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traduction Héléna Demirdjian
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THE NEW YORK TIMES – nyt- 1915/10/18
DES MILLIERS DE PROTESTATIONS CONTRE LES MEURTRES D'ARMENIENS
Seuls un homme et une femme s'opposent aux Résolutions dénonçant les violences.
Les Turcs ont tué 500,000 personnes.
Selon toute évidence, d'après le Département d'Etat, un quart de million de femmes ont été violées.

Le 18 Octobre 1915 -Un large public réuni hier après-midi au Century Theatre, à l'Ouest de Central Park dans la Soixante-deuxième rue, venait de crier son approbation à la résolution déplorant les atrocités commises contre les Arméniens par les Turcs, quand un homme, qui disait s'appeler Brown, s'est levé en demandant la possibilité de débattre de la résolution.

Une femme, qui s'est présentée sous le nom de Mrs Brooks, a crié des encouragements au contestataire et a demandé qu'il puisse être entendu. Il a été jeté hors du théâtre par la force, mais est revenu quelques minutes plus tard, exigeant avec colère d'être entendu.

Le rassemblement, organisé pour condamner les atrocités en Arménie, se tenait sous l'égide d'éminents Américains et d'Arméniens célèbres. Hamilton Holt, le rédacteur en chef de The Independent, présidait, tandis qu'à la tribune se sont exprimés le Révérend Dr Lames L. Barton, de l'American Board des délégués des Missions Etrangères, le Rabbin Stephen S.Wise, le Révérend Père John J. Wayne, S.J., l'éditeur de l'Encyclopédie catholique; W. Brouke Cochran, le Révérend Dr. Ernest Yarrow de Van en Turquie et le Révérend Dr. William J. Haven.

Les résolutions adoptées sont les suivantes :

Attendu que le monde civilisé a été choqué par des séries de massacres et de déportations d'Arméniens dans l'Empire turc; et,

Attendu que ces crimes et ces violences commis contre un peuple industrieux, économe et pacifique ne trouvent aucune justification ni du point de vue de la loi ni d'un point de vue humain; et,

Attendu que ces Arméniens qui ont survécu sont dans l'attente impérieuse de secours et de soulagement, puisse-t-il être ici-même,

Décidé que, en tant que citoyens Américains, nous nous faisons un devoir solennel d'implorer tous les officiels et les autres susceptibles d'avoir une influence dans l'Empire turc, de mettre un terme à ces méfaits et d'apporter toute l'aide possible à l'Ambassadeur américain et aux autres capables de secourir et de rapatrier un peuple qui, par son histoire et ses réalisations a été un bien pour l'empire;

Il est résolu de plus que cette guerre quelles que soient les nations impliquées, ne justifie pas l'inhumanité contre des gens innocents. Le massacre d'hommes inaptes au combat, les tortures, les mutilations et les violences commises ont donné aux endroits les plus agréables au monde un air d'enfer. Au nom du Dieu des Nations et de notre humanité commune, nous en appelons aux nations en guerre pour qu'elles stoppent ces crimes contre la civilisation et l'humanité.

Le Père Wynne appuyait les résolutions et Mr Holt les présentait au vote quand Brown s'est levé, rouge d'excitation.

Plusieurs hommes se sont pressés vers l'agitateur et l'ont reconduit par l'allée centrale. Mrs Brooks a alors demandé que l'homme soit entendu et a suivi ceux qui le conduisaient dehors.

Le public s'était levé comme ceux qui étaient sur la scène, parmi lesquels il y avait Mgr Lavelle, qui représentait le Cardinal Earley, Charles R. Crane de Chicago, le Révérend Dr H. P. Mendes, le professeur William W. Rockwell, le professeur Samuel P. Dutton, et nombre d'autres hommes éminents.

L'homme a été jeté de force hors du théâtre en dénonçant avec colère ceux qui l'expulsaient et en luttant pendant chaque centimètre du chemin qui le conduisait dehors.

