À propos du Traité de Sèvres,
par Rafael Hambardzumyan, historien.

La Sentence Arbitrale de Wilson a été fondée et évoquée au cours des conférences de Paris (1919-1920), de San-Remo (1920-avril 1926) et figure dans le Traité de Sèvres ( l’article consacré à l’Arménie, le 10 août 1920), au sein desquels des documents ont été acceptés, tout comme a été acceptée la Sentence Arbitrale qui établit le fait du Génocide arménien. Ils sont encore applicables aujourd’hui et revêtent un caractère juridique fondant en droit des revendications envers la Turquie. La Turquie ottomane ayant signé le traité de Sèvres, a déjà reconnu le fait du Génocide arménien commis par la Turquie.

Les pays initiateurs de la Conférence Internationale de Paris (1919-1920), de San-Remo (1920- Avril 1926) et du Traité de Sèvres ainsi que la carte de Décision juridique et qui ont été parmi les premiers à signer le document étaient : l’Empire Britannique, le France le Japon. Dans le Traité de Sèvres, ils sont présentés comme les principaux pays alliés. Le document était signé également par la Pologne, la Grèce, la Bulgarie, la Tchécoslovaquie, le Portugal, la Belgique. La Turquie du Sultan et d’autres pays. Tous ces pays, à l’exception de la Turquie sont dénommés alliés des Principaux Pays Alliés. Bien que le Traité de Sèvres n’ait pas été ratifié par les parlements des pays-participants mentionnés, il était contraignant pour la Turquie du Sultan, le Traité ayant été signé par les dirigeants des partenaires contractants. Par comparaison avec le fait que le Traité de Sèvres concernait plus de dix nations et pays, la Sentence Arbitrale ne concernait que l’Arménie et les Arméniens.

Dans la carte de Décision juridique, la carte tracée et scientifiquement établie sous la direction de Woodrow Wilson, les territoires destinées à être retournés ont été déterminés, l’étendue des territoires est de 40 mille miles carré ( 90 mille kilomètres carrés). Ce territoire inclut : 40 mille kilomètres carrés de la de la province d’Erzerum, 20 mille kilomètres carrés de la province de Van, 15 mille kilomètres carrés des provinces de Bitlis et de Trébizonde. En ce temps là, le territoire de l’Arménie était de 71,5 milliers de kilomètres carrés. Ensuite, selon l’estimation de Gabriel Lazarian le territoire de l’Arménie devrait s’étendre sur 162 mille kilomètres carrés. Le 6 décembre 1920, le président des États-Unis Woodrow Wilson remit officiellement la Sentence arbitrale au Sommet de Paris, ce qui fut confirmé par tous les pays qui avaient signé le Traité de Sèvres (c’est-à dire par la France, les USA, pays membres des structures internationales chargées de résoudre le problème de l’Artsakh. Ainsi, selon la Sentence arbitrale, les pays ont reconnu indiscutablement le droit et le titre de l’Arménie sur le territoire qui lui était dévolu. Ainsi la Sentence arbitrale, signée par beaucoup de pays du monde est un document juridique qui représente une demande d’indemnisation à la Turquie.

C’est-à-dire que les pays ci-dessus, en apposant leur signature au bas de ce document, considèrent que la frontière entre la Turquie et l’Arménie déterminée internationalement par Sentence arbitrale est délimitée dans le document signé. Ladite Sentence arbitrale exprime les relations amicales entre l’Arménie et les USA dans les sphères politiques, diplomatiques et montre la réalité de l’aide des USA à l’Arménie. Expliquer la signification de cette action aux peuples de chacun des pays est important pour créer des relations étroites entre eux.

En 1920, soutenus économiquement, militairement et politiquement par les Bolcheviques russes, les Kémalistes ont pris le pouvoir en Turquie. L’alliance Turcs-Bolcheviques et le traité mit fin à la République d’Arménie le 2 décembre 1920. L’accord-transaction d’amitié et fraternité , signé le 16 mars 1921 entre la Turquie et la Russie, puis l’accord illégal signé à Kars entre la Turquie et la Russie le 13 octobre 1921, rendit impossible le respect des dispositions de la carte de la Sentence arbitrale.

Quelques historiens de la période soviétique et quelques spécialistes actuels font un lien entre l’échec du Traité de Sèvres et le Traité de Lausanne, en attribuent la responsabilité à l’Europe. C’est regrettable, mais ils n’admettront pas que c’étaient les Bolcheviques qui l’ont mis en échec. Depuis septembre 1919 jusqu’en 1922, ils ont approvisionné la Turquie en armes, matériel militaire, or et autres. Entre 1920 et 1922, la Russie a fourni à la Turquie un territoire de 140 mille kilomètres carrés. Il s’agit de l’Arménie de Wilson, Kars, Ardahan, Sourmalou et 10 tonnes d’or en sus. La mise en application de la Sentence arbitrale et celle du Traité de Sèvres ont été empêchées par la Russie par le renversement de la République d’Arménie du 2 décembre, ce qui se produisit dix jours après que le Traité de Sèvres a été signé. On peut donc déclarer que la conférence de Lausanne, qui se déroula seulement trois ans plus tard, lorsque l’alliance entre la Russie et la Turquie rendirent caducs le Traité de Sèvres et la Sentence arbitrale.

