant de peine et on n’aurait pas agi en secret. Outre cette fosse, il y en a une autre près de l’eau — plutôt à l’est et se trouvant, d’après ce que j’ai vu, sur notre terrain. Ils venaient juste de commencer à y creuser. Au cours de la nuit, alors que Khorèn et Krikor étaient en train d’irriguer le trèfle, ils ont pu observer les faits suivants: quatre hommes arrivèrent, munis de bêches; l’un d’eux était avec un cheval de bât; ils se sont rendus sur le site concerné, où des bruits de pierre et autres du même genre se faisaient entendre, et il sont repartis un quart d’heures plus tard. En passant devant Krikor, qui portait une lanterne, un de ces hommes lui a demandé sur un ton sévère: «Pourquoi ne nous as-tu pas avertis qu’il y avait du monde?» Krikor a répondu: «Mais n’avez-vous pas vu la lanterne?» Tout cela nous incline à considérer probable qu’on enterre en effet dans le champ les prisonniers arméniens décédés. Bouleversant, mais en vérité pas incompréhensible et conforme aux conditions orientales [...]

[...] Daß Gefangene sterben und heimlich begraben werden, scheint uns jetzt auch festzustehen. Wir glauben aber nicht daran, daß die Regierung zu diesem Sterben hilft; daß sie die Leichen (bisher stehen uns übrigens nur zwei oder drei Fälle einigermaßen fest) nicht ausliefert, verstehen wir; denn es würde eine riesige Erregung durch die Stadt gehen, wenn die Leichen zur Schau ausgestellt würden. Wir sind nun dahinter gekommen, wo sie begraben werden. Erst hielt ich Krikors diesbezügliche Beobachtungen für nichtig, gestern habe ich selbst folgendes festgestellt: An der Südspitze unseres Feldes 11, wo am Berghang der Choratawassergraben nach Norden umbiegt (siehe unsern Grundstückplan), arbeiteten fünf Mann an einem der Schützengräben, die noch von den militärischen übungen her zurückgeblieben sind. Als sie mich mit Krikor auftauchen sahen, ließen sie plötzlich ihre Arbeit liegen und entfernten sich in auffallender Eile. Als wir aber entschlossen auf sie zugingen, wichen sie uns nicht weiter aus, sondern begrüßten mich mit großer Höflichkeit und Freundlichkeit. Sie waren eifrig bemüht, mich von der Absicht, oben die Arbeiten unserer Leute am Wassergraben - wir wässerten gerade — zu inspizieren, abzubringen. Ich sollte mich doch in der Hitze nicht dort hinauf bemühen [...]. Ich fragte sie nun, was sie denn da in unserem Felde zu graben hätten. Ich hatte den Satz kaum ausgesprochen, da antworteten sie schon in verdächtiger Hast und Bereitschaft:»nichts, nichts.» Ich sagte:»Ja, aber ihr grabt doch nicht für nichts und wieder nichts dort?» Sie sagten dann, verlegen darüber hinweggehend, sie vergrüben einige eklige Sachen vom Krankenhaus. Nun sind in letzter Zeit oft Lumpen und Bettreste u(nd) dergl(eichen vom Krankenhaus allerorten ausgeschüttet und verbrannt. Aber in diesem Falle lag es auf der Hand, daß es sich um eine faule Ausrede handelte. Denn 1) wozu diese Heimlichkeit, 2) kam aus dem Loch, das zwar oben einigen Abfall harmloser Art zeigte, ein unverkennbarer Verwesungsgeruch. Und ein Tier würden sie schwerlich mit solcher Sorgfalt und Verschwiegenheit begraben. Außer diesem Loch, das sich direkt am Wasser befand, ist eines eine Strecke weiter östlich, so viel ich erkennen konnte, innerhalb unserer Grenzen. Dort hatten sie gerade angefangen zu arbeiten. Als nachts im Kleegarten gewässert wurde, beobachteten Choren und Krikor Folgendes: Vier Leute kamen mit Spaten an, von ihnen einer auf einem Lastpferd. Sie begaben sich nach der betr(effenden) Stelle; man hörte von weitem Geräusche von Steinen und dergl(eichen); nach einer Viertelstunde kamen sie zurück. Als sie an Krikor vorbeikamen, der eine Laterne trug, fragte ihn einer streng:»Warum hast du uns nicht gesagt, daß hier Menschen sind?», worauf Krikor antwortete:»Ihr saht ja doch die Laterne.» Nach alledem erscheint es uns sehr wahrscheinlich, daß die verstorbenen armenischen Gefangenen tatsächlich auf dem Feld begraben werden. Erschütternd, aber schließlich nicht unbegreiflich und den orientalischen Verhältnissen angepaßt [...] (p. 31).

23 juin 1915 — Entre temps, on a emprisonné Badrian, Nichan et également d’autres personnes. Ainsi, il ne reste en effet presque plus d’Arméniens en liberté [...]