« Ce rassemblement, a dit Mr Holt dans son discours d'ouverture, se tient dans le but de déplorer la plus grande hécatombe que l'Histoire ait connu. Ces massacres perpétrés actuellement en Turquie sont les plus affreux de l'Histoire du monde, et s'ils doivent cesser il nous faut compter sur l'Allemagne chrétienne, qui seule peut sauver les Arméniens. L'appel peut ne pas être écouté à Constantinople, mais il sera entendu à Berlin »

Le Dr Barton a été le premier à prendre la parole : « Nous sommes ici, a-t-il dit, pour parler des malheurs qui s'abattent sur les Arméniens dans l'Empire ottoman, malheurs que nous ne pouvons ignorer. » Se référant au rapport établi par le Comité sur les atrocités vécues par les Arméniens, le Dr Barton a déclaré que les révélations venaient pour la plupart de documents officiels du département d'état à Washington

« Le Comité, a-t-il déclaré, a fait des démarches pour rassembler des faits bruts avant d'aller à Washington et d'examiner les rapports officiels au Département d'état. On a demande pourquoi nous n'avions pas rendu public le nom des personnes ayant réalisé ces rapports. La raison est évidente. Les représailles sont l'une des lois en Turquie. L'un de nos Consuls a demandé que son nom soit tu car il aurait dû quitter son poste si son nom avait été rendu public. »

Le Dr Barton tenait une large liasse de papiers, des copies de rapports officiels au Département d'état. Des extraits ont été lus racontant des tortures terribles, ayant provoqué la mort dans des milliers de cas.

Le Dr Barton a lu une déclaration, émise par un Arménien célèbre, diplômé d'une université américaine, à peine arrivé dans ce pays. Il a raconté le sort de 1215 hommes. Ces hommes ont été rassemblés en troupeau et emmenés par groupes de vingt-cinq personnes sur ordre du Gouvernement et brutalement assassinés. Les exécutants, a-t-il dit, étaient des gendarmes turcs, des meurtriers et d'autres criminels libérés des prisons pour aider à l'assassinat des Arméniens.

« La récompense pour ces meurtres, disait le témoignage, était l'argent et les objets de valeur trouvé sur les corps de leurs victimes. L'un de ces hommes s'est vanté d'avoir eu 150 pounds en argent turc pour sa nuit de travail. »

Bourke Cochran a dit qu'il avait été informé qu'entre 500 000 et 800 000 Arméniens avaient été massacrés et que 250 000 filles avaient été violées. Le problème de l'Arménie, a estimé Mr Cochran, est le problème de Cuba en 1898 empiré un million de fois.

Le Rabbin Wise était le dernier intervenant. Il n'était pas là, a-t-il affirmé, en tant qu'opposant à la Turquie ni en tant que champion de l'Arménie mais pour protester contre l'inhumanité, qu'elle soit commise par les Allemands contre les Belges, par les Russes contre les Juifs, ou par les Turcs contre les Arméniens. Il a déclaré que l'Allemagne et l'Autriche pouvaient faire beaucoup pour mettre fin aux atrocités subies par les Arméniens et que si elles ne le faisaient pas, ces nations pourraient s'apercevoir que « certaines victoires sont plus désastreuses que des défaites »

« Si les Allemands veulent se mettre à dos ceux qui demeurent encore neutres, a-t-il dit, qu'ils laissent ces violences continuer sans s'y opposer. S'ils veulent se réhabiliter, qu'ils disent aux Turcs: plus une goutte de sang ne doit être versée. »

Sur tous les sièges il y avait des pétitions adressée au Kaizer et au peuple d'Allemagne pour les implorer d'utiliser leur influence pour mettre fin aux atrocités commises contre les Arméniens.

Source : THOUSANDS PROTEST ARMENIAN MURDERS


THE NEW YORK TIMES – nyt- 1915/10/16
Nous ne pouvons rien faire de plus

Le 16 Octobre 1915

WASHINGTON, le 15 Octobre Le gouvernement des Etats-Unis a fait tout ce qu'il pouvait, officiellement, dans le but de soulager la condition des Arméniens de Turquie, selon les opinions officielles. Les officiels ont dit aujourd'hui au député du New Jersey John J. Eagan qu'en dehors de protestations officieuses auprès du Gouvernement turc par le biais de l'Ambassadeur Morgenthau, soulignant le mauvais effet sur l'opinion publique américaine du traitement des Arméniens, rien de plus ne pouvait être fait.

Le député Eagan s'était enquis du sort des Arméniens et de la politique des Etats-Unis à ce sujet.