À Lausanne, l’Europe fit de son mieux pour reprendre en partie les dispositions du Traité de Sèvres et la Sentence arbitrale de Wilson et pour organiser le retour de 300 mille Arméniens dans les terres de l’Arménie de l’ouest et créer les limites des provinces arméniennes conformément à la carte de la Sentence arbitrale. Mais le Ministre des affaires étrangères de Russie refusa d’accepter la proposition européenne. Il suggéra au lieu de cela d’installer les Arméniens en Ukraine et dans le Kouban [Région du sud de la Russie au bord de la mer Noire], ce qui signifiait non seulement la liquidation de la présence arménienne en territoire de l’Arménie de l’ouest mais aussi l’assimilation des Arméniens dans les populations ukrainienne et russe. Conformément aux exigences turques et russes, une délégation arménienne n’a pas été admise à participer officiellement aux pourparlers, parce qu’en ce temps-là, l’Arménie n’était pas un pays indépendant et se trouvait sous l’autorité du Gouvernement soviétique, étant l’une des composantes de la région transcaucasienne avec la Géorgie et l’Azerbaïdjan. Ainsi, à Lausanne, tout comme à Moscou le 16 mars 1921, les Arméniens n’ont pas pris part aux discussions. Moscou parlait et décidait à leur place. Cependant, grâce à l’action de Lord Curzon et d’autres personnes également, l’Europe parvint à avancer les solutions au problème arménien en trois variantes d’un comité arménien dirigé par Noratounkean [Gabriel Noratounkian, ou Noratounkyan, ministre des affaires étrangères de Turquie 1912-1913] :

a. Créer des implantations arméniennes dans le territoire délimité par la carte de la Sentence arbitrale. Lorsque les délégations russes et turques repoussèrent cette proposition, les européens suggérèrent la deuxième version.

b. Créer des implantations pour les Arméniens en Cilicie. La délégation turque a également rejeté cette proposition et à la suite de la proposition de la délégation russe, quittèrent la salle de discussion. Les discussions furent interrompues pendant deux mois. Par la suite, les pays européens suspectèrent la Russie d’avoir en tête le “ projet de l’Europe d’affecter la Cilicie à l’un des pays européens “ et suggérèrent d’adjoindre la partie des terres délimitées par la carte de la Sentence arbitrale à la Russie soviétique. Cette proposition fut refusée elle aussi. Et du fait du comportement de la Russie, le problème arménien devint le problème des réfugiés arméniens.

Le Traité de Sèvres et la carte de la Sentence arbitrale de Wilson ont été rendus par la Russie impossibles à mettre en application. D’abord en mettant fin à l’indépendance de l’Arménie dix jours après signature du document et ensuite, par la signature quatre mois plus tard de l’accord d’amitié et de fraternité avec la Turquie. Non seulement le Traité de Sèvres n’a pas été annulé par l’accord de Lausanne, mais les Européens firent de leur mieux pour intégrer quelques articles du Traité de Sèvres et de la Sentence arbitrale de Wilson dans le Traité de Lausanne.

Considérant que :

1. L’obligation faite à la Turquie de retourner les terres à l’Arménie n’est pas fondée sur le Traité de Sèvres mais sur la décision prise en 1920 qui découlait du Traité de Sèvres. La ratification du Traité de Sèvres et la force du droit de la carte de la Sentence arbitrale de Wilson sont deux problèmes juridiques distincts. Cela signifie que le fait que le Traité de Sèvres n’ait pas été ratifié ne peux pas influer sur les effets de la carte de la Sentence arbitrale de Wilson.

2. Selon le droit international, les décisions juridiques [ des sentences arbitrales] sont d’exécution obligatoire qu’elles soient ratifiées ou non. Elles ne sont pas susceptibles d’appel.

3. La Sentence arbitrale de Wilson signée par le président des USA et le Secrétaire d’état des USA et qui porte le Grand Sceau des USA est devenu un document du droit interne américain qui n’appelle aucune ratification. Selon ce document, le territoire de 40 mille mètres carré appartient à la République d’Arménie. Le droit de la République d’Arménie et le titre [de propriété] de la République d’Arménie doivent être applicables. Notre démarche consiste à démontrer scientifiquement la réalité des frontières entre la Turquie, la Géorgie, l’Arménie et l’Azerbaïdjan devraient être corrigées conformément aux décisions de la conférence de Paris, et aux traités de San Remo et de Sèvres, et non sur des transactions entre Turquie et Russie bolchevique. Cela doit être le cas, parce que ces accords sont déclarés par plus de dix pays.

Selon l’auteur, vis-à-vis du droit international, la Sentence arbitrale de Woodrow Wilson a des effets autonomes et par conséquent, ses effets persistent indépendamment du Traité de Sèvres. En droit international actuel, les sentences arbitrales convenues par les parties sont effectivement exécutables et non susceptibles d’appel. La Turquie en acceptant de se soumettre à la Sentence arbitrale décidée à Sèvres acceptait implicitement et définitivement la carte de Wilson.

Le raisonnement juridique de l’auteur, même mal dit dans un anglais approximatif (un effet de la traduction de l’arménien ?) est structuré et peut convaincre.

À faire valider par les experts en droit international
Carte interactive du Traité de Sèvres ICI

mercredi 13 mars 2013,
Jean Eckian ©armenews.com

Traduction Gilbert Béguian pour Armenews & Imprescriptible

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