Revue d'histoire arménienne contemporaine II Partie IV Hans Bauerfeind : journal de 1915

LE JOURNAL DE HANS BAUERNFEIND

B - Les déportés de Sivas et de Mezré/Kharpert;
les préparatifs de déportation à Malatia

2 juillet 1915— [...] Hier après-midi, Haschim beg, notre voisin, est venu nous voir. La seule chose qu’il nous a dit fut: “Les Arméniens seront tous envoyés en bannissement dans la région d’Ourfa”. Si cela aboutit à un bannissement général, la mesure est incroyablement cruelle et inutile [...] L’exécution de cette peine correspond toutefois entièrement au bas niveau intellectuel et moral du pays et paraît dans les cas particuliers infiniment cruelle et arbitraire. C’est également pour cette raison qu’il faut fermement la qualifier de massacres, même si, à la différence des massacres des années 1895/96, ceux-ci se déroulent sous la forme fastueuse d’un meurtre judiciaire qu’on déguise en nécessité patriotique devant le public et qu’on justifie, sans presque aucune raison, en citant l’exemple des Allemands en Belgique.

[...] Gestern Nachmittag kam Haschim Beg, unser Nachbar [...] Das einzige, was er sagte, war: Die Armenier würden alle in die Urfaer Gegend in Verbannung geschickt. Wenn sie ganz durchgeführt wird, übrigens eine unsagbar grausame - und unnötige - Maßregel [...] Aber die Ausführung der Strafe entspricht ganz dem sittlichen und intellektuellen Tiefstand des Landes und erscheint in einzelnen Fällen als unendlich grausam und willkürlich. Es muß auch deshalb entschieden Massaker genannt werden, wenn auch im Gegensatz zu dem von 1895/96 in der Form eines Justizmordes großen Stils, der vor der effentlichkeit als patriotische Notwendigkeit hingestellt und mit dem Beispiel der Deutschen in Belgien gedeckt wird, mit kaum einem Fünkchen Recht (p. 44).

4 juillet 1915 — [...] Au marché, on a proclamé que d’ici à quatre jours toute la population arménienne sera envoyée en bannissement à Ourfa. Si on exécute cette mesure dans toute son ampleur, cela causera une détresse que seul quelqu’un qui a vécu en Orient peut apprécier. Si l’on entend par là [appliquer] une peine, celle-ci est infiniment cruelle et arbitraire [...]

[...] Es ist im Markt ausgerufen worden, daß binnen vier Tagen die ganze armenische Bevölkerung nach Urfa in Verbannung geschickt wird. Wenn diese Maßregel in vollem Umfange durchgeführt werden wird, liegt darin ein Elend enthalten, das nur der einigermaßen ermessen kann, der im Orient gelebt hat. Soll es eine Strafe sein, so wäre die unendlich grausam u(nd) willkürlich [...] (p. 46).

5 juillet 1915 — [...] Nous n’avons aucune idée de ce que le gouvernement compte faire avec tous les malades, infirmes, invalides, etc. Les enfants qui resteront ici seront envoyés à l’école par le gouvernement. On a proclamé que ceux qui désirent accueillir un enfant sont priés de le signaler [...]

[...] Was die Regierung mit all den Kranken, Siechen, Gebrechlichen usw. vorhat, ist uns unklar. Kinder, die hier bleiben, will die Regierung in die Schule schicken; es wurde ausgerufen, wer ein Kind aufnehmen wolle, solle sich melden! [...] (p. 51).

8 juillet 1915 — [...] Ce matin, la femme et la mère du maître tailleur protestant Avédis sont venues nous voir. Elles ont raconté que tous les Arméniens portent sur eux du poison pour s’empoisonner tout de suite au cas où ils seraient déportés. «Nous ne voulons pas renier le Christ». Cela fait bien martyre, mais se déprécie vite si on considère que toute cette histoire n’a rien à voir avec le christianisme. En effet, les Turcs n’exigent même pas que les Arméniens se fassent musulmans. Avec ça, je n’ai naturellement pas l’intention de nier que durant l’exécution inhumaine de cette procédure criminelle — purement politique d’après les lois de la guerre — contre un peuple dangereux et suspect, le fanatisme n’a pas joué un rôle important chez quelques acteurs, sous le couvert des lois martiales. Mais ceux-ci ne visent pas à la conversion forcée des Arméniens, mais à leur extermination. A mon avis, le fait que quelques puissants hommes locaux, comme Haschim beg et ses fils par exemple, cherchent à s’enrichir avec les biens des Arméniens tués — en quelque sorte un butin de guerre — a joué un rôle important dans tout cela. Il paraît d’ailleurs que depuis peu on se nourrit ici de l’espoir que l’exode n’aura pas lieu. Ce serait un grand bienfait, car si on déporte tous les malades, les femmes enceintes, les infirmes sans aucune nourriture et dans les angoisses continuelles de la mort, cela engendrerait une inexprimable détresse. On dit que près du Tochmassou campent, dans une terrible misère, des milliers de déportés venus des région de Sivas et d’Erzeroum. à présent, des femmes turques font souvent peur aux Arméniens en leur [disant]: «On a creusé ça et là des puits profonds dans lesquels on va tous vous jeter», etc. Les autorités exigent maintenant la signature de beaucoup de gens sans expliquer à quoi cela sert. Nous ne savons pas [non plus] ce que cela veut dire [...]

...] Vormittag kamen die Frau u(nd) Mutter des protestant(ischen) Schneidermeisters Avedis. Sie sagten, alle Armenier hätten Gift bei sich, um sich, falls sie wirklich geschickt würden, gleich zu vergiften. «Wir wollen Christus nicht verleugnen.» Das klingt sehr schön nach Märtyrertum, verliert aber sehr, wenn man bedenkt, daß die ganze Sache mit dem Christentum gar nichts zu tun hat. Denn die Türken verlangen gar nicht, daß die Armenier Muhammedaner würden. Damit will ich natürlich nicht ableugnen, daß bei dieser unmenschlichen Durchführung eines zunächst rein politischen Strafverfahrens gegen ein gefährliches u(nd) verdächtiges Volk auf Grund vom Kriegsgesetz bei einigen Machern auch religiöser Fanatismus eine große Rolle gespielt hat, der dann das Kriegsrecht als Maske benutzte. Aber denen kommt es nicht auf Zwangskonvertierung der Armenier, sondern auf ihre Vernichtung an. Eine große Rolle scheint mir auch zu der Gesichtspunkt zu spielen, daß einige Große hier, wie z(um) B(eispiel) Haschim Beg u(nd) Söhne, sich an der Habe der getöteten Armenier bereichern wollen — auch eine Art Kriegsbeute!! — übrigens scheint neuerdings Hoffnung vorhanden zu sein, daß die Abwanderung unterbleibt. Das wäre ein großer Segen. Denn namenloser Jammer würde entstehen, wenn all die Kranken, Schwangeren, Gebrechlichen ohne jede Verpflegung, stets mit Todesangst, jetzt weggeschickt würden. Am Tochmassu sollen Tausende von Verbannten aus der Sivas- und Erserumgegend in furchtbarer Not herumliegen. Türkische Frauen ängstigen nun auch die Armenier vielfach: «Da und dort ist ein tiefer Brunnen gebraben, da werdet ihr alle hineingeworfen» usw. - Die Regierung fordert von vielen jetzt Unterschriften, ohne zu sagen, wofür. Wir wissen nicht, was das zu bedeuten hat [...] (p. 55).

9 juillet 1915 — [...] Ce matin, nous avons de nouveau vu arriver environ cent Arméniens de Mezré. Ils ont campé un certain temps près des broussailles, entre nos terrains et ceux de Haschim beg. Ils viennent avec des charrettes, des vaches, des ânes et d’autres biens, en petits groupes, accompagnés par des gendarmes et des Kurdes armés. D’après tout ce qu’on peut observer de loin, il ne m’ont pas laissé l’impression d’une misère extraordinaire [...]

[...] Heute früh sahen wir wieder etwa einhundert Armenier aus Mesereh ankommen, die sich eine Zeitlang zwischen uns u(nd) Haschim Beg(s Grundstück; die Hrsg.) an der Hecke lagerten, mit viel Büffelwagen, Kühen, Eseln u(nd) sonstigem Hab u(nd) Gut kamen sie in kleinen Gruppen an, von Saptiehs u(nd) bewaffneten Kurden begleitet. So weit wir es von weitem beobachten konnten, machte alles keinen Eindruck von besonderer Not [...] (p. 57).

10 juillet 1915 — [...] Je donne un seul exemple pour illustrer combien, après la liquidation des Arméniens, l’artisanat est à présent en friche: aujourd’hui, nous avons voulu faire souder l’oreille d’un arrosoir, mais cela s’est révélé impossible, car il ne reste plus un seul ferblantier dans toute la ville [...]

[...] Au cours de l’après-midi, je suis venu voir le mutessarif [...] Il paraît qu’il met toute la responsabilité sur le compte du remplaçant. A ma question concernant les travailleurs arméniens restés sur place, il m’a repondu que leurs vies n’étaient pas en danger (?); il aurait en outre demandé qu’ils ne soient pas envoyés à Ourfa à cause des travaux nécessaires ici [...]

Que toutes ces histoires de bombes et de pogroms [allusion probable à «l’insurrection» de Van] soient véridiques ou qu’il s’agisse de fausses nouvelles émanant des acteurs pour légitimer toutes les mesures prises contre les Arméniens d’ici — on n’a pas trouvé de bombes malgré toutes les recherches faites —, nous ne le saurons probablement jamais. Les deux versions sont possibles [...] D’un autre côté, les Arméniens d’ici n’ont rien fait qui puisse causer de l’inquiétude au gouvernement. Une peine de bannissement eût été largement suffisante et, en cas de besoin, quelques exécutions militaires de coupables avérés, dont on n’a, à ma connaissance, même pas trouvé trace ici. On ne peut pas plus interpréter les événements qui ont eu lieu ici comme l’expression d’une indomptable colère populaire ou comme une concession faite à une volonté populaire passionnée, car de cela nous n’avons riens éprouvé du tout. Il s’agit plutôt d’un meurtre judiciaire, parfaitement manigancé depuis longtemps, que quelques fonctionnaires ont sur la conscience. On doit ou on peut supposer que s’il n’existe pas un ordre manifeste provenant d’en haut, on a au moins donné exprès des instructions ambiguës, ce qui a laissé une certaine liberté d’action aux acteurs impliqués. Et si toutes les confiscations d’armes avaient peut-être été déjà faites dans cette perspective ? [...]