Source : WE CAN DO NOTHING FURTHER


THE NEW YORK TIMES – nyt- 1915/10/17
LES RESPONSABLES ARMENIENS ONT REPONDU A DJELAL BEY
Selon eux, le consul turc ment en niant les atrocités de masse.
ILS EXPLIQUENT LA BATAILLE DE VAN
Ils disent que les Chrétiens étaient en état de légitime défense - Rassemblement de protestation d'aujourd'hui au Century Theater.

 

Le 17 Octobre 1915

Dr M. Simbad Gabriel, Président de l' « Armenian General Progressive Association », association arménienne pionnière aux Etats-Unis, et Arshag D. Mahdesian de la Société des Arméniens en Amérique, ont répliqué hier aux propos tenus la semaine dernière par le Consul Général à New York au Times, qui affirmait que le rapport réalisé par l'American Committee au sujet des atrocités subies par les Arméniens était une fabrication, et qui ajoutait que toutes les mesures que les Turcs avaient été amenés à prendre contre les Arméniens étaient dues aux activités hostiles de ces derniers.

Mr Mahdesian a dit que les affirmations du Consul Général étaient un tas de mensonges, et « un pauvre effort de la part de Djelal Bey pour démontrer l'innocence de ses compatriotes dans les plus terribles atrocités commises contre un peuple entier depuis des siècles »

« L'une des affirmations de Djelal Bey, a dit Mr Mahdesian, qu'il sait inexacte, est celle qu'il fait quand il se réfère à une visite de Noël Buxton à Van. Selon lui, Noël Buxton a visité la ville de Van après que la présente guerre a éclaté et a tenté d'y déclencher un soulèvement contre le Gouvernement Turc. La visite qu'il cite si intelligemment comme une justification à ce qui s'est passé a eu lieu des mois avant le début de la guerre, au début de 1914, et personne ne sait cela mieux que Djelal Bey. Bien sûr, Mr Buxton n'a jamais tenté de déclencher une insurrection avant la guerre, ni pendant la guerre ni jamais.

Pourquoi les noms n'ont pas été rendus publics.

« Ensuite, Djelal Bey demande pourquoi le comité, dans lequel figurent des membres comme l'évêque Greer, le Cardinal Gibbons, le rabbin Wise, Oscar S. Straus et Cleveland H. Dodge, n'a pas donné le nom des gens qui lui ont rapporté les atrocités que les Turcs sont en train de commettre contre les Arméniens dans l'Empire Ottoman. Et bien, je vais le lui dire. C'est parce que le comité savait que s'il le faisait, Djelal Bey télégraphierait les noms en Turquie, et que cela signifierait la mort ou la torture de chacune des personnes nommées.

Aussi horrible qu'étaient les révélations faites par le rapport du Comité sur les atrocités, cela ne divulguait pas toutes les horreurs de la situation présente. En vérité, le rapport ne disait rien de la mutilation des jeunes filles, de la lacération de leurs corps ni de la pendaison haut et court des pauvres restes de leurs corps, avec inscrit sur leurs membres et leurs torses la mention « bir metallik » par livre. Un « metalik » correspond à un cent en Amérique. C'est l'une des choses affreuses qu'ils ont trouvées pour terrifier la population arménienne et c'est arrivé à Harput, à Hadjim, à Malatya et dans d'autres endroits. Cette information nous vient de sources absolument dignes de confiance.

« Et plus encore, ce rapport ne dit pas que l'ordre turc de bombarder le quartier des 'sales arméniens' à Van était signé par un officier au nom allemand, et que le bombardement était dirigé principalement contre la partie arménienne et les réserves des missionnaires américains, et que pendant le bombardement cinq drapeaux américains ont été criblés de balles lors de tirs commandés par l'officier au nom allemand »

Dr Gabriel, qui était l'un des délégués ottomans lors du Congrès International de la Croix Rouge tenu à Washington en 1912, a déclaré :

« Il semblerait que les Turcs ont seulement 'tué' les Grecs, les Maronites, les Bulgares et les Arméniens mais qu'ils ne les ont pas massacrés. Les Turcs les ont tués quand ils se sont rebellés contre l'ordre turc. Les Arméniens à Van, dit le Consul turc, se sont soulevés les armes à la main contre l'autorité turque, c'est pourquoi ils ne pouvaient être considérés autrement que comme des rebelles, et l'on ne pouvait pas attendre des turcs, après que la ville avait été reprise, qu'ils traitent ces révolutionnaires avec une main de velours. 

