RHAC II Partie 3. Autres témoignages sur les déportation et les camps de concentration
de Syrie et de Mésopotamie (1915-1916)

5 - MGR ANGELO MARIA DOLCI

Persecuzione armena
Proposte al governo in favore degli Armeni persequitati*

Il est indispensable que le gouvernement ottoman, comme puissance civilisée, prenne en considération les propositions suivantes pour réparer au moins en partie les mesures sévères auxquelles les Arméniens de Turquie sont soumis depuis plus d’un an.

I - Donner des ordres aux pouvoirs provinciaux de changer leur politique persécutive contre les Arméniens qui se trouvent dans leur circonscription. Les nouvelles arrivées de Castemouni, d’Angora, de Yozgad, de Césarée, d’Andrinople, de Brousse, etc., nous révèlent que les quelques familles — même les familles de soldats — restées sans hommes sont dispersées dans les villages environnants sans soutien et manquant de pain.

II - Donner des ordres aux autorités des provinces oùse trouvent des Arméniens transférés de se comporter avec humanité avec ces malheureux et de leur permettre de se fixer là où ils se trouvent, afin qu’ils puissent se reposer et gagner leur pain: on nous fait savoir que les Arméniens transférés en Mésopotamie et surtout dans le vilayet d’Alep sont obligés de changer souvent de lieu d’exil et de se fixer en de tels endroits où ne pouvant vivre, ils meurent de faim.

III - Le gouvernement ottoman a cessé les subsides qu'il avait distribués pendant quelques mois aux Arméniens transférés. Vu leur situation incertaine et changeante, et privés des moyens d’existence, il est indispensable que le gouvernement continue encore quelques temps ces subsides.

IV - Donner les ordres les plus sévères aux autorités provinciales de laisser dans leurs foyers les Arméniens encore non-transférés. L’exil des Arméniens, en familles ou non, des provinces d’Andrinople, de Castemouni, de Brousse, de Césarée, etc., est devenu journalier, et dépend tout simplement du caprice des employés du gouvernement.

V - D’après les déclarations du gouvernement ottoman, les massacres des Arméniens sont exagérés. Or, jusqu’à ce jour, on n’a reçu aucune nouvelles des Arméniens de plusieurs endroits. Où se trouvent donc ces Arméniens qui ne donnent pas signe de vie à leurs parents ou amis se trouvant dans la capitale ?

VI - Que les administrations des Postes et Télégraphes, etc., permettent aux Arméniens transférés de pouvoir correspondre avec leurs parents et amis et de recevoir leurs secours.

VII - Il est évident que chaque jour des Arméniens sont exilés, sous des prétextes quelconques, de Constantinople. Ceux-ci, arrivés à Ismit, sont obligés de continuer leur chemin à pied, et nombreux sont ceux qui ont disparu. S’ils sont transféré en Mésopotamie, pourquoi ne les y envoie-t-on pas par chemin de fer ou directement ?

VIII - Les Arméniens demeurés dans leurs foyers ou exilés se convertissent à l’islamisme forcés par la contrainte. Ainsi les familles restées sans soutien dans les provinces de Castemouni, d’Angora, de Konia, de Brousse, de Césarée, ainsi que celles qui sont exilées dans les provinces d’Alep, de Syrie, de Mossoul, Zor, etc., sont forcées de se convertir à l’Islam par les moyens suivants: une ou deux familles sont dispersées dans des villages musulmans; elles sont sujettes à toutes sortes d’attaques; les jeunes femmes sont violées, les jeunes filles sont enlevées; elles sont dépouillées de tout ce qu’elles possèdent; elles sont privées de nourriture. Il faut mettre une fin à cet état de choses.

IX - Des milliers de femmes et d’enfants sont arrachés par force d’entre les bras de leurs parents et, jusqu’aujourd’hui, ils sont gardés dans des familles musulmanes et ainsi forcées d’accepter l’islamisme. Si la religion est libre dans ce pays, il faut que ces malheureux soient retournés à leurs parents.

X - Les 99 % du clergé arménien de Turquie étant massacrés, les exilés de Mésopotamie sont privés du culte et des consolations de l’église, n’ayant avec eux aucun prêtre et ne trouvant même aucune autre église chrétienne là où ils se trouvent. Il est indispensable de permettre au Patriarcat arménien de leur envoyer des prêtres.

XI - Par l’ordre du gouvernement, dans les environs de Constantinople, quelques familles arméniennes ne sont pas transférées. La plupart sont des familles de soldats. Il est même permis à un prêtre de rester auprès d’eux pour le service religieux.

Comment expliquer alors la fermeture des églises des mêmes endroits et la confiscation des biens de ces mêms églises, comme cela a eu lieu à Andrinople, Rodosto, Brousse, Panderma, Balik-Essir, Eski-Chéhir, Konia, etc., ?

* Archivio segreto Vaticano, Delegatione Apost. di Turchia, Mgr Angelo Maria Dolci, fasc. «Persecuzionee massacri contri gli Armeni», vol. V, 93, ff 44-45.