Inzwischen sind sowohl Bardrjan als auch Nischan und andere Leute ins Gefängnis gesteckt, so daß es jetzt tatsächlich kaum noch freie Armenier hier gibt [...] (p. 35).

24 juin 1915 — Je me suis rendu à cheval près du canal [d’irrigation] de Chorata, adjacent à la pointe sud-ouest de notre terrain numéro 11 [...], que Garabèd, Khorèn et Krikor étaient en train de restaurer. En revenant, je suis passé par les fosses communes et j’ai observé, près de celle située à l’ouest, qu’on avait entassé de la terre nouvelle, comparé à hier. Cela veut dire que notre jardinier (turc) a raison quand il nous rapporte que les chiens déterrent les corps des prisonniers arméniens. Dans la deuxième fosse, j’ai vu, tout épouvanté, qu’émergaient le crâne et le dos encore couvert de chair décomposée d’un cadavre, apparemment déterré au cours de la nuit par des chiens, peut-être aussi par les nôtres. Une heure plus tard, je me suis rendu chez le mutessarif auquel j’avais préalablement demandé à avoir un entretien secret. Je lui ai fait un rapport détaillé de tout ce que j’avais observé, à la suite de quoi nous avons eu un entretien de deux heures sur toute l’affaire arménienne. Il a tout d’abord envoyé un saptieh sur place, mais celui-ci chercha apparemment à dissimuler les choses ([selon lui], on y aurait enterré un cheval et peut-être quelqu’un de l’hôpital), parce qu’il y était sûrement mêlé. Il ne me paraît pas nécessaire de rapporter tout ce que je lui ai dit (aprés tout ce que j’ai écrit avant), mais je veux retracer l’essentiel de ce que le mutessarif a dit: qu’il n’était pas en son pouvoir de changer des choses qui s’étaient produites avant sa prise de fonction; qu’il ne prétendait pas qu’aucun acte illégal n’avait été commis. Il me fit même comprendre qu’à l’instigation de quelques gens riches, l’intérimaire du mutessarif aurait « un peu aidé à mourir ». Quand je me suis obstiné à demander qu’on avertisse au moins les pauvres épouses de l’endroit exact où se trouvent leurs époux, il me laissa entendre qu’il ne pourrait pas le faire, car l’affaire est en effet louche. Il me promit en son âme et conscience qu’aussi longtemps qu’il serait en poste des choses illégales de cette nature ne se reproduiraient plus; qu’en outre les prisonniers auraient désormais l’autorisation de se faire envoyer du matériel de couchage et de la nourriture de chez eux autant qu’ils le voudraient, de recevoir des visites et de se promener dans la cour de la prison; qu’il ne pourrait toutefois libérer personne, mais, au contraire, qu’il devrait emprisonner encore plus de monde, jusqu’à ce qu’on trouve toutes les bombes et explosifs cachés, dont l’existence serait indubitable [...]

Um 11 1/2 Uhr begab ich mich zu Pferde nach dem an die Südwestecke unseres Grundstückes 11 [...] angrenzenden Choratagraben, an dessen Ausbesserung Garabèd, Choren und Krikor arbeiten. Auf dem Rückweg ritt ich an den [...] Grabstellen vorbei und beobachtete an der westlichsten, daß seit gestern dort neue Erde aufgehäuft ist. Demnach scheint der Bericht unseres Gärtners (Türken), daß dort die Hunde die Leichen der armenischen Gefangenen ausscharrten, richtig zu sein. In dem zweiten Loch sah ich zu meinem größten Entsetzen, wie der Schädel und der noch mit verwestem Fleisch bedeckte Rücken eines Leichnams herausragte(n), offenbar von den Hunden — vielleicht auch den unseren mit — nachts herausgezerrt. Eine Stunde später saß ich mit Choren beim Mutessarif in der Wohnung, den ich sofort um eine geheime Unterredung in einer wichtigen Angelegenheit hatte bitten lassen. Ich erstattete genau Bericht über all meine Beobachtungen und hatte im Anschluß daran eine fast zweistündige Besprechung mit ihm über die ganze armenische Angelegenheit. Zunächst schickte er einen Saptieh an Ort und Stelle, der aber offenkundig bemüht war, die Sache zu beschönigen (es sei dort ein Pferd begaben und vielleicht einer aus dem Krankenhaus), weil er sicher mit in die Geschichte verwickelt war. Was ich alles mit dem Mutessarif sprach und was ich ihm erzählte, brauche ich ja nach allem Vorhergeschriebenen nicht mehr wiederzugeben; nur von seinen Ausführungen will ich wenigstens die wichtigsten Punkte festhalten. Was vor seiner Zeit passiert wäre, könne er nicht mehr ändern; er sage nicht, daß nichts Ungesetzmäßiges vorgekommen sei; er deutete sogar an, daß auf Betreiben von einigen reichen Leuten der Mutessarifstellvertreter manchem zum Sterben etwa nachgeholfen habe. Auf meine eindringliche Bitte, doch den armen Frauen wenigstens Nachricht zu geben über den wahren Verbleib ihrer Männer, ließ er fühlen, daß sie das nicht ändern könnten, weil die Sache eben nicht rein sei. Solange er auf seinem Posten stehe, verspreche er mir auf Ehre, daß nie derartige Ungesetzlichkeiten vorkommen würden. Die Gefangenen sollten auch jetzt die Erlaubnis haben, von Hause beliebig Betten und Essen sich schicken und sich besuchen zu lassen und auf dem Gefängnishof spazieren zu gehen. Freilassen könne er aber niemand, müsse eher noch mehr ins Gefängnis setzen, bis hier die verborgenen Bomben und Sprengmittel gefunden seien, an deren Vorhandensein gar nicht zu zweifeln sei [...] (p. 33).