Voici la version du Consul. Elle pourrait être digne d'attention si elle n'était pas terriblement biaisée pour épouser sa cause. La vérité est que les Turcs avaient déjà inauguré le nouveau règne de la terreur et des massacres dans la province de Van, et Van a été poussée par le cours des 'événements cruels' à recourir à la légitime défense. D'autres villes ou villages avaient déposé les armes, croyant les serments des autorités turques selon lesquels ils ne seraient pas brutalisés, et avaient été passés traîtreusement au fil de l'épée. Les Arméniens de Van, prévenus par l'expérience des autres, ont refusé d'abandonner les armes, mais ils n'ont entrepris aucune action révolutionnaire jusqu'à ce que les troupes turques bombardent leurs quartiers, n'épargnant même pas les maisons des missionnaires américains.

Si certains Arméniens dans des villes comme Trébizonde étaient 'des éléments suspects', on pouvait les envoyer 'vers l'intérieur du pays' vers des provinces comme celles de Sivas ou de Harput qui sont situées en plein milieu de l'Asie mineure, mais pourquoi 10 000 Arméniens de Trébizonde devraient être chassés de leurs maisons et même, pourquoi des hommes des femmes et des enfants devraient-ils être jetés dans la mer Noire? Le Consul italien a été témoin de cette sauvagerie inconcevable. Qui ose le nier? L'ambassadeur Morgenthau a télégraphié depuis Constantinople que la majorité des Arméniens de Turquie ont été tués. Pourquoi l'ambassadeur affirmerait-il une telle chose s'il n'était pas convaincu de la véracité des faits?

Combien représente cette majorité? Au moins 800 000. C'est le chiffre mentionné dans les derniers rapports et c'est une estimation très prudente. Tout porte à croire que le nombre de victimes dépasse le million. »

Des délégations de plus d'un millier d'églises et d'organisations religieuses assisteront aux rassemblements principaux qui doivent se tenir aujourd'hui au Century Theatre pour protester contre le massacre des Arméniens par les Turcs. Elles représenteront toutes les confessions.

Hier, il a été annoncé que le Cardinal Farley avait officiellement désigné Mgr Lavelle, le recteur de la Cathédrale St Patrick, pour le représenter lors de la réunion. Certains des intervenants sont des missionnaires et des voyageurs qui reviennent à peine de la scène des massacres. D'autres intervenants seront W; Bourke Cochran, Le Rabbin Stephan S. Boston. Hamilton Holt présidera.

Les portes du théâtre seront ouvertes à huit heures. Aucun droit d'entrée n'est demandé.

Source : ARMENIAN LEADERS ANSWER DJELAL BEY


IL DEFEND LA REPRESSION DES ARMENIENS
Le Comte von Reventlow déclare que ce que la Turquie leur fait n'est l'affaire de personne.

Berlin, le 9 octobre 1915 (via Londres), Le comte Ernst von Reventlow, auteur militaire pour le Tagezzeitung, dans un article intitulé «le tollé au sujet des 'atrocités contre les Arméniens' à Berlin » déclare sèchement que la façon dont la Turquie gère les insurrections arméniennes ne concerne qu'elle. Son article a été inspiré par le rapport d'Henry Morgenthau, l'ambassadeur des Etats-Unis en Turquie, dans lequel il mettait en garde la Turquie contre le fait que ses relations avec les Etats-Unis seraient mises en danger si les massacres contre les Arméniens ne cessaient pas.
 
Le comte von Reventlow déclare qu'il n'est pas en mesure de parler de ce problème comme il le voudrait, mais exprime l'espoir que la Turquie ne se laissera pas intimider.
Il poursuit :
«  Si la Turquie considère qu'il est nécessaire qu'il soit mis fin par tous les moyens possibles aux soulèvements et aux autres intrigues arméniennes, pour que ces faits ne puissent pas se reproduire, cela ne constitue pas des massacres, ou alors ils sont justifiés et nécessaires, d'autant plus justifiés et nécessaires si l'on considère que l'Empire Turc est en train de mener son combat le plus difficile pour l'existence, et a assez d'ennemis extérieurs. Lui demander d'entretenir en plus un ennemi intérieur en son sein, parce que cela siérait aux Britanniques et aux Américains, c'est lui en demander beaucoup trop.