[...] Wie jetzt nach Beseitigung der Armenier hier das ganze Handwerk darniederliegt, dafür nur ein Beispiel: Wir wollten heute den Henkel einer Gießkanne löten lassen. Das ist nicht möglich, da es keinen Klempner mehr gibt in der ganzen Stadt! [...] (p. 58).

[...] Heute nachmittag ging ich zum Mutessarif [...] er scheint alles besonders dem Stellvertreter in die Schuhe zu schieben. Auf meine Frage bezügl(ich) der hier noch vorhandenen armenischen Arbeiter erklärte er, für deren Leben bestehe keine Gefahr (?); auch hätte er gebeten, daß die wegen der hier nötigen Arbeiten nicht nach Urfa brauchten [...].

Ob die Bomben — und Pogromgeschichten (der Waner «Aufstand»; die Hrsg.) auf Wahrheit beruhen oder etwa Fälschungen der Macher sind, die das ganzeVorgehen gegen die hiesigen Armenier legitimieren sollen — gefunden sind trotz aller Nachforschungen keine Bomben - wird schwerlich jemals bekannt werden. Möglich ist beides [...] Andererseits war hier seitens der Armenier nichts vorgefallen, das für die Regierung Grund zu Besorgnis hätte geben können. Die Maßregel der Verbannung hätte vollauf genügt, im Notfall noch einige standrechtliche Erschießungen nachweislich Schuldiger, die hier meines Wissens gar nicht gefunden sind. Die hier stattgehabten Vorgänge können auch nicht etwa als ein unzähmbarer Ausbruch der Volkswut, als eine Konzession an leidenschaftlichen Volkswillen aufgefaßt werden, denn davon war nichts zu spüren; sondern es handelt sich zweifellos um einen meisterhaft organisierten, längst vorbereiteten Massenjustizmord, den einige wenige Beamte auf dem Gewissen haben. Und man darf oder muß doch wohl annehmen, daß von oben wenn auch kein offener Befehl, so doch absichtlich zweideutige Weisungen gekommen sind, die eben den betr(effenden) Machern genügend Spielraum ließen. Ob nicht doch die ganze Waffeneintreibung schon unter diesem Gesichtspunkt stand? [...] (p. 60).

11 [juillet 1915], à 10h 30 du soir — Ce matin, le maître Aaron est venu chez nous, mais heureusement et sagement il ne nous a rien demandé du tout. Il y aurait encore douze ouvriers arméniens, ainsi que, dans certains quartiers, quelques vieillards et jeunes garçons qui, quand on les trouve, sont aussitôt versés dans les [bataillons] d’ouvriers. Sénékérim Vorpérian, le frère de Nichan, est encore chez lui et serait à peu près guéri de sa maladie. Concernant le sort de tous les autres hommes, il ne court que des suppositions et des bruits, mais assez concrets.

Les garçons libérés par le mutessarif — mentionné page 37 — ont de nouveau, à son insu, été immédiatement arrêtés, ainsi que beaucoup d’autres, dont le neveu de maître Aaron. Celui-ci s’est adressé à ce sujet au mutessarif qui a volontiers accepté d’examiner cet affaire et chargé maître Aaron d’envoyer chez lui, le lendemain matin, Wahub effendi, le responsable turc du groupe du travail, pour avoir la liste des garçons concernés. Celui-ci aurait répondu — on ne sait malheureusement pas s’il s’agit de la réponse du mutessarif ou de son propre avis — qu’il était vraiment regrettable que maître Aaron ne soit pas venu la veille, car les garçons n’étaient déjà plus là. Comme maître Aaron l’a prié de lui dire franchement s’ils étaient encore vivants ou ce qu’ils étaient devenus, il lui a répondu que cent cinquante personnes, dont la culpabilité était établie, avaient été décapitées et cinq cents autres individus envoyés à Ourfa. Les garçons se trouveraient probablement parmi ces derniers, mais on ne pourrait entreprendre d’autres démarches qu’après avoir reçu la liste de ceux qui seraient parvenus à Ourfa.

Il faut toutefois remarquer:

1) à notre connaissance, il n’y a ici aucune cour martiale compétente qui aurait pu condamner les cent cinquante personnes mentionnées.

2) S’il s’était agi d’une procédure légale, pourquoi n’ont-ils pas été exécutés militairement et en public ?

3) Nous considérons qu’il est absolument impossible qu’il se soit trouvé ici cent cinquante criminels dignes du supplice suprême, d’autant qu’aucun véritable crime n’y a été commis et attesté.

4) Pourquoi n’a-t-on pas publié les noms et les motifs de culpabilité des suppliciés?

5) Si les cinq cents hommes mentionnés ont vraiment été envoyés à Ourfa, pourquoi le cacher? Arrêter sans motif des hommes et des garçons dans les maisons ou dans la rue et les «envoyer à Ourfa» de nuit, sans que personne ne sache ce qu’ils sont devenus, ne peut pas être une chose conforme à la loi et cela paraît extrêmement suspect.

Il nous reste une seule explication: c’est que ceux qui ont été «envoyés à Ourfa» sont malheureusement morts en chemin — nous en aurons la confirmation plus tard —, c’est-à-dire qu’un saptieh les escortant les a aidés à mourir, ou qu’eux ou plutôt leurs âmes se sont «évadés»! Toute cette affaire diabolique, impeccable en apparence, n’est en vérité qu’une [succession] d’abominables atrocités, dont les traces seront difficiles à découvrir à tout jamais.

Il faut espérer que la réponse de Wahub effendi n’a pas été inspirée par le mutessarif, car il nous serait difficile de supporter que lui aussi ment à ce point. Pourtant, il n’est guère plausible qu’il ne sache pas ce que «envoyer les hommes à Ourfa» signifie [...]

Les gens disent que bientot sept mille Arméniens de Mezré vont passer par ici.

Aaron Warbed war heute morgen hier, sprach aber glücklicherweise u(nd) verständigerweise keine Bitte aus. Es seien noch etwa 12 armenische Arbeiter hier, außerdem noch in den einzelnen Viertel einzelne alte Männer u(nd) Jünglinge, die, wo man sie greift, auch als Arbeiter geschrieben werden. Auch Senerkerim Vorperian, Nischans Bruder, sei noch zu Haus u(nd) von seiner Krankheit einigermaßen wieder hergestellt. Was mit all den anderen Männern geworden ist, darüber kursieren immer noch nur Mutmassungen u(nd) Gerüchte im Volk, wenn auch ziemlich bestimmte.
Die Seite 37 erwähnten, vom Mutessarif freigelassenen Knaben waren ja, wie ich schon schrieb, hinter seinem Rücken schnell wieder gefangen gesetzt, dazu andere; u(nter) a(nderem) auch Neffen Aaron Warbeds. Dieser ging in der Sache den Mutessarif an, welcher dann bereitwilligst die Sache untersuchen wollte u(nd) Aaron Warbed beauftragte, am folgenden Morgen Wahub Effendi, den türkischen Vorgesetzten der Arbeitergruppe, zu ihm zu schicken mit der Liste der betr(effenden) Knaben. Letzterer brachte dann Aaron Warbed folgenden Bescheid, man weiß leider nicht, wie weit als Antwort des Mutessarif(s) u(nd) wie weit von sich aus. Es sei sehr zu bedauern, daß Aaron Warbed nicht einen Tag eher gekommen sei, denn nun seien die Knaben nicht mehr da. Als Aaron Warbed dann bat, ihm offen zu sagen, ob sie denn noch lebten oder was mit ihnen sei, sagte er, es seien 150 Personen, die ihrer Schuld überführt seien, enthauptet, die übrigen 500 nach Urfa abgeschickt worden. Die Knaben seien gewiß unter den letzteren, u(nd) wenn erst die Liste der in Urfa Angekommenen hier eintreffe, könne man sich ja weiter bemühen. Dazu ist Folgendes zu bemerken:
1) befindet sich hier unseres Wissens kein zuständiges Kriegsgericht, welches in der Lage gewesen wäre, die erwähnten 150 Personen abzuurteilen
2) warum sind sie, wenn es sich um ein gesetzmäßiges Verfahren handelt, nicht öffentlich standrechtlich erschossen worden?
3) halten wir es für gänzlich ausgeschlossen, daß hier 150 todeswürdige Verbrecher gewesen sein sollen, wie ja auch kein direktes Vergehen nachgewiesen und bekannt geworden ist.
4) warum sind Namen u(nd) Schuld der Hingerichteten nicht bekannt gegeben?
5) wenn die erwähnten 500 Mann wirklich nach Urfa geschickt sind, warum dann diese Heimlichkeit? Ganz unmotiviert Männer u(nd) Knaben aus den Häusern u(nd) Straßen abzufangen u(nd) nachts «nach Urfa zu schicken», ohne daß irgend jemand erfährt, was aus ihnen geworden ist, das kann doch unmöglich gesetzmäßig sein u(nd) wirkt in höchstem Maße verdächtig.
Wir können es uns nicht anders erklären, als daß die «nach Urfa Abgeschickten», wie sich später herausstellen wird, leider unterwegs verstorben sind, d(as) h(eißt) mit Hilfe der begleitenden Saptiehs, oder daß sie «entflohen» sind, d(as) h(eißt) ihre Seele! Alles ein satanisches Spiel, äußerlich tadellos, in Wirklichkeit ein furchtbarer Greuel, dem man aber schwerlich wird auf die Spur kommen können.
Hoffentlich war die Antwort Wahub Eff(endi)s nicht vom Mutessarif inspiriert, denn es wäre uns schwer, wenn auch der so löge; u(nd) andererseits ist es doch kaum anzunehmen, daß er nicht wissen sollte, was dieses «nach Urfa schicken» der Männer bedeutet [...]
Im Volke spricht man, es kämen dieser Tage 7000 Armenier aus Mesereh hier durch (p. 62).