25 juin 1915 — [...] Alors que je souhaitais justement rendre visite à Moustapha agha, j’e l’ai rencontré près du Köchke [=résidence] du mutessarif où j’ai pu parler avec lui. Il m’a raconté qu’au cours de la nuit, à la suite de mon intervention, on avait convenablement inhumé les corps enfouis dans les six fosses. Il serait question de plus de cent corps [...]

Moustapha agha a en outre prétendu savoir, de manière sûre, que récemment les [membres] d’un bataillon de travailleurs arméniens, qui étaient occupés à des travaux de voirie à Tchiftlik, entre ici et Tchoghlou, sur l’Euphrate, avaient été arrêtés, puis fusillés et jetés dans l’eau par les prisonniers [de droit commun] libérés (mentionnés à la page 29). Des bruits similaires avaient déja couru, mais nous ne les avions pas pris au sérieux. On avait toutefois été surpris sur le moment du fait que tous ces gens furent immédiatement armés, bien qu’il s’agisse de voleurs et d’assassins. Il est vrai qu’on n’a jusqu’à présent plus eu de nouvelles des travailleurs concernés, qui auraient été envoyés ailleurs. Tout ces événements inquiétants font que nous avons les nerfs tendus à l’extrême. En outre, nous et nos protégés sommes maintenant personnellement en danger. Ils nous faut agir très prudemment [...]

[...] Eben wollte ich Mustapha Agha besuchen, traf ihn aber unterwegs an dem Köschke des Mutessarif, wo ich etwas mit ihm sprach. er sagte, in der Nacht seien, auf mein gestriges Einschreiten hin, die in den sechs Löchern begrabenen Leichen ordentlich bestattet. Es handele sich um mehr einhundert! [...] Mustapha Agha behauptete auch sicher zu wissen, daß neulich eine Abteilung armenischer Arbeiter, welche am Tschiftlik zwischen hier und Tsoghlu am Euphrat, mit Straßenarbeiten beschäftigt waren, von den Seite 29 erwähnten entlassenen (türkischen; die Hrsg.) Gefangenen unterwegs aufgehoben, erschossen und ins Wasser geworfen seien. Wir hatten schon derartige Gerüchte gehört, aber nie ernst genommen. Allerdings wunderten wir uns gleich darüber, daß diese Leute sofort hier alle bewaffnet wurden, obwohl es Räuber und Mörder waren. Und Tatsache ist, daß von den betr(effenden) Arbeitern, die wo anders hingeschickt sein sollen, bisher keine Nachricht wieder gekommen ist. Unsere Nerven werden durch alle diese unheimlichen Begebnisse stark angegriffen; zudem sind wir und unsere Leute persönlich jetzt gefährdet. Wir müssen sehr vorsichtig sein [...] (p. 35).

2 juillet 1915 — Le plus horrible, le plus affreux des massacres a eu lieu [...] Quand je me suis rendu chez le mutessarif, tous les travailleurs (à peu près cent à deux cents), qui étaient justement partis à Indära, avec des ânes, des tuyaux et des outils, pour y travailler sur la conduite d’eau, sont précipitamment revenus. Peu après, on a observé que des soldats se rendaient d’ici à Indära, ainsi qu’un officier à cheval, probablement le commandant de la gendarmerie. Nous n’avons compris qu’hier ces étranges incidents [...]