L'Empire Turc a longtemps enduré le fait que toutes les grandes puissances, désireuses de détruire, de piller ou de voler les Turcs, veuillent s'ingérer dans ses affaires. A présent nous devrions penser que ces temps-là sont enfin révolus. Et ils le seront en effet dès que l'Empire germanique aura de façon déterminée adopté le point de vue selon lequel ce que son allié turc fait avec ses révolutionnaires arméniens ne concerne que lui seul. »

L'auteur a exprimé son indignation face à un rapport publié par le Frunkfurter Zeitung dans lequel les Consuls allemands encourageaient à amoindrir les souffrances arméniennes, et a déclaré que cette position lui était incompréhensible et qu'il la considérait comme politiquement fausse.

« Nous, Allemands, n'avons aucun compte à rendre ni aux ennemis ni aux neutres quant à ce que les Turcs font avec leurs Arméniens ou à ce que les Consuls Allemands en disent » déclare-t-il. « La place de l'Empire germanique et de chaque individu allemand est aux côtés de notre allié turc, et cela sans la moindre critique »

Source : DEFENDS REPRESSION OF THE ARMENIANS


LES FEMMES ARMENIENNES VENDUES AUX ENCHERES - Nyt 19150929

Le 29 Septembre 1915
Les réfugiés racontent le sort de ceux qui sont entre les mains des Turcs

Dans son discours d'hier, ses remarques étant basées sur des informations authentifiées en sa possession, le professeur Dutton a dit qu'il ne croyait pas que quelque chose d'aussi horrible que l'effort étudié et systématique de la part d'une classe politique de Turquie -les Jeunes Turcs, dirigés par Enver Pasha- pour exterminer toute une race soit arrivé depuis de nombreux siècles. Le plan entier implique la destruction totale des Arméniens.

Il y a seulement un jour ou deux, a ajouté le professeur Dutton, une jeune fille qui avait quitté la Turquie le 18 Août l'appela pour le voir. Elle raconta le sort de 100 filles qui suivaient les cours d'une école de missionnaires en Anatolie. Ces filles, arméniennes bien sûr, furent divisées en groupes et celles qui étaient les plus belles selon les officiers turcs furent emportées par les officiers. Celles qui furent considérées un peu moins belles furent données aux soldats tandis que les moins belles furent vendues aux plus offrants.

Plusieurs Américains qui ont passé plusieurs années en Turquie sont arrivés ici ces derniers jours. Ils témoignent tous de l'entière vérité des rapports qui viennent de Turquie concernant le traitement des Arméniens. Cependant ils supplient que leur nom ne soit pas mentionné de peur que ce qu'ils disent puisse être rapporté en Turquie et que les amis ou les parents qu'ils ont laissés derrière eux soient punis par les Turcs en représailles.

Les copies de deux lettres, dans lesquelles ceux qui écrivent racontent le sort subi par les Arméniens, ont été données au Times hier par un homme qui suit de près le sort des Arméniens.

L'auteur de l'une de ces lettres dit entre autres choses:
« A Urtab, Tukh, et environ vingt autres villages Arméniens autour du lac, la population entière a été retrouvée massacrée par les Turcs, on n'a pas retrouvé une seule âme qui vive dans ces villages, qui sont maintenant abandonnés aux chiens errants, tandis qu'un grand nombre de corps ont été charriés par les rivières et le lac jusque sur leurs rives.
Ces corps, qui appartenaient tous à des hommes, étaient terriblement mutilés, mais l'on n'a rien pu découvrir sur le devenir des femmes et des enfants. Le 20 Juillet au coucher du soleil, les Arméniens se sont emparé des hauteurs de Kerkur. Quand ils ont atteint le sommet, la ville de Bitlis, en flammes, s'est présentée à leur regard désespéré. Quelques femmes réfugiées, qui ont réussi à se soustraire au cordon de sécurité turc, ont raconté depuis les massacres diaboliques dans la ville et la déportation totale des femmes et des enfants. »