12 juillet [1915] dans la matinée — Voici peu, nous avons vu arriver en bloc un convoi que j’estime à environ deux mille [personnes]. Il y avait en tête quelques jailes (voitures), suivies par beaucoup d’ânes et d’autres bêtes de somme, par des gens en majorité à cheval ou marchant à côté, hommes, femmes et enfants numériquement en proportion normale. Ils ont avec eux de la literie et d’autre effets, de même que des chars à bœufs ou à buffles chargés de biens, des saptieh et des soldats les accompagnant en nombre suffisant, mais tout de même pas au point de menacer ces gens. Bref, tout ce que nous avons vu était parfaitement en ordre: pas trop de bruit, pas de cris et de lamentations. Ah, si les choses pouvait également se passer de la même manière chez nous. Mais ceux qui vont partir d’ici ne sont que des femmes et des enfants [...]

D’après les nouvelles apportées ce soir de la ville par Habèch et Mahmoud, il s’agit de huit cents familles, c’est-à-dire de trois à quatre mille personnes, provenant non seulement de Mezré, mais aussi des villages alentour. Durant la nuit, on a logé les hommes dans la caserne et les femmes dans l’école turque contiguë. Demain matin de très bonne heure, ils vont partir. Pour arriver ici, ils ont mis dix jours (pour 100 km) — la traversée de l’Euphrate pose les plus grands problèmes. Cent cinquante saptieh les escortent. Quand on a décompté les gens ici, trois filles manquaient à l’appel. L’officier responsable aurait sévèrement ordonné de les trouver avant le lendemain. Le bruit court qu’elles seraient tombées à l’eau dans la cohue de la traversée. Cela est très possible, mais il est tout de même étrange que personne n’ait rien remarqué [...]

Tout à l’heure, nous avons observé, sur la route de Sivas, nombre de chars à buffles et environ mille à deux mille personnes venant de la direction de Sivas, sûrement encore des Arméniens de cette contrée [...]

Vorhin sahen wir sie kommen, ein ganzes Heer auf einmal, nach meiner Schätzung etwa zweitausend. Vorne einige Jailen (Reisewagen), dann sehr viele Esel u(nd) sonstige Lasttiere, die Leute meist reitend, z(um) T(eil) nebenhergehend, Männer, Frauen u(nd) Kinder an Zahl im normalen Verhältnis zueinander, Bettzeug u(nd) sonstige Habe bei sich, auch Büffel- und Ochsenwagen voll Sachen, begleitende Saptiehs u(nd) Soldaten in genügender Menge, u(nd) doch nicht so viel(e), daß sie etwa eine Gefahr für das Volk bildeten könnten, kurz: alles so weit wir es sehen konnten in bester Ordnung. Kein großer Lärm, kein Schreien oder Klagen. O wenn doch hier auch alles so geworden wäre! Aber wenn sie von hier weggehen, werden es nur Frauen u(nd) Kinder sein [...] (p. 63).
[...] Nach den Nachrichten, die Habesch u(nd) Mahmud heute Abend aus der Stadt mitbrachten, handelt es sich um achthundert Häuser, also mindestens drei- bis viertausend Personen, u(nd) zwar nicht nur Mesereh selbst, sondern aus umliegenden Dörfern. Für die Nacht sind die Männer in der Kaserne, die Frauen in der benachbarten türkischen Schule untergebracht worden; morgen in aller Frühe sollen sie weiterziehen. Bis hierher sollen sie zehn Tage gebraucht haben (für einhundert Kilometer!); die meiste Schwierigkeit bereitet ja das übersetzen über den Euphrat. 150 Saptiehs sollen mitgekommen sein. Als die Leute hier gezählt wurden, sollten drei Mädchen gefehlt haben. Der betr(effende) Offizier soll dann sehr streng befohlen haben: Bis Morgen werdet ihr die finden. Das Gerücht ist da, als seien die in dem Gedränge des übersetzens ins Wasser gefallen. Das wäre an sich gut möglich; nur würde es befremden, daß dies niemand bemerkt haben sollte [...]
Vorhin beobachteten wir auf der Sivasstraße, von der Sivasser Seite her kommend, viele Büffelwagen u(nd) etwa ein- bis zweitausend Menschen, sicher auch Armenier von der Seite [...] (p. 63).

16 juillet 1915 — [...] Ce matin un potier arménien, qu’on a mis volontairement à notre disposition pour une petite besogne, est venu chez nous. Il prétend que ceux qui sont venus de Mezré ont été pillés en route et qu’ici on leur a enlevé tous leurs biens [restants]. Les hommes auraient été envoyés en avant pour être assassinés en route. Ce serait le sort de chacun [...]

Veronika, [la femme du Dr. Mikaël], qui parle du reste avec sobriété et objectivité et ne rapporte pas d’histoires horribles et des nouvelles à sensation, nous a appris que les femmes arméniennes qui vont au marché, comme elle ici, ne sont plus du tout importunées; de même, on ne pille plus les maisons de nuit. Pour l’instant, on envisage de renoncer à expédier la population féminine locale. Le mutessarif se serait montré aimable, attendri et ému, quand il a reçu la pétition qu’elle et d’autres femmes lui ont présentée. Moustapha agha fait également de son mieux. Nombre de femmes arméniennes ont pu trouver asile dans des maison turques, par exemple chez Arab Osman. Les femmes de Sivas qui ont été logées dans une école du marché ont repris leur marche tout à l’heure. D’après Habèch, celles de Mezré, dont les maris ont été immédiatement envoyés en avant au cours de la nuit précédente — d’après l’opinion générale, pour apparemment être à leur tour assassinés en chemin —, ont aussi été expédiées. Des enfants de Sivas, restés ici pour être envoyés dans une école turque, ont été libérés pour pouvoir aller mendier du pain dans la rue. Le mutessarif a d’ailleurs été visiter l’école pour leur faire distribuer du pain. Neuf charrettes chargées d’enfants de la région de Sivas sont arrivées aujourd’hui. Les enfants ont confirmé qu’ils avaient été séparés de leurs parents en chemin pour aller à l’école ici; ils ne savent pas ce qu’il est advenu à leurs parents. Parmi les gens venus de Mezré, sept (ou douze) personnes auraient été rappelées par le vali, probablement pour être pendues.

Nous avons encore entendu d’autres rumeurs plus ou moins vérifiables. Cela renforce de jour en jour nos soupçons, à savoir qu’il s’agit bien d’une cynique politique de liquidation générale visant les Arméniens. Les apparences sont impeccables: condamnation légale des fomentateurs de séditions, bannissement de la population restante à Ourfa. Mais, en route ou déja sur place, on assassine en secret autant d’hommes que possible; en général on laisse vivre les femmes, ce qui signifie qu’on les laisse périr; il en est de même pour les enfants, ou on les fait turcs. Après quoi, on dira qu’on a rassemblé à Ourfa autant d’Arméniens qu’il était possible. Mais qui voudra contrôler combien d’entre eux y sont effectivement arrivés? La Turquie essaie de voir jusqu’à quel point elle peut prendre ses libertés avec l’Allemagne et jusqu’à quel point l’Allemagne se laissera tromper. Nous craignons qu’elle ne spécule, avec un succès croissant, sur une politique extérieure allemande faible et bien à tort indulgente pour des considérations d’amitié [...]

L’actuel plan général de persécution des Arméniens est plus diabolique que celui de 1895/96. Nous espérons toujours que nous voyons tout en noir. Mais, jusqu’à présent nous avons toujours vu trop blanc et avons toujours été dupés de la plus horrible des manières. Les motifs [invoqués par les Turcs] peuvent être plausibles — les Arméniens ont commis bien des fautes. Mais la plupart des faits [reprochés] sont à coup sûr arbitrairement exagérés et généralisés par le gouvernement. Il n’y a aucun doute sur le fait que des cruautés inhumaines et des choses illégales ont eu lieu et continuent d’avoir lieu. Si, face à ces faits, le gouvernement allemand ne représente pas avec une rigueur et une sévérité extrême la cause du droit, il en sera fini de l’estime portée à l’Allemagne et également du christianisme, et les dommages causés seront inestimables.

Au han, des femmes ont raconté que dans les villages des alentours de Sivas elles auraient montré les endroits où les hommes avaient enfoui des fusils; qu’à la suite de quoi ces hommes avaient été fusillés en présence de leurs femmes et celles-ci envoyées en bannissement. à cela, il n’y a rien à opposer [...]