Nous avons commencé le mois de juillet avec en notre possession 1,25 piastres (environ 30 Pfennig) [...] j’ai [donc] décidé de me rendre le surlendemain matin, c’est-à-dire ce matin, chez le mutessarif pour lui demander de nous prêter 5 Ltq. J’y suis allé tôt, en compagnie de Khorèn et du saptieh, et j’ai rencontré le mutessarif qui était tout seul. On a ainsi pu parler plus franchement. Après avoir échangé les politesses d’usage, je lui ai demandé s’il avait une idée de l’endroit où se trouvait Garabèd. Il me répondit qu’il l’avait envoyé à Mezré. Après lui avoir fait part de toutes nos impressions, je lui ai dit que nous craignions qu’il ne se soit produit autre chose. Il m’a répondu: “Ne le dites à personne: ils ont tué Garabèd, et pas seulement lui, mais trois cents autres personnes pendant la nuit dernière et cent quatre vingts pendant la nuit précédente». Tous ont été emmenés à Indära: je n’ai pas osé demander si on les avait étranglés ou massacrés, mais on a entendu des coups de feu. Il s’agit probablement de tous les prisonniers, c’est-à-dire de presque tous les hommes qui s’y trouvaient encore. Au matin, ils y ont tous été enterrés. Il est assez probable que Krikor était également parmi eux, car il avait déja été dit qu’il serait «envoyé ailleurs». D’après les usages actuels, cela semble vouloir dire «tué», alors que «s’en aller» signifie «mourir», mais de manière violente [...]

[...] Il paraît que Garabèd a été tué à part, à la préfecture. Il se révèle maintenant qu’il a eu, ces derniers jours, le pressentiment d’une mort prochaine [...]

[...] Par ailleurs, nous songeons fréquemment à Mezré. S’il existe la moindre possibilité, nous souhaitons y aller avec toute la mission. Mais nous risquons sans doute d’être attaqués au cours du voyage; nous n’y parviendrons qu’à condition que les autorités nous aident ou nous protègent. Mais les autorités ne peuvent le faire en aucun cas. Moustapha agha m’a tout de suite enlevé tout espoir; [selon lui], le mutessarif ne nous laisserait pas partir, nous serions en sûreté ici. D’ailleurs, les choses ne marcheraient pas autrement qu’ici à Mezré, Sivas, Erzeroum, Ezindjan, Césarée, etc. Il s’agirait d’un ordre venant d’en haut, méticuleusement préparé, naturellement. C’est pour cela que nous ne recevons plus, depuis longtemps, la visite de Turcs, pour cela que le mutessarif a tenu les propos mentionnés aux pages 34/35 [...], pour cela que l’arrestation de tous les hommes comme des garçons encore présents, qui avaient déja été libérés par le mutessarif une première fois, fut si hâtive. On nous a odieusement trompés et trahis, avec une méchanceté diabolique et avec perfidie. Certes pas les autorités locales dans leur ensemble — cela surtout pas —, même si elles sont entre les mains de la populace [...] Quand le mutessarif actuel est arrivé, tout avait déja été préparé par son remplaçant de telle manière qu’il ne pouvait plus nager à contre-courant. Quatre ou cinq hommes ont tout dirigé [...]

Das Grauenhafte, Entsetzlichste ist geschehen: Massaker [...] Als ich beim Mutessarif war, kamen plötzlich alle Arbeiter (wohl 100 bis 200), die eben mit Eseln, Röhren, Werkzeugen u(nd) dergl(eichen) nach Indärä zu der Wasserleitungsarbeit gegangen waren, zurück. Kurze Zeit darauf wurden von hier Soldaten beobachtet, die nach Indära hinaufgingen, und ein Offizier zu Pferde, höchstwahrscheinlich der Gendarmeriekommandant. Diese seltsamen Vorgänge haben wir auch erst gestern verstanden [...] (p. 40).
Da wir den Juli mit einem Besitz von 1,25 Piaster (ca. 30 Pfennig) angetreten haben und unser letztes Geld (übrigens von Choren geborgt) bei Garabèd gewesen war, beschloß ich am andern Morgen, also gestern früh, zu Mustapha Agha (Bürgermeister) zu gehen und ihn zu bitten, uns fünf Ltq. zu leihen. Ich ging früh mit Choren und dem Saptieh und traf Mustapha Agha allein, so daß man einmal freier sprechen konnte. Nach den nötigen Eingangsgesprächen fragte ich, ob er nicht wüßte, wo Garabèd wäre. er wäre nach Mesereh geschickt, lautete die Antwort. Nachdem ich ihm alle meine Eindrücke erzählt hatte, sagte ich, wir hätten Sorge, daß etwas anderes geschehen sei. Darauf er: Sage es niemand anders, Garabèd haben sie getötet, und nicht nur ihn, sondern in der vorigen Nacht 300, in der vergangenen 180. Alle nach Indärä gebracht und dort — ich mochte nicht fragen, ob erdrosselt oder abgeschlachtet; denn Schießen hätten wir gehört. Es muß sich um alle Gefangenen handeln, d(as) h(eißt) also um fast alle Männer, die überhaupt hier noch vorhanden waren. Morgens sind die dann dort alle vergraben. Ziemlich sicher ist auch Krikor darunter; es hatte schon geheißen, er würde «wo anders hin geschickt.» Das scheint nach dem jetzigen Sprachgebrauch zu bedeuten «töten», während «gehen» sterben, d(as) h(eißt) auf gewaltsame Weise, heißt [...] (p. 42).
[...] Garabèd soll übrigens besonders, in der Regierung, getötet sein. er muß, wie jetzt herauskam, die letzten Tage schon Todesahnungen gehabt haben [...] (p. 43).