Une lettre de Turquie décrite comme d'une indubitable fiabilité est arrivée à un prêtre de l'Eglise Arménienne par une mystérieuse voie souterraine. Voici quelques extraits de cette lettre:
« L'Arménie sans les Arméniens, voici le plan du gouvernement ottoman, qui a déjà commencé à installer des familles musulmanes dans les maisons et les propriétés des Arméniens. Il est inutile de le dire, les déportés ne sont pas autorisés par le gouvernement à emporter le moindre de leurs biens avec eux, et comme il n'y a pas de plus de moyen de transport en raison des exigences militaires, ils sont forcés à marcher à pied pendant les deux ou trois mois de voyage vers ce coin de la région désertique qui est destiné à devenir leur sépulcre. »

Source : ARMENIAN WOMEN PUT UP FOR AUCTION


LE DEPEUPLEMENT DE L'ARMENIE
The Independent - 19150927

Le 27 Septembre 1915
Les bouleversantes nouvelles des massacres, de la torture et de la déportation des Chrétiens Arméniens sont autant d’appels à la sympathie et à l’aide américaine. D’après des sources nombreuses et fiables en Turquie, il paraît évident qu’il ne s’agit pas de troubles locaux ou d’oppression insignifiante, mais d’un effort systématique pour déraciner la race arménienne. Des milliers de familles ont été arrachées à leurs maisons pour mourir sur les routes. Les villes et les villages ont été privés de leurs habitants. Beaucoup sont torturés pour les forcer à renoncer à leur foi chrétienne. Les femmes sont enfermées dans les harems et les enfants sont vendus comme esclaves.

La nécessité militaire ne saurait servir à excuser ces outrages dans la mesure où les régions dévastées sont dans certains cas hors de portée d’une possible invasion russe et dans la mesure où les Arméniens n’ont montré aucune disposition à la révolte à part là où, comme à Van, ils ont été contraints à l’auto-défense. Il semble que les Turcs, perdant l’espoir de maintenir leur suprématie, aient résolu de détruire les Arméniens de façon à anticiper l’établissement d’une Arménie autonome au cas où les alliés conquerraient la Turquie.

Mais il s’agit d’une chose à laquelle nous portons un intérêt sincère car de l’argent américain et des vies américaines ont été dépensés pour le soutien des peuples opprimés de l’Empire Ottoman. Le bureau Américain des délégués des missions étrangères travaille depuis près d’un siècle et a investi environ vingt millions de dollars. Il reste dans l’Empire Ottoman aujourd’hui dix collèges américains ; le Robert College de Constantinople, Le Collège de Constantinople pour filles, Le Collège Protestant Syrien à Beirut, Le Collège international à Smyrne, l’Anatolia College à Marsovan, l’Euphrate College à Harpout, Le Collège d’Aintab, le Central Turkey College à Marash, le Collège Saint Paul à Tarse, et le Teachers College à Sivas. Dans ces institutions et dans d’autres écoles il y a plus de quarante mille élèves, dont une large part est arménienne.

Des milliers d’Arméniens ont fui la tyrannie turque et ont trouvé refuge en Amérique où ils sont devenus de bons citoyens des Etats-Unis. La détresse présente et le danger imminent encouru par les Arméniens en Asie Mineure provoqueront un vrai intérêt dans tous les Etats-Unis.

Source : THE DEPOPULATION OF ARMENIA


LES RECITS SUR LES HORREURS SUBIES PAR LES ARMENIENS, CONFIRMES
Une commission sur les atrocités déclare que 1,500 000 de victimes ont déjà souffert
 nyt19150927