[...] Heute früh war ein armenischer Töpfer hier, der uns für eine kleine Arbeit bereitwilligst zur Verfügung gestellt worden war. Er behauptet, die aus Mesereh Gekommenen seien unterwegs beraubt, hier seien ihnen alle Sachen abgenommen. Die Männer seien alle vorausgeschickt, um unterwegs getötet zu werden. So werde es allen gehen [...] (p. 66).
Veronika (die Frau von Dr. Micael; die Hrsg.), die übrigens nüchtern und sachlich sprach u(nd) keine Schauergeschichten u(nd) Sensationsnachrichten brachte, sagte noch Folgendes aus: Armenische Frauen, welche hier, wie sie eben, durch den Markt gehen, werden in keiner Weise behelligt. Auch nachts wird in den Häusern nicht mehr geraubt. Von Wegsendung der hiesigen weiblichen Bevölkerung soll vorläufig abgesehen werden. Der Mutessarif hätte ein Bittgesuch, welches sie mit anderen Frauen ihm in der Regierung überreicht hätte, sehr freundlich u(nd) gerührt u(nd) tief bewegt entgegengenommen. Auch Mustapha Agha täte sein Möglichstes. Viele armenische Frauen haben in Türkenhäusern, z(um) B(eispiel) bei Arab Osman, Unterkunft gefunden. Die Frauen aus Sivas, welche im Markt in einer Schule untergebracht waren, seien eben weitergeschickt; nach Habeschs Aussage auch die aus Mesereh, deren Männer neulich gleich in der folgenden Nacht weitergeschickt sein sol-len, nach allgemeiner Annahme offenbar, um auch unterwegs getötet zu werden. Kinder aus Sivas, die hier belassen wurden, um in eine türkische Schule geschickt zu werden, wurden freigelassen, um in den Straßen Brot zu betteln. Der Mutessarif sei übrigens in der Schule gewesen, um ihnen Brot verteilen zu lassen. Neun Wagen voller Kinder seien aus der Sivasser Gegend heute angekommen, die aussagten, sie seien unterwegs von ihren Eltern getrennt worden, um hier in die Schule geschickt zu werden; was aus ihren Eltern geworden sei, wissen sie nicht. Von den aus Mesereh Entsandten seien sieben (oder zwölf) vom Wali zurückgerufen worden, wahrscheinlich, um dort gehängt zu werden.
Andere mehr oder weniger kontrollierbare Gerüchte hörten wir noch mehr. Es verstärkt sich uns von Tag zu Tag der Verdacht, daß es sich um eine ganz allgemeine, hinterlistige Vernichtungspolitik gegen die Armenier handelt. Der äußere Schein tadellos: gesetzmäßige Aburteilung der Aufruhrstifter, Verbannung der übrigen Bevölkerung nach Urfa. Möglichst viele von den Männern tötet man heimlich unterwegs oder noch an Ort und Selle, die Frauen läßt man i(m) a(llgemeinen) leben, d(as) heißt) verkommen, die Kinder desgl(eichen), oder man macht sie zu Türken. Nachher heißt es dann: Soviele Armenier wir sammeln konnten, sind in Urfa. Wie viel(e) es sein müßten, wer will das kontrollieren? Die Türkei wird versuchen, wie viel sie sich Deutschland gegenüber erlauben darf, wie sehr sich Deutschland täuschen läßt, u(nd) wir fürchten, daß sie da mit wachsendem Erfolg auf eine aus Freundschaft schwache, in falscher Weise nachsichtige deutsche äußere Politik spekulieren wird [...]

Die ganze Anlage der Armenierverfolgung ist jetzt noch satanischer als 1895/96. Wir hoffen ja immer noch, daß wir zu schwarz sehen. Doch haben wir bisher immer zu weiß gesehen u(nd) sind jedesmal in der grauenhaftesten Weise getäuscht worden. Die Gründe mögen triftig gewesen sein, das Schuldkonto der Armenier groß - obwohl sicher das meiste von der Regierung willkürlich aufgebauscht und verallgemeinert wird -, daß unmenschliche Grausamkeiten u(nd) Gesetzwidrigkeiten vorgekommen sind u(nd) vorkommen, kann nicht dem geringsten Zweifel unterliegen. Vertritt dem gegenüber nicht die deutsche Regierung mit äußerster Kraft u(nd) Strenge den Standpunkt des Rechtes, so ist es um das Ansehen sowohl Deutschlands, als auch des Christentums geschehen u(nd) die Schäden sind gar nicht abzusehen.
Frauen im Chan sollen auch erzählt haben, in Sivasser Dörfern hätten Frauen die Stellen gezeigt, wo die Männer die Gewehre vergraben hätten, darauf seien diese angesichts ihrer Frauen erschossen worden u(nd) die Frauen in die Verbannung geschickt. Dagegen läßt sich ja nichts sagen [...] (p. 66).

17 [juillet 1915], à midi — [...] Pour nous protéger au moins superficiellement contre la puanteur insupportable, nous trempons nos mouchoirs d’eau de Cologne et nous accrochons des serviettes trempées de phénol aux fenêtres de la chambre à coucher le soir. Nous ne savons pas si cette puanteur se dégage d’Indära ou des tranchées du versant. Nous supposons qu’à Indära il s’agit de centaines de cadavres [en décomposition] et au versant de douzaines, peut-être même de centaines.

[...] Um uns äußerlich gegen den unerträglichen Geruch möglichst zu schützen, haben wir die Taschentücher voll Eau de Cologne u. werden Abends immer karbolgetränkte Handtücher vor die Schlafstubenfenster hängen. Ob der Geruch aus Indärä kommt oder von den Schützengräben am Bergabhang, wissen wir nicht. In Indärä muss es sich um Hunderte, am Bergabhang um Dutzende von Leichen handeln, vielleicht aber auch um Hunderte [...] (p. 68).

Dimanche, 18 [juillet 1915], à midi — Hier soir, à 6h, nous avons observé d’Eiwa l’arrivée en provenance de la route de Sivas de deux mille personnes — d’après mes estimations —, avec des bêtes de somme et des chars à buffles, en colonne, accompagnées par des saptieh et des bachi bosuk, c’est-à-dire des soldats irréguliers. Elles ont pris le chemin rural pour arriver au champ adjacent à la route de Mezré, devant le cimetière turc qui jouxte notre terrain du nord. Khorèn prétend qu’il peut les identifier comme étant des paysans arméniens de la région de Sivas. Il s’agit d’hommes, de femmes et d’enfants. Nous avons pensé qu’ils allaient être rassemblés ici, et y passer la nuit, comme récemment les gens de Mezré dans la caserne et l’école, puis repartir pour Ourfa. Mais à notre très grande surprise, cette foule est repartie peu de temps après en sens inverse, c’est-à-dire en direction de Mezré,en laissant derrière eux beaucoup de literie sous la surveillance de gardes [...]

Le détour du convoi vers Mezré paraît extrêmement suspect, car on n’a pas de raisons pour envoyer la population de Mezré à Ourfa via Malatia et les gens de Sivas via Malatia-Mezré [...]

Quand Habèch est parti tout à l’heure pour aller au marché, je l’ai chargé de s’enquérir du lieu où les gens sont allés la veille et pourquoi ils avaient abandonné leur literie. Il m’a répondu en hésitant: « à quoi bon demander au gens des choses que tout le monde sait. Pas loin du Jechl Han — une colline située à 200 ou 300 m d’altitude, au nord de la route de Mezré, à une demi-heure d’ici —, une grande fosse a été creusée, ils vont tous “se perdre” la-bàs. Ces gens ont abandonné ici leur literie et leurs biens restants, parce qu’ils n’en avaient plus besoin. Quatre mille familles de Sivas ont été envoyées ici: cinq cents d’entre eux sont parvenus ici. En chemin, ils ont été séparés en groupes, qui ont été exterminés un à un de temps en temps, y compris des femmes et des enfants». Nous sommes restés assis, sans dire un mot et en soupirant de temps en temps, complètement accablés, car nous devons croire tout cela, après tout ce que nous avions déjà observé nous-mêmes [...]

Si la veille, vers 10 ou 11h, les bachi bosuk avaient suivi en grand nombre le convois, c’est probablement parce que l’escorte de gendarmes n’était pas parvenue à massacrer toute seule une telle foule de gens. Et nous, les «alliés et frères» des Turcs, sommes forcés de tout laisser faire sous nos yeux [...]

Entre temps, Veronika est revenue. On dit que demain la population de Malatia va être envoyée — il semble qu’elle se doute seulement de ce que signifie le mot «envoyer». Même ceux qui se cachent dans des maisons turques seraient concernés. Elle pourrait partir, mais que va devenir sa vieille mère presque aveugle? [...] Tous les avoirs des Arméniens seraient classés proprieté du gouvernement. On aurait en effet confisqué ici même toutes leurs sommes d’argent et tous leurs bijoux aux Arméniens de Mezré. Les enfants de Sivas se trouvant encore dans l’école reçoivent, selon leur âge, un ou deux petits pains par jour — complètement insuffisant. Elle [Veronika] sait aussi qu’en chemin les convois sont divisés en groupes de plus en plus petits et sont envoyés dans différentes directions.

L’aspect mentionné ci-dessus me paraît être de première importance pour comprendre tout le processus: sous le prétexte d’une nécessité stratégique, le gouvernement n’a pas seulement la possibilité idéale d’enfin résoudre radicalement «la question arménienne», mais il se débarrasse ainsi de tous les difficultés financières de la guerre. Les missionnaires allemands vont s’occuper des misérables qui resteront, chose qu’on va généreusement leur permettre de faire après quelques tracasseries. Pour raviver la vie économique, détruite par la liquidation des Arméniens, c’est encore aux Allemands qu’on aura recours. Si les Turcs n’ont plus besoin de nous, on nous donnera un coup de pied et nous n’aurons plus qu’à partir. Les motifs religieux ne jouent leur rôle que parmi les autorités religieuses, qui jettent de l’huile sur le feu, mais on n’en remarque aucune manifestation au sein de la population. Il s’agit en tout point d’une mesure d’ordre politique. Les Grecs et les Syriens par exemple sont épargnés et les Allemands ne sont seulement en danger qu’en tant que témoins gênants. Le sentiment que les Allemands sont devenus musulmans ou sont en train de le devenir est très répandu au sein de la population. Si le gouvernement allemand ne se montre pas extrêmement prudent et, surtout, ferme et sévère à l’égard de la Turquie, des [conséquences] catastrophiques sont également prévisibles pour l’Allemagne.