[...] Wir dachten auch viel über Mesereh nach. Wenn irgend möglich, wollten wir mit dem ganzen Haus nach Mesereh. Aber auf der Reise würden wir zweifellos überfallen; es ginge nur, wenn die Regierung uns hülfe und schützte. Das wird sie aber keinesfalls können und dürfen. Mustapha Agha nahm mir auch gleich jede Hoffnung; der Mutessarif werde uns nicht lassen; wir seien hier sicher. übrigens soll es in Mesereh, Sivas, Erserum, Ersinghan, Cäsarea usw. gerade so zugehen wie hier. Es sei ein Befehl von oben, natürlich reiflich vorbereitet. Darum so lange schon kein türkischer Besuch mehr bei uns, darum die Seite 34/35 wiedergegebenen Worte des Mutessarif, [...] darum die eiligen Gefangensetzungen aller noch übrigen Männer und auch der Knaben, die der Mutessarif einmal frei gelassen hatte. Wie entsetzlich hat man uns betrogen und verraten, mit satanischer Bosheit und Schlauheit. Nicht die ganze Regierung, durchaus nicht; aber sie steht unter der Pöbelherrschaft [...] Als dieser Mutessarif kam, war sicher die Sache unter dem Vertreter schon so weit geschürt, daß er nicht mehr gegen den Strom konnte. Vier, fünf Leute sollen alles geleitet haben [...] (p. 43).

4 juillet 1915 — [...] D’après les dires d’Habèch, 80% seulement des Turcs sont d’accord avec ces mesures contre les Arméniens. Durant la nuit dernière, vers 1h30, Khorèn et Sarah ont entendu le bruit de deux voitures qui, l’une après l’autre (ou une voiture à deux reprises), sont allées vers le versant [du champ]: probablement [s’agit-il] de nouveaux assassinats et d’enterrements. Dans chacune des ces voitures devaient se trouver dix à vingt corps au minimum. On dit que les assassinats arrivent maintenant à leur terme. D’après notre propre expérience, [ils ont fait] six à sept cents [morts] au minimum. Seuls quelques individus — environ 40 ouvriers —, travaillant à la pose des tuyaux de la conduite d’eau d’Indära, sont restés. Ils sont eux-mêmes convaincus qu’ils ne resteront en vie qu’aussi longtemps que leur travail ne sera pas achevé. Aaron et le maître Megerditch sont [donc] probablement encore en vie [...]

[...] Unter dem türkischen Volk sollen nach Habeschs Aussagen nur 80 Prozent mit den Maßregeln gegen die Armenier einverstanden sein. - In der vorigen Nacht um 1 1/2 Uhr hörten Choren u(nd) Sarah, wie zwei Wagen nacheinander (oder einer zweimal) nach dem Bergabhang fuhren, ganz offenbar wieder neue Ermordungen und Begrabungen. In einem solchen Wagen werden schwerlich unter 10 bis 20 Leichen gewesen sein. Das Töten soll jetzt zu Ende sein; nach unseren Erfahrungen also wohl mindestens 600 bis 700. Es sind übrig noch außer einzelnen etwa 40 Arbeiter, die Röhren für die Indäräwasserleitung machen. Die rechnen aber ganz bestimmt damit, daß sie nur noch so lange leben werden, als ihre Arbeit dauert. Aaron und Megrditsch Warbed sollen noch leben (p. 48).

5 juillet 1915, à 11 heures du soir — La nuit dernière, avant de me coucher, j’ai fait mon tour habituel vers le Eiwa supérieur. Tout d’un coup, j’ai entendu le grincement lugubre de roues de voitures dans le champ et j’ai compris: ils amènent une fois de plus des cadavres pour les enterrer dans les fosses du versant. Un quart d’heure après, ces bruits se sont refait entendre, puis ont disparu dans les vergers. Plus tard [dans la nuit], Mihran a entendu la même chose. Habèch a appris qu’on avait tué quatre catholiques et que dans chaque voiture il n’y avait que deux corps [...]

[...] Sur le sort de Krikor, il court ce bruit invérifiable: on l’aurait encore vu mardi dernier dans le han. On y aurait formé deux bataillons de soldats-ouvriers avec les Arméniens qu’on a trouvés. Le premier doit terminer les travaux de la conduite d’eau, tandis que le second — incluant Krikor —, doit être envoyé n’importe où pour y moissonner du blé. Un saptieh aurait dit: “Cela m’étonne que les Allemands ne soient pas parvenus à te libérer”. Plus tard, on aurait transferé ce groupe dans la prison et on l’aurait vu de nouveau, tard dans la nuit, quand ces [hommes] ont été emmenés de là vers une destination inconnue, soi-disant pour des travaux de récolte, mais plus vraisemblablement à Indära pour y être étranglés. Il s’agit là d’une autre sorte de récolte — celle du faucheur —, la mort. Ces détails relèvent probablement de la fable, mais j’ai voulu les conserver, car c’est la seule information qu’on a. Mis à part tous ces faits affreux et lugubres et toute la détresse qui pèsent lourdement sur notre cœur et nous énervent, ce qui nous fait le plus mal au cœur est que nos «alliés et frères» nous ont trahis de la manière la plus vile et infâme. Cette trahison a coûté la vie à Garabèd et à Krikor, nous a enlevé des collaborateurs dont notre travail dépendait avant tout, a détruit toute notre confiance dans le gouvernement et nous a fait régresser dans l’estime du peuple [...] Nous et nos collaborateurs faisons de notre mieux pour ce pays et ce peuple; nous usons de notre crédit pour calmer le peuple; nous nous donnons de la peine pour témoigner de la vérité en haut comme en bas et, pour tout remerciement, nous recevons un coup deux fois mortel. Nous apparaissons comme étant trahis et comme traîtres [...]

11 Uhr abends. Ehe ich heute früh, d(as) h(eißt) in der vergangenen Nacht, zu Bett ging, machte ich noch einmal den gewöhnlichen Rundgang auf der oberen Eiwa. Da hörte ich das unheimliche Knarren der Wagenräder auf dem Feld u(nd) begriff: Sie fahren von neuem Leichen nach den Grabstellen am Bergabhang. Nach etwa einer Viertelstunde kam das Geräusch wieder und verlor sich in den Obstgärten. Mihran hörte dann später noch einmal den selben Vorgang. Habesch hat gehört, es seien vier Katholiken getötet, in einem Wagen immer nur zwei Leichen gebracht [...] (p. 49).
[...] über Krikors Verbleib kursiert folgendes unkontrollierbare Gerücht: er sei vorigen Dienstag Abend noch im Chan gesehen. Da seien zwei Gruppen aus den dort befindlichen Armeniern (Arbeitssoldaten) gebildet, die eine sollte hier die Wasserleitungsarbeit beendigen, die andere, der Krikor zugewiesen wurde, sollte wohin geschickt werden, um Weizen zu pflücken. Ein Saptieh hätte gesagt: Ich wundere mich, daß die Deutschen dich nicht aus unserer Hand haben befreien können. Diese Gruppe sei dann ins Gefängnis überführt und sei spät abends von neuem gesehen, wie sie von dort nach unbekanntem Ziel abgeführt worden sei, angeblich zur Erntearbeit. in Wirklichkeit aber wohl, um in Indära erdrosselt zu werden. Das war ja auch eine Ernte - des Schnitters Tod. Diese Einzelheiten sind wohl nur Legende. Aber als einziges, was wir hörten, wollte ich es doch festhalten. Abgesehen von all dem Grauenhaften, Unheimlichen u(nd) all dem Jammer, was fortwährend die Seele belastet u(nd) die Nerven in Aufruhr bringt, hat unser Herz am tiefsten verwundet dieser unsagbar gemeine u(nd) niederträchtige Verrat, den unsere «Bundesgenossen und Brüder» an uns verübt haben, der Garabèd u(nd) Krikor das Leben, uns die Arbeiter, an denen unsere Arbeit zum größten Teil hing, u(nd) vor allem jede Spur von Vertrauen zur Regierung u(nd) Ansehen u(nd) Achtung beim Volk gekostet hat [...] Wir arbeiten mit unseren Leuten für dies Land u(nd) Volk, wir bieten allen unseren Einfluß auf zur Beruhigung des Volkes, wir geben uns Mühe, oben u(nd) unten als Zeugen der Wahrheit aufzutreten; der Dank ein doppelt tötlicher Schlag. Wir stehen als Verratene u(nd) als Verräter da [...] (p. 51).

7 juillet 1915 — [...] Cette nuit il n’y a pas eu d’incidents. Quand je me suis réveillé, je n’ai rien entendu. Plus tard, on a entendu des bruits qui donnaient l’impression qu’une foule de gens se rendait vers Indära. Mais il est possible que nous nous soyons trompés [...] Vers 10h30, Moustapha agha, le maire, est subitement arrivé. Il nous a appris les faits suivants: il considère que le nombre des Arméniens tués ces quinze derniers jours dépasserait les deux mille. On les aurait pour la plupart enterrés à Indära — non plus ici, sur le versant, par crainte de nous —, environ cent cinquante à Tach tépé [et] deux cent cinquante du coté de Kundebeg. Le remplaçant du mutessarif, le kaïmakam d’Arha, serait le principal responsable. On en aurait déja tué un certain nombre sous son administration, dans le bâtiment de la préfecture, à coups de fouet [...] à présent, les principaux responsables seraient Haschim beg et ses fils [...] Le mutessarif [...] n’y peut rien, tout dépendant de quatre ou cinq hommes. Il cherche maintenant par tous les moyens à maintenir les femmes sur place. Quand il nous a rendu visite [...] en compagnie de son fils adoptif noir — un mauvais caractére —, Haschim beg nous a par ailleurs signalé: «Lorsqu’il se passe ici des choses pareilles — c’est-à-dire des massacres —, cela se fait par l’intermédiaire de quelqu’un d’influent, comme moi par exemple». Le ministre à Constantinople aurait d’ailleurs donné l’ordre de prendre des mesures contre les Arméniens. Il se serait produit des faits semblables entre autres à Dyarbékir. à Mezré, le vali aurait empêché cela. Celui-ci a envoyé les Arméniens, hommes et femmes, à Ourfa. Il les a fait passer par ici et il a télégraphié au mutessarif de Malatia, pour qu’il envoie des hommes à leur rencontre. Le mutessarif aurait répondu qu’il ne disposait pas d’hommes fiables. Moustapha agha aurait immédiatement proposé de s’en occuper lui-même, mais le mutessarif ne le lui aurait pas permis. A cause de sa sympathie pour les chrétiens, Moustapha agha est de toute façon haï comme giaour [= «infidèle»] et constamment en danger. Aujourd’hui, deux cents femmes arméniennes sont venues chez lui. Il leur a conseillé de refuser de partir. On aurait jeté en masse des déportés venus de Sivas dans le Tokhmassou, un affluent de l’Euphrate, à trois heures d’ici. Puis, durant la nuit, nombre de voitures vides seraient arrivées ici (au cours de la nuit de l’avant-veille, nous avions en effet entendu le bruit de plusieurs voitures provenant de la route de Sivas). Ce sera le sort d’encore beaucoup de gens. Le cheval du médecin de la ville assassiné a été offert en cadeau à une personne de Mezré par Mehmed beg. Celui de l’évêque catholique, tué pendant la nuit, a été donné en cadeau à Moustapha agha: il l’a monté aujourd’hui même. Le mollah, membre du parlement, qui nous rendait souvent des visites amicales, rapporte partout que les biens des Arméniens tués appartiennent légalement aux Turcs. Le mutessarif lutte vainement contre lui [...] Moustapha agha demande «Pourquoi l’Europe n’intervient-elle pas contre tout cela? Des choses pareilles sont-elles écrites dans notre ou votre histoire? Si on se pose des questions, toute la vérité est écrite ici», et il indique son cœur au même moment, en [affirmant] «moi je n’ai pas peur[...]».

[...] Die Nacht verlief ohne Zwischenfälle. Solange ich wachte, war gar nichts zu hören; nachher sind Geräusche gehört worden, als ob eine Menge Menschen nach Indära gegangen wäre. Doch kann das auf einer Täuschung beruht haben [...] Um halb elf Uhr kam plötzlich Mustapha Agha, der Bürgermeister. Von dem konnten wir noch Folgendes erfahren: er gibt die hier in den letzten 15 Tagen getöteten Armenier auf über 2000 (zweitausend) an. Die meisten habe man in Indära begraben (aus Furcht vor uns nicht mehr hier oben am Bergabhang), etwa 150 am Tasch däpä, 250 an der Kundebeg-Seite. Der Mutessarifstellverteter, Kaimakan von Arrha, habe die Hauptschuld. Zu seiner Zeit seien schon eine ganze Reihe in der Regierung mit Schlägen und Striemen ums Leben gebracht! [...] Jetzt sei einer der Hauptmacher - Haschim Beg u(nd) seine Söhne [...]. Der Mutessarif [...] habe nichts dagegen machen können; alles sei in Händen von vier, fünf Leuten. Jetzt arbeite er noch immerfort daran, daß die Frauen hier bleiben dürften. übrigens hatte uns neulich Haschim Beg, als er [...] mit seinem schwarzen Adoptivsohn, einem schlechten Menschen, hier war, gesagt: Wenn solche Sachen (d.h. Metzeleien) passierten, so würde es ja durch Vermittlung eines Großen, wie z(um) B(eispiel) meiner, geschehen!! — Es sei übrigens auch vom Minister in Konstantinopel Befehl gekommen, gegen die Armenier vorzugehen. So sei es in vielen Städten ebenso gegangen wie hier, unter) a(nderem) auch in Diarbekir. In Mesereh habe es der Wali nicht zugelassen. Der habe die Armenier, Männer u(nd) Frauen, nach Urfa abgeschickt über hier, an den hiesigen Mutessarif telegraphiert, daß er Leute entgegenschickte. Dieser habe geantwortet: er hätte keine zuverlässigen Leute. Als sich Mustapha Agha angeboten hätte, hätte ihn der Mutessarif nicht gelassen. überhaupt ist Mustapha Agha wegen seiner Christenfreundschaft als «Gjaur» verhaßt u(nd) gefährdet. Heute waren 200 armenische Frauen bei ihm gewesen. er hatte ihnen geraten, sie sollten sich weigern zu gehen — Verbannte aus Sivas seien massenhaft in den Tochmassu, Nebenfluß des Euphrat, drei Stunden von hier, geworfen. Leere Wagen seien dann viele in der Nacht hierher gekommen (Wir hörten vorgestern Nacht übrigens auch das Geräusch vieler Wagen von der Sivasstraße her). So würde es noch vielen gehen — Das Pferd des getöteten [...] Stadtarztes hat Mehmed Beg jemandem in Mesereh zum Geschenk gemacht. Das des katholischen Bischofs, der in der Nacht getötet wurde, hat man Mustapha Agha gegeben; er kam heute darauf geritten. Der Mollah, der zum Parlament gehört (???), u(nd) der schon oft u(nd) sehrfreundschaftlich hier war, verbreitet die Ansicht, die Ware der getöteten Armenier gehöre von Rechts wegen den Türken. Der Mutessarif soll vergeblich dagegen ankämpfen [...] Mustapha Agha fragte: «Schreitet denn Europa gar nicht dagegen ein? Steht so etwas denn in Eurem oder in unserem Buch? Wenn gefragt wird, hier steht die ganze Wahrheit geschrieben» — dabei zeigte er auf sein Herz —, «ich fürchte nicht [...]» (p. 53).

8 juillet 1915 — [...] J’ajoute aux indications fournies un fait qui fut rapporté aujourd’hui même à Makrouhi: un certain nombre d’ouvriers qui travaillent à Tchiftlik ont déja été transférés du han à la prison.

Il est particulièrement affreux, surtout à présent, de s’imaginer [l’état de] ces gens-là, si loin de toute conspiration politique, que nous avons fréquentés et que nous avons toujours rassurés en leur disant qu’ils n’auraient rien à craindre; des gens comme Badrian, Mikäel effendi et son fils, Gabriel effendi, qui a inlassablement travaillé pendant toute sa vie au service du gouvernement, le pasteur dont le plus grand désir était de rapprocher les gens de Dieu en ces temps de détresse et de leur apprendre à prêcher et qui, juste avant son emprisonnement, nous avait proposé de prêcher la parole de Dieu aux prisonniers, mais aussi Khosrov effendi, Nichan et beaucoup d’autres qui n’ont en aucun cas commis de crimes politiques, [devenus] dignes du dernier supplice. Tous ces gens furent mis en prison, étranglés de nuit et enfouis n’importe où. On ne peut pas se faire à cette idée. Nous ne comprenons pas comment nous n’avons pas pressenti tout cela [...] Mais nous sommes reconnaisants de n’avoir pas pressenti [ces choses] et nous croyons que Dieu a fermé nos yeux. Car si nous l’avions su, nous aurions été dans l’obligation de risquer notre vie pour les Arméniens et cela, selon toute probabilité, en vain.


[...] Zu der oben gegebenen Bemerkung noch eines, was auch heute Makruhi erzählt wurde: Von den Arbeitern, die in Tschiftlik arbeiteten, sind bereits welche aus dem Chan ins Gefängnis überführt worden!
Wie entsetzlich, wenn man sich all die Leute vorstellt, denen nichts ferner lag als politische Umtriebe, mit denen wir verkehrten u(nd) die wir stets beruhigten, daß ihnen gerade in dieser Zeit keine Gefahr drohen könne, wie Bardrjan, Micael Eff(endi) u(nd) Sohn, Gabriel Eff(endi), der sein ganzes Leben unermüdlich als Rechtsanwalt im Dienste der Regierung gearbeitet hat, der Badwelli, dessen größtes Anliegen war, die Leute in dieser Zeit der Not zu Gott zu führen u(nd) zum Beten anleiten zu können, der noch dicht vor seiner Verhaftung gern mit uns darüber gesprochen hätte, ob man nicht den Gefangenen Gottes Wort bringen könne; aber auch Chosroff Eff(endi), Nischan u(nd) viele andere hatten keinesfalls todeswürdige politische Vergehen begangen. Diese Leute wurden nun alle ins Gefängnis gesperrt und nachts irgendwo erwürgt u(nd) verscharrt. Man kann’s nicht fassen. — Ganz unbegreiflich ist uns, daß wir all das nicht vorausahnten [...] Wir sind aber dankbar, daß wir es nicht geahnt haben u(nd) meinen, Gott habe unsere Augen gehalten. Denn hätten wir es gewußt, so hätten wir wohl unser Leben für das der Armenier einsetzen müssen — u(nd) aller Wahrscheinlichkeit nach vergeblich (p. 56).

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