27 Septembre 1915 - Le Professeur Samuel Train Dutton, secrétaire de la commission sur les atrocités contre les Arméniens, a rendu public hier un rapport préliminaire de la commission décrivant le résultat de ses investigations sur les conditions terribles auxquelles sont confrontés les Arméniens. La commission déclare que son rapport sur le massacre, la torture et autres mauvais traitements subis par les Arméniens de tous âges sont confirmés par ses investigations.
Les autres membres de la commission, aux côtés du Professeur Dutton sont Cleveland H. Dodge, Arthur Curtis James, Rabbi Stephen S. Wise, John R. Mott, Frank Mason North, James L. Barton, William Sloane, D. Stuart Dodge, et d'autres.
La déclaration qu'a faite la commission hier est la suivante:
"une sous-commission a minutieusement examiné le témoignage et vient de rendre son rapport à la commission entière qui confirme chaque détail de la déclaration faite par Viscount Bryce au sujet de l'emprisonnement, de la torture, du meurtre, du massacre et de l'exil vers les déserts de l'Arabie du Nord d'Arméniens sans défense et innocents, y compris des hommes grabataires, des femmes et des enfants, et leur conversion forcée à l'Islam.
Des témoignages écrits de témoins oculaires dont les noms sont connus de la commission, mais qui évidemment ne peuvent pas être rendus publics, ont été examinés avec la plus grande attention. Ces témoignages s'étendent sur des centaines de pages, la réputation et la position des auteurs et le caractère certains de leurs déclarations emportent une conviction absolue quant à la véracité de leurs dires.
Les témoins examinés sont des Arméniens, des Grecs, des Bulgares, des Italiens, des Allemands, des Turcs, des Anglais, des Américains, des hommes d'affaires, des voyageurs et des fonctionnaires de divers grades et fonctions. Pas une seule déclaration ne peut être remise en question quant aux faits qu'elle rapporte. Ils s'accordent tous à dire que d'Izmir à l'Ouest de la Perse, de la Mer noire à l'Arabie, une propagande d'extermination des non musulmans est maintenant menée par le gouvernement Turc, qui surpasse de loin par sa férocité et par l'ampleur des destructions tout ce qu'avait fait Abdul Hamid durant sa longue expérience du massacre et de l'extermination.

Les déclarations examinées, dont beaucoup sont en la possession de la commission, couvrent des centaines de villes et de villages dans lesquels dans bien des cas tous les Arméniens ont été tués sans ménagement, souvent après d'horribles tortures, ou envoyés dans le désert pour y mourir de faim, et cela aussi, avec une cruauté diabolique. La déportation ostensible des hommes, des femmes et des enfants à travers la Mésopotamie est en général une manière de faire marcher ces réfugiés mourant de faim, sans défense, et souvent nus, vers les montagnes, pour y être soumis à des atrocités et massacrés, quelquefois par des Kurdes qui coopèrent avec plaisir à ce travail de destruction.

Parmi ces réfugiés et ces victimes se trouvent des élèves et des diplômés des écoles et des collèges américains, des professeurs et des professionnels qui ont reçu leur diplôme dans des universités européennes et américaines, des hommes et des femmes qui ont été les intellectuels et les entrepreneurs du pays pendant une génération ou plus.
La procédure planifiée, qui est la même dans toutes les parties du pays, semble avoir pour but l'élimination totale de tous les peuples non musulmans d'Anatolie, et ce but est déjà en voie d'être atteint en ce qui concerne les Arméniens.

En plusieurs endroits les propriétés américaines ont été saisies, les Américains recherchés, emprisonnés et expulsés du pays. Leurs lettres et leurs télégrammes, même en provenance du Consulat Américain, ont été interceptés, et leurs vies mises en danger. Ceci, cependant, paraît de moindre importance comparé au travail de destruction entrepris contre les Arméniens.

Les preuves semblent démontrer que probablement 1,500,000 d'Arméniens ont déjà été assassinés ou forcés à marcher vers le désert, où seule la mort les attend, à moins qu'un soutien immédiat ne les mette à l'abri. Tout ceci s'est passé depuis le mois de Mars, et a maintenant atteint le paroxysme de son abominable fureur.

La commission croit que si la presse du pays, avec toute l'emphase qu'elle peut, fait entendre ses protestations et appelle le Gouvernement Turc à mettre un terme à ce crime contre l'humanité, et à laisser les exilés qui sont peut-être encore en vie rentrer chez eux, ceci ne manquera pas de produire des résultats.

Etant donné la grande influence que l'Allemagne et l'Autriche exercent sur leur allié, le peuple Américain ne manquera pas de les considérer moralement responsables s'il était permis que les atrocités continuent."

Source : TALES OF ARMENIAN HORRORS CONFIRMED