Gestern Abend 6 Uhr beobachteten wir von der Eiwa aus, wie — nach meiner Schätzung etwa zweitausend — Leute mit Lasttieren u(nd) Büffelwagen in geordneten Zügen, begleitet von Saptiehs u(nd) «Baschy Bosuk», d(as) h(eißt) irregulären Soldaten, von der Sivasstraße den Feldweg herüberkamen auf den Acker an der Meserehstraße vor dem türkischen Friedhof, welche nördlich an unser Grundstück angrenzt. Choren behauptete, sie sicher als armenische Dorfleute aus der Sivasser Gegend erkennen zu können. Es waren gemischt Männer, Frauen u(nd) Kinder. Wir meinten, sie würden sich hier sammeln, wie die Leute aus Mesereh neulich in der Kaserne u(nd) in der Schule übernachten u(nd) dann nach Urfa weiterziehen. Zu unserem größten Erstaunen setzten sich dagegen die Volksmassen nach kurzer Zeit in der entgegengesetzten Richtung in Bewegung, d(as) h(eißt) nach Mesereh zu; eine Menge Betten ließen sie zurück, bei denen eine Wache zurückblieb [...]
Das Ablenken des Zuges nach Mesereh erschien im höchsten Maße verdächtig. Denn schwerlich wird man die Mesereher Bevölkerung über Malatia nach Urfa schicken u(nd) die Sivasser über Malatia-Mesereh [...]
Als vorhin um neun Habesch zum Markt gehen sollte, sagte ich ihm, er solle zu erfahren suchen, wohin die Leute gestern Abend gegangen u(nd) warum die Betten zurückgeblieben wären. Darauf gab er zögernd nach u(nd) nach folgenden Bescheid:»Wozu sollte ich fragen, was doch jeder weiß. Nicht weit hinter dem Jechl Chan (ein ca. 2-300 Meter hoher Hügel nördlich der Meserehstraße, 1/2 Stunde von hier) ist ein großes Grab gegraben; dort werden sie alle ‘verloren’.» Die Betten u(nd) sons-tiges Hab u(nd) Gut haben die Leute vielfach hier fortgeworfen, weil es ihnen ja doch nichts mehr nützte. Aus Sivas seien viertausend Familien abgeschickt, hier angekommen seien davon fünfhundert. Unterwegs würden sie immer in Gruppen geteilt u(nd) ab u(nd) zu eine von ihnen umgebracht, u(nd) zwar auch Frauen u(nd) Kinder.
Wir blieben still, ab u(nd) zu seufzend, völlig niedergeschlagen sitzen, denn wir müssen das alles voll glauben nach dem, was wir selbst beobachtet haben [...] (p. 69).
[...] Sicher sind gestern Abend zwischen 10 u(nd) 11 die vielen Baschy Bosuk dem Zug nachgesetzt, weil die Begleitmannschaften allein das Abschlachten so großer Mengen nicht schaffen konnten. Und wir, die «Bundesgenossen u(nd) Brüder» der Türken, müssen das vor unseren Augen geschehen lassen! [...] (p. 70).

Inzwischen kam Veronika wieder. Es hieße, morgen würde auch die Bevölkerung von Malatia geschickt (sie schien nur zu ahnen, was dieses «Schicken» bedeutet). Auch die in türkischen Häusern Verborgenen würden herausgeholt. Sie würde schon gehen, aber was dann aus ihrer alten, fast blinden Muter werden sollte? [...] Alles Hab u(nd) Gut der Armenier sei als Eigentum der Regierung erklärt worden; tatsächlich sollen den Armeniern aus Mesereh hier alle ihre Reichtümer an Geld u(nd) Schmucksachen abgenommen worden sein. Die Kinder aus Sivas sind noch in der Schule u(nd) bekommen je nach Alter ein oder zwei kleine Brote pro Tag, völlig unzureichend. - Auch sie wußte, daß unterwegs u(nd) hier die Züge immer in kleinere Gruppen verteilt u(nd) nach verschiedenen Richtungen geschickt werden.
Der oben erwähnte Gesichtspunkt erscheint mir für das Verständnis des ganzen Verfahrens äußerst wichtig: Die Regierung hat nicht nur unter dem Vorwand einer strategischen Notwendigkeit eine vorzügliche Gelegenheit, die «armenische Frage» endlich einmal radikal zu lösen, sondern befreit sich so von allen Finanzschwierigkeiten, die der Krieg mit sich bringt. Für die Elenden, die übrig bleiben, können ja die deutsche Missionare später sorgen, wozu man ihnen nach einigen Schikanierungen großzügigst Erlaubnis geben wird, u(nd) den durch Beseitigung der Armenier vernichteten Handel u(nd) Wandel wieder in Gang zu bringen, dazu sind dann auch die Deutschen gut genug. Wenn die Türkei uns dann nicht mehr nötig hat, bekommen wir einen Fußtritt u(nd dürfen gehen.Religiöse Motive werden in der anti-armenischen Vernichtungspolitik zwar bei den das Feuer schürenden religiösen Behörden mitspielen; im Volk ist davon aber nichts zu spüren. Das Ganze ist ist eine politische Maßregel. Griechen u(nd) Syrer z(um) B(eispiel) werden geschont, u(nd) Deutsche sind jetzt höchstens als lästige Zeugen in Gefahr. Im Volk ist vielfach wohl die Stimmung verbreitet, die Deutschen seien Mohammedaner geworden oder ständen im Begriff, es zu werden.
Ist die deutsche Regierung nicht äußerst vorsichtig u(nd) vor allem stark u(nd) streng der Türkei gegenüber, so stehen hier auch für Deutschland Katastrophen bevor [...] (p. 70).

20 juillet 1915 — Un grand nombre de femmes arméniennes honorables cherchent à éviter l’exil en se convertissant à l’Islam. Mais nous doutons beaucoup que le gouvernement l’accepte, car il n’a pas l’intention de faire du prosélytisme, mais de mettre hors d’état de nuire une population politiquement dérangeante. Hier après-midi, Veronika est revenue. On a annoncé que les Arméniens devaient rapidement terminer tous leurs préparatifs. Elle nous a encore suppliés de lui donner un conseil concernant sa vielle mère. Nous l’avons renvoyée à la femme du mutessarif, qui l’a aimablement accueillie, lui a longuement parlé et promis de faire de son mieux.

Aujourd’hui encore, beaucoup d’Arméniens sont arrivés. Au marché, on a du mal à trouver quelque chose, parce qu’ils achètent tout. à présent, les prix y sont en effet incroyablement élevés. Les concombres et autres produits similaires pourrissent vraisemblablement dans les villages, et il n’y a plus personne pour les apporter au marché.

[...] Viele achtbare armenische Frauen sollen versuchen, durch übertritt zum Islam sich vor der Verbannung zu schützen. Doch bezweifeln wir sehr, ob die Regierung das annimmt. Denn es kommt ihr nicht darauf an, Proselyten zu machen, sondern politisch hinderliche Bevölkerung unschädlich zu machen. Gestern Nachmittag kam Veronika wieder. Es sei ausgerufen, die Armenier sollen all ihre etwa noch nötigen Geschäfte schnell erledigen. Sie bat nun wieder flehend um einen Rat betr(effs) ihrer alten Mutter. Wir schickten sie zur Mutessarifin, die sie freundlich empfing, lange mit ihr sprach u(nd) ihr Möglichstes versprach.
Heute sind wieder viele Armenier angekommen. Im Markt ist deswegen sehr schwer etwas zu bekommen, weil die alles aufkaufen. übrigens sind die Marktpreise jetzt unerhört teuer. Sachen wie Gurken z(um) B(eispiel) verkommen wahrscheinlich massenhaft in den Dörfern, u(nd) es ist niemand da, der sie zum Markt bringt (p. 76).

21 juillet 1915 — [...] Cet après-midi, mille ou deux mille Arméniens de la région de Sivas sont arrivés avec des chars à buffles et campent le long de la route. à 3h, nous sommes allés nous baigner. Nous étions en train de le faire, quand Makrouhi est arrivée en courant, tout excitée, et a crié de la rive que des Américains de Sivas arrivaient en tant que prisonniers de guerre. Nous nous sommes rapidement rhabillés, mais n’avons trouvé qu’une demoiselle américaine de Sivas, Miss Graffen, accompagnée d’une vieille femme de pasteur, dans notre salle de séjour. Elle n’était pas prisonnière mais accompagnait à titre bénévole les Arméniens de Sivas jusqu’à Ourfa, pour voir si tout se passait bien et en témoigner, ainsi que pour les assister en chemin en cas de maladie ou d’autres difficultés. C’est une entreprise dangereuse, pleine d’embarras et des privations les plus dures, mais digne de reconnaissance et précieuse au dernier degré. Il faut vraiment avoir du courage, être disposé au sacrifice et être sage pour faire cela. C’est un véritable plaisir, que nous sommes seuls à pouvoir comprendre, de parler de tous ces événements avec une personne pareille et de recevoir des nouvelles précises des autres régions et du procédé de bannissement en général. Je vais essayer de restituer de manière ordonnée l’essentiel de tout ce que Miss Graffen nous a appris.

[...] Nachmittag(s) kamen wieder ein- bis zweitausend Armenier von der Sivasseite mit Büffelwagen u(nd) lagerten an der Straße. Um 3 badeten wir, u(nd) während wir dabei waren, kam Makruhi ganz aufgeregt angelaufen u(nd) rief draußen: Die Amerikaner aus Sivas kommen als Kriegsgefangene! Wir machten uns schleunigst fertig u(nd) fanden tatsächlich wenigstens ein amerikanisches Fräulein aus Sivas, Miss Graffen, mit einer alten Predigerfrau im Wohnzimmer, zwar kam sie nicht als Gefangene, sondern ganz freiwillig begleitete sie die Armenier aus Sivas nach Urfa, um zu sehen, ob alles gut abgeht u(nd) darüber zu berichten u(nd) um ihnen unterwegs in Krankheiten u(nd) allen Nöten beizustehen. Ein gefährliches Unternehmen u(nd) voller Schwierigkeiten u(nd) schwerster Entbehrungen, aber höchst dankenswert u(nd) wertvoll. Dazu gehört großer Mut u(nd) Opfersinn u(nd) Weisheit. Uns war es eine Wohltat, die außer uns wohl niemand ermessen kann, mit einem Menschen ihresgleichen über alles sprechen zu können u(nd) über andere Regionen u(nd) die ganze Praxis der Verbannung genauere Nachricht zu bekommen. Ich will versuchen, das, was wir von Miss Graffen erfuhren, wenigstens in den Hauptsachen u(nd) möglichst geordnet wiederzugeben (p. 76).

22 juillet 1915 — D’abord au sujet de l’attitude du gouvernement et de sa politique arménienne. Par suite de la désertion de plusieurs Arméniens au profit des Russes — il s’agissait pour la plupart d’entre eux de gens originaires de l’intérieur ou qui avaient échappé au service militaire en payant le bedell (une rançon) —, par suite des insurrection dans la région de Van et d’incidents du même genre, et finalement à cause du fait qu’on avait découvert dans différentes régions du pays les préparatifs d’une insurrection armée destinée à soutenir les Russes dans leur offensive contre l’ état ottoman, on a pris un certain nombre de mesures. D’après ce que presque tous les fonctionnaires et connaisseurs interrogés confirment, les membres des partis révolutionnaires devaient être exilés ou condamnés à mort — toutefois les exécutions n’ont presque jamais eu lieu en public, mais plutôt comme si on emmenait des gens par groupes au travail, le chef du groupe ayant l’ordre de «perdre» un certain nombre des personnes mentionnées sur une liste. On a récemment donné l’ordre d’exiler toute la population arménienne à Ourfa, partiellement aussi à Mossoul, ou, d’après d’autres rapports, en Mésopotamie. On a maintes fois donné l’ordre de ne pas porter atteinte aux biens et à la vie des Arméniens. On a effectivement, à plusieurs reprises, exécuté des Kurdes qui avaient violé cet ordre. Dans la mesure du possible, on prend soin du bon déroulement des immenses transferts de populations et de leur approvisionnement en cours de route. Mais dans les conditions actuelles, on ne peut souvent rien faire. L’attitude du gouvernement paraît généralement correcte. Compte tenu de sa position effectivement très compliquée à l’égard des Arméniens et face au danger russe, il va de soi que tout a été fait dans la précipitation et n’a pas pu être préparé et organisé comme cela l’eût été en temps normal. Nous avons cependant un doute, à savoir que le gouvernement n’aurait pas, au moins au début, volontairement laissé carte blanche à certains, et que les autorités locales n’auraient pas osé agir contre eux, comme elles l’avaient fait jusqu’alors, s’agissant toujours de quelques fonctionnaires ou de particuliers influents. On dit toujours, ici, que tout se fait sur ordre du gouvernement allemand. Néanmoins, il est utile et réconfortant pour nous d’apprendre que nombre d’officiers allemands, sur le front du Caucase, sont indignés par certaines mesures [prises] contre les Arméniens, alors que d’autres, comme Postelt Pascha15, voudraient qu’on les liquide tous. Mlle von Wedel, une Norvégienne, et Eva Elbers16, qui ont d’abord été infirmières à Marach, puis missionnaires chez les Kurdes, pour finalement travailler au sein du «Croissant rouge» à Erzeroum, puis à Erzindjan, ont entendu et vu pas mal de choses, par exemple comment les Turcs se partageaient entre eux des femmes et des jeunes filles arméniennes, chose contre laquelle elles se sont élevées. à la suite de quoi, on leur a indiqué qu’elles devaient partir dans les deux jours, sinon on les mettrait en prison. Il est heureux qu’on les ait laissées partir pour Constantinople — du reste sous une stricte surveillance —, où elles pourront, espère Miss Graffen, faire un rapport bien utile.

La population arménienne de Sivas a elle-même livré toutes ses armes, mais aucune bombe ou choses similaires n’auraient été découvertes, pas plus qu’une quelconque conspiration. Par contre, le massacres de Turcs à Van, les luttes entre Arméniens et Turcs à [Chabin]-Karahissar et d’autres faits de ce genre sont généralement connus, et il n’est pas étonnant qu’on ne fasse également plus confiance aux autres Arméniens, même dans des régions où ils sont habituellement paisibles. Il paraît certain qu’en prévision de la fin de la domination turque, des préparatifs secrets, ou pour le moins de telles idées, existaient au sein de la population arménienne. Mais il serait très abusif de prendre ce peuple dans son entier pour une nation d’insurgés. Même les Turcs savent et admettent qu’à présent une grande partie de la population souffre injustement et n’a pas pour le moment donné matière à intervenir contre les Arméniens. C’est regrettable, mais cela se comprend. Le bannissement est exécuté de la manière suivante: après son annonce, les maisons sont évacuées et les gens, par centaines et par milliers, accompagnés par des saptieh, sont mis en route; ils vont aussi loin que possible avec des chars à bœufs ou à buffles; là où il n’y a pas de routes carrossables, comme par exemple entre ici et Ourfa, des bêtes de somme, surtout des ânes, sont autant que possible utilisés. Il s’agit apparemment d’un bannissement général, mais il y a quand même quelques valis qui cherchent à laisser les vieux, les infirmes et les femmes enceintes sur place. Les orphelines de l’orphelinat suisse de Sivas peuvent y rester «pour l’instant». Mais il semble qu’en général la protection accordée par les étrangers ne soit pas admise par les Turcs, mis à part des cas particuliers. Il est suspect que fréquemment, en cours de route, des groupes soient séparés [des convois] pour prendre un autre chemin. Il court généralement le bruit que ces groupes isolés sont exterminés, mais on n’en a pas de preuves. Dans l’entourage de Miss Graffen, on a de la même manière, près de Hassan Tchélébi, isolé plus de cent hommes, parmi lesquels les professeurs des établissements américains. On ignore ce qu’ils sont devenus.

D’après Miss Graffen, de véritables massacres — c’est-à-dire des massacres publics —, n’ont pas eu lieu, excepté dans les endroits où les Arméniens ont agi contre le gouvernement les armes à la main. Toutefois, il paraît que des individus et des groupes, parfois même des femmes, sont fréquemment assassinés. Tout cela a bien entendu été accompli de manière tellement habile et dissimulée, qu’on n’a guère de chance d’en avoir les preuves. Concernant Sivas, par exemple, Miss Graffen ne connaît pas un seul cas avec certitude. Qu’en chemin des individus aient été jetés dans le Tochmassou ne paraît pas impossible. Mais, il faut le mettre sur le compte des cruels Kurdes qui ont profité de l’encombrement pour le faire «par mégarde». En outre, Miss Graffen a vu un enfant qui avait une coupure à la gorge et qui racontait qu’on avait tranché le cou de sa mère et d’autres [personnes] en sa présence. à Tokat et à Erzindjan, on aurait tué un grand nombre d’individus. Les hommes qui se trouvaient dans la prison de Sivas y sont encore et seraient à leur tour envoyés en bannissement, pour y rejoindre leurs femmes. C’est bon signe. L’envoi, en secret, de petits groupes [destinés] à travailler aux champs, sur les routes ou sur les voies du chemin de fer est toujours très suspect. Cela apparaît bien et plausible, mais il semble qu’il ne s’agisse pas toujours d’affaires très nettes. On a eu des nouvelles de quelques groupes, quoi que beaucoup d’entre eux aient probablement été tués. Mais on n’aura jamais une statistique, même approximativement, juste. Nous craignons que les pertes ne soient pas inférieures à celles de 1895/96.

Maintenant, voici quelques détails sur les convois et les routes [prises] par les exilés. Il faut clairement voir quels immenses problèmes se posent quand on déplace des centaines de milliers de gens à travers un pays en état de guerre, primitif et sans chemin de fer, et dont des régions considérables sont habitées par des peuples barbares. D’après une lettre de Kharpout, il y est déja passé 91000 personnes venues des contrées du nord. Il faut considérer une grande partie des difficultés et de la misère que Miss Graffen décrit, et que nous-mêmes voyons partiellement, comme le résultat des conditions naturelles. Plus tard, je décrirai également celles qui sont à mettre sur le compte de gens malveillants et aussi, partiellement et par contrecoup, du gouvernement.

D’une part, il se trouve tellement de riches parmi les Arméniens, que nous en sommes toujours effrayés. Sous les guenilles parfois portées, pour des raison de sécurité, par des enfants, on découvre des centaines de livres [or] (19 marks), mais les Arméniens ne s’entraident pas plus pour cela. Il y a beaucoup de pauvres parmi les exilés, car bien souvent ils ont été déportés sans avoir la possibilité de se préparer et sans pouvoir emporter quoi que ce soit. Beaucoup de gens n’ont avec eux ni argent pour acheter quelque chose ni réserves importantes, et sont condamnés à ne manger que du pain sec et rassis. Il se révèle en outre qu’il est à présent extrêmement difficile de trouver quelque chose à acheter, car il n’y a plus nulle part d’hommes pour travailler et s’occuper des moyens de transport. Dans des conditions pareilles, on peut imaginer la [situation des gens] entassés dans des convois de 10 000 personnes et se faire une idée du peu de vivres qu’ils sont susceptibles de trouver dans quelques villages, souvent petits, sans parler du fait que la population ne risque pas de les aider avec empressement. Ce qui veut dire qu’ils auront sûrement faim. Mais dans ce pays aride, la soif est encore pire, surtout si l’on traverse sous 30 à 35° à l’ombre des contrées sèches et sans ombre. Ils sont parfois amenés à acheter un verre d’eau pour une piastre (18 Pfennigs), pour que chacun puisse au moins y tremper une fois sa langue. Et la fatigue! Même si l’on considère que les villageois sont en général sains et qu’ils marchent lentement (trois à quatre heures par jour), il est évident que tous les vieillards, les enfants et les nourrissons, surtout ceux qu’on ne peut plus porter, créent des problèmes. Le gouvernement fournit autant de bêtes de somme qu’il peut, mais souvent, avec la meilleure volonté du monde, il ne peut le faire. Il est inévitable que beaucoup d’entre eux meurent en chemin; il est même étonnant qu’il n’en meure pas encore plus. Miss Graffen, qui s’est toujours trouvée à la fin du convoi de Sivas (dix mille [personnes]), a dénombré au total quarante-neuf morts depuis leur départ de Sivas, en quinze jours de marche ( cf. p. 87) [...]

Et maintenant un chapitre à part, les pillages. Le gouvernement ne dispose de presque pas de militaires à l’intérieur. Le peu de saptieh s’y [trouvant] ne sont en fait saptieh que par la grâce de leurs uniformes et de l’insigne qu’ils portent sur les bras. Les dix mille personnes du [convoi] de Sivas n’étaient accompagnées que par cinq ou six saptieh qui ne sont de surcroît guère fiables. Il faut également considérer que les biens des Arméniens qui traversent [les villages] constituent un butin opportun pour les villageois. Il est également courant que les saptieh et les bachi bosuk, ou des Kurdes, avec le consentement discret des premiers, pillent les gens ou extorquent, sous la menace, leurs biens et leur argent. Même Miss Graffen fut souvent obligée de donner des bakhchich (jusqu’à 10 Ltq.) Des pillages et extorsions pareilles ont en vérité eu lieu massivement et peuvent naturellement continuer [...]

D’après des témoignages fiables, ça va mal pour les Arméniens de Samsoun. On aurait tué un grand nombre d’entre eux sur la route de Sivas. Quand, par exemple, quelqu’un sortait légèrement du convoi, il était fusillé comme fugitif. On disait sans motif à certains «T’as l’air de vouloir fuir» et puis on les tuait.

Les cent cinquante à deux cents hommes séparés du convoi à Hassan Tchélébi, mentionnés ci-dessus, se trouvent à l’heure actuelle en prison à Hekim Han. Certains suspects seraient renvoyés à Sivas, les autres expédiés à Ourfa sous stricte surveillance militaire. D’ailleurs on envoie toujours les hommes à part, accompagnés de plus de saptieh, car sinon ils les maîtriseraient.

Le défilé des dix mille17 de Sivas a eu lieu hier après-midi, entre 3h et 4h. Mais ils sont passés de la route de Sivas à un chemin de terre menant à Jechl Han et de là ils ont pris la route de Mezré, jusqu’à Frudschir, aussi loin que la route est carrossable. Après quoi, ils vont continuer à pied. Tout à l’heure, cinq cents personnes de la région de Mezré sont arrivées. Elles campent maintenant avec leurs chars à bœufs près du Köchnük. Il paraît que le pauvre mutessarif ne sait plus où donner de la tête. Tout le monde passe par ici, des milliers chaque jour [...]

Les enfants — mentionnés plusieurs fois — logés dans la ville par le gouvernement, dans différentes maisons, sont des orphelins ou des enfants gracieusement confiés par leurs parents au gouvernement. Il s’agit donc d’un arrangement d’intérêt social.

Comme Miss Graffen projetait d’emporter, au moyen de dix ou douze chevaux de somme, une réserve de farine pour le voyage à Ourfa, j’ai hier matin fait venir Moustapha agha, le maire, pour discuter de tout cela avec lui. Son manque de toute capacité de jugement s’est de nouveau révélé. Il prétend que Malatia est un piège meurtrier; qu’on les fait venir de toutes parts pour les assassiner; que personne n’arrive à Ourfa, etc.

[...] La veille, alors que Miss Graffen s’apprêtait à partir rejoindre ses protégés et n’attendait plus pour cela que la lettre d’accompagnement promise et le s aptieh envoyé par le mutessarif, la nouvelle suivante arriva: le vali de Sivas aurait télégraphié pour qu’elle ne continue plus le voyage. Ce ne sont pas seulement les protestants, entièrement tributaires d’elle et à présent forcés de voyager sans elle, qui se sont inquiétés de cette nouvelle. En effet, que vont devenir la vieille femme du pasteur qui l’accompagne et, surtout, le futur jeune professeur de dix-sept ans [Levon] qui l’a accompagné jusqu’ici comme cocher ? Après de longues discussions, nous avons décidé que tous resteraient chez nous pour l’instant [...]

Zunächst die Haltung der Regierung u(nd) ihre armenische Politik. Infolge der übertritte verschiedener Armenier, auch aus dem Inneren, meist solcher, die sich durch Bedell (Lösegeld) vom Militärdienst befreit hatten, zu den Russen, infolge der Aufstände in der Wangegend u(nd) ähnlicher Vorkommnisse, endlich auf Grund der Tatsache, daß in vielen Landesteilen Vorbereitungen zu einem bewaffneten Aufstand zur Hilfe der eindringenden Russen gegen die osmanische Regierung aufgedeckt worden sind, wurden folgende Maßregeln ergriffen, wie fast alle befragten Beamten u(nd) Kundigen aussagen: Die Angehörigen revolutionärer Parteien wurden teils verbannt, teils zum Tode verurteilt. Dieses Töten geschah aber fast nie öffentlich, sondern in der Form, daß gruppenweise Leute zur Arbeit geführt wurden, deren Führer eine bestimmte Anzahl auf einer Liste angegebener Personen unterwegs «verlieren» sollten. Neuerdings ist ja Befehl gekommen, daß die gesamte armenische Bevölkerung nach Urfa, z(um) T(eil) offenbar auch nach Mossul, nach anderen Aussagen nach Mesopotamien verbannt werden soll. Es sind wiederholt strenge Befehle gegeben worden, daß niemand seine Hand an Eigentum u(nd) Leben der Armenier legen darf. Tatsächlich sind wiederholt Kurden erschossen worden, die sich nach der Seite hin vergangen hatten. Für die glückliche Durchführung der Riesentransporte u(nd) die Verpflegung unterwegs wird offenbar nach Möglichkeit gesorgt, nur daß die Möglichkeit unter den jetzigen Umständen fast nie vorhanden ist. Die ganze Haltung der Behör-den erscheint korrekt. Angesichts der in der Tat schwierigen Lage den Armeniern gegenüber u(nd) der Russengefahr mußte auch alles überstürzt u(nd) konnte nicht so vorbereitet u(nd) organisiert werden, wie es sonst vielleicht geschehen wäre. Nur ein Zweifel kommt uns: Wenn die Regierung nicht, wenigstens in der ersten Zeit, absichtlich etwas Spielraum gelassen hätte, so hätten einzelne Lokalbehörden schwerlich gewagt, so vorzugehen, wie sie z(um) B(eispiel) hier getan hat, d(as) h(eißt) immer einzelne Beamte oder einflußreiche Privatpersonen. - Es wird ja hier immer gesagt, daß alles im Auftrage der deutschen Regierung geschehe. Dem gegenüber war es uns interessant u(nd) beruhigend zu hören, daß viele unter den deutschen Offizieren an der Kaukasusfront sehr entrüstet wären über manche Maßregel gegen die Armenier, obwohl andere, z(um) B(eispiel) Postelt Pascha15, diese am liebsten alle beseitigt sehen möchte(n). Frl. (Fräulein) v(on) Wedel, eine Norwegerin, u(nd) SCHw(ester) Eva Elbers16, früher in Marasch, dann Kurdenmissionarinnen, zuletzt im Roten Halbmond in Erserum u(nd) dann in Erzinjan, hatten dort manches gehört u(nd) gesehen, z(um) B(eispiel) auch, wie Türken armenische Frauen u(nd) Mädchen unter sich verteilten, hatten dann Widerspruch erhoben. Daraufhin wurde ihnen bedeutet, wenn sie nicht binnen zwei Tagen abreisten, würden sie ins Gefängnis gesteckt. Es war nur gut, daß man sie nach Konstantinopel abreisen ließ, übrigens unter strenger Bewachung, wo sie, wie Miss Graffen hoffte, einen wirksamen Bericht beim deutschen Botschafter erstattet hätte(n).Das armenische Volk habe in Sivas selbst alle Waffen ausgeliefert, Bomben od(er) dgl. (dergleichen; die Hrsg.) seien nicht gefunden, sonstige Verschwörungen auch nicht entdeckt worden. Dagegen die in Wan vorgekommenen Metzeleien unter den Türken, die Kämpfe zwischen Armeniern u(nd) Türken in Karahissar u(nd) dgl. (dergleichen) sind allgemein bekannt, u(nd) es kann nicht verwunderlich erscheinen, daß man den Armeniern nun auch an anderen Orten nicht mehr traut, auch wo sie sonst friedlich sind. Geheime Vorbereitungen für die Zeit der Vernichtung der Türkenherrschaft, mindestens die entsprechenden Wünsche u(nd) Hoffnungen, sind wohl im ganzen armenischen Volk verbreitet gewesen. Aber darum etwa das ganze Volk als ein Volk von Empörern anzusehen, wäre eine große übertreibung. Auch die Türken wissen u(nd) geben zu, daß ein großer Teil jetzt unschuldig leidet u(nd) keinen aktuellen Grund gegeben hat, gegen die Armenier einzuschreiten. Das ist bedauerlich, aber selbstverständlich — Die Verbannung wird so durchgeführt, daß nach vorheriger Bekanntmachung die einzelnen Häuser geräumt werden u(nd) zu Hunderten u(nd) Tausenden die Leute unter Begleitung von Saptiehs auf den Weg gebracht werden; soweit möglich gehen sie mit Ochsen- oder Büffelwagen; wo keine Fahrstraßen vorhanden sind, wie z(um) B(eispiel) zwischen hier u(nd) Urfa, soweit möglich mit Lasttieren, meist Eseln. Die Verbannung ist scheinbar eine allgemeine; doch bemühen sich offenbar einzelne Valis, alte, gebrechliche Leute, Schwangere am Ort zu lassen. Die Waisenmädchen im Schweizer Waisenhaus in Sivas hat man «vorläufig» dort gelassen. Doch scheint sonst der Schutz von Ausländern oder Türken nicht anerkannt zu werden, abgesehen von Einzelfällen. Eine verdächtige Erscheinung ist die, daß oft auf der Reise einige Gruppen abgesondert werden, um einen anderen Weg zu gehen. Allgemein sind die Gerüchte, daß die einzelnen Gruppen dann getötet werden, doch liegen dafür keine Beweise vor. Aus der Umgebung von Miss Graffen sind auch bei Hassan Tschelebi über einhundert Männer, darunter auch Lehrer der amerikanischen Anstalten, abgesondert worden. Was aus ihnen geworden ist, ist unbekannt. Eigentliche Massaker, d(as) h(eißt) in dem Sinne öffentlicher Metzeleien, haben auch nach Miss Graffens Wissen nicht stattgefunden, abgesehen vielleicht von den Plätzen, wo auch die Armenier bewaffnet gegen die Regierung vorgegangen sind. Dagegen scheinen einzelne Personen u(nd) Gruppen, auch bisweilen Frauen, vielfach ermordet zu sein. Allerdings ist das so geschickt u(nd) verborgen geschehen, daß sich schwer Beweise werden beibringen lassen. Z(um) B(eispiel) aus Sivas wußte Miss Graffen keinen einzigen Fall bestimmt. Daß auf der Reise einzelne Personen von der Brücke in den Tochmassu geworfen sind, scheint nicht unmöglich. Das fällt aber auf das Konto roher Kurden, die das Gedränge benutzen, um «aus Versehen» so etwas passieren zu lassen. Außerdem hat Miss Graffen ein Kind mit einer Schnittwunde im Hals gesehen, das erklärte, seiner Mutter u(nd) anderen sei der Hals abgeschnitten, vor seinen Augen. In Tokat u(nd) Ersinjan sollen sehr viele getötet worden sein. Die Männer, welche in Sivas im Gefängnis waren, sollen noch dort sein u(nd) auch in Verbannung geschickt werden, ihren Frauen nach. Das ist ja ein gutes Zeichen. Höchst verdächtig sind ja immer diese geheimen Sendungen von großen u(nd) kleinen Gruppen zu Ernte-, Wegbau- u(nd) Eisenbahnarbeiten. Das klingt sehr gut u(nd) wahrscheinlich, scheint aber oft keine saubere Sache zu sein. Von manchen Gruppen sind Nachrichten gekommen, aber daß viele dabei getötet werden, kann kaum einem Zweifel unterliegen. Doch auch nur annähernd richtige Zahlen werden sich kaum je aufstellen lassen. Wir fürchten, daß die Verluste nicht hinter denen von 1895/96 zurückbleiben.
Nun Einzelheiten über die Züge u(nd) Wege der Verbannten. Man muß sich klarmachen, welch unendliche Schwierigkeiten es bereiten muß, Hunderttausende von Menschen in einem im Krieg begriffenen, z(um) T(eil unkultivierten Land ohne Eisenbahn u(nd) durch von wilden Völkern bewohnte große Landgebiete hindurchzuführen. Z(um) B(eispiel) waren nach einem Brief aus Charput dort bereits 91000 Personen aus den nördlichen Gebieten durchgekommen. Viele der Schwierigkeiten u(nd) Nöte, die Miss Graffen schildert u(nd) die wir auch z(um) T(eil) beobachten können, muß man also als Folgen der natürlichen Verhältnisse ansehen. Später werde ich dann auch diejenigen schildern, welche auf das Konto böser Menschen u(nd), wenn auch nur ganz indirekt, auf das der Regierung zu schieben sind. Auf der einen Seite sind viele Reiche unter den Armeniern, so viele, daß wir uns immer wieder entsetzen. Unter Lumpen, bisweilen aus Sicherheitsgründen Kindern umgebunden, finden sich viele Hunderte von Lira (19 Mark). Aber ein Armenier hilft dem andern nicht. Deshalb sind viele Arme dabei; vielfach sind sie, ohne Vorbereitungen treffen u(nd) irgendetwas mitnehmen zu können, fortgeführt. Viele haben also weder Geld bei sich, um etwas zu kaufen, noch größere Vorräte bei sich, müssen nur von altem, hartem Brot leben. Außerdem ist es jetzt, wo nirgend Männer für Arbeit oder Transport u(nd) Transportmittel da sind, an sich schon außerordentlich schwer, etwas zu kaufen zu finden. Nun denke man sich Züge von zehntausend Menschen, dicht aufeinander, u(nd) überlege, wie viel Lebensmittel die in den wenigen u(nd) meist kleinen Dörfern finden werden, ganz abgesehen davon, daß die Bevölkerung nicht gerade bereitwillig ihnen helfen wird. Hunger müssen sie also viel leiden. Noch schlimmer ist der Durst in diesem wasserarmen Lande und bei Wanderungen durch trockene, schattenlose Gegenden bei 30 bis 35 Grad Schattentemperatur. Manchmal haben sie ein Glas Wasser für einen Piaster (18 Pfennig) gekauft u(nd) dann jeder wenigstens einmal seine Zunge damit benetzt. Dann die Anstrengungen! Wenn auch die Landbevölkerung im Ganzen gesund ist u(nd) sehr langsam gegangen wird (täglich drei bis vier Stunden), so bringen doch die vielen Alten u(nd) Kinder, Säuglinge u(nd) besonders die, welche nicht mehr getragen werden können, große Schwierigkeiten mit sich. Die Regierung gibt zwar möglichst viele Tiere, aber vielfach kann sie es beim besten Willen nicht. Es kann gar nicht ausbleiben, daß unterwegs viele sterben; man muß sich sogar wundern, daß es nicht mehr sind. Miss Graffen, die stets am Ende des Sivasser Zuges (zehntausend) war, hat im ganzen 49 Tote gezählt in den 15 Tagen seit Sivas (p. 87).
[...] Nun ein Sonderkapitel: Die Beraubungen. Die Regierung hat im Innern fast kein Militär zur Verfügung. Die paar Saptiehs sind nur durch Uniformierung oder Abzeichen auf den Armen dazu gemacht. Bei den zehntausend Leuten aus Sivas waren etwa fünf bis sechs Saptiehs! Außerdem sind auch diese selten zuverlässig. Ferner muß man bedenken, welch willkommene Beute den Dorfleuten die Habe der durchziehenden Armenier ist. Es kann gar nicht ausbleiben, daß sehr oft entweder die Saptiehs oder Baschy Bosuk, oder unter deren stillschweigender Zustimmung Kurden die Leute berauben oder unter Drohungen Geld u(nd ) Gut von ihnen erpressen. Selbst Miss Graffen hat sozusagen gezwungen viele Bachschisch (bis zu zehn Ltq.!) geben müssen. Derartige Beraubungen u(nd) Erpressungen sind der Tat massenhaft vorgekommen u(nd) kommen natürlich fortgesetzt vor.
[...] Sehr schlecht soll es nach glaubwürdigen Zeugnissen den Armeniern aus Samsun gegangen sein. Auf dem Weg bis Sivas müssen wohl eine ganze Anzahl getötet sein. Wenn z(um) B(eispiel) einer mal etwas aus dem Zuge heraustrat, wurde er als Flüchtling erschossen. Manchen wurde ohne jeden Grund gesagt: Du willst fliehen, das sieht man dir an, u(nd) wurde daraufhin erschossen. - Die oben erwähnte(n), in Hassan Tschelebi vom übrigen Zug getrennten Männer, 150 bis 200, sind jetzt im Gefängnis zu Hekim Chan. Einige Verdächtige sollen nach Sivas zurückgeschickt werden, die übrigen unter stärkerer militärischer Besatzung nach Urfa nachgeschickt werden, wie überhaupt stets die Männer besonders geschickt werden sollen, mit mehr Saptiehs, weil sie sonst zweifellos diese vergewaltigen (überwältigen; die Hrsg.) würden.
Der Vorbeizug der Zehntausend17 erfolgte gestern Nachmittag innerhalb von drei bis vier Stunden. Doch gingen sie sofort von der Sivasstraße auf einem Feldweg nach Jechl Chan vorbei zur Meserehstraße herüber, bis nach Frudschir, so weit Wagen gehen können. Von da werden sie zu Fuß weitergehen. Vorhin kamen ca. fünfhundert aus der Meserehgegend, die jetzt beim Köschnük lagern, mit Ochsenwagen. Der arme Mutessarif hier soll wohl nicht wissen, wo ihm der Kopf steht. Alles kommt hier vorbei, täglich zu Tausenden [...] (p. 77).
Die schon öfters erwähnten armenischen Kinder in der Stadt, die jetzt die Regierung in einzelnen Häusern untergebracht hat, sind übrigens entweder Waisen oder solche, welche die Mütter der Regierung freiwillig anvertraut haben. Es soll also eine Veranstaltung sozialer Fürsorge sein (p. 81).
[...] Da Miss Graffen vorhatte, auf zehn bis zwölf Lastpferden Mehl für die Reise nach Urfa mitzunehmen, ließ ich gestern früh Mustapha Agha, den Bellede Reis, holen, damit wir mit ihm über alles sprächen. Es zeigte sich wieder die völlige Urteilslosigkeit bei ihm. Er meint, Malatia sei eine Mördergrube: Von allen Seiten würden sie hierher gebracht, um getötet zu werden. Nach Urfa würden keine kommen usw [...] (p. 83).
[...] Gestern Abend, als Miss Graffen gerade abreisen wollte, ihren Leuten nach, u(nd nur noch auf das versprochene Beglaubigungsschreiben u(nd) den Saptieh vom Mutessarif wartete, kam Nachricht: Der Wali von Sivas hätte telegraphiert, sie solle von hier nicht weiter reisen. Das war kein kleiner Schreck, nicht nur für all ihre Protestanten, die sich ganz an sie angeschlossen hatten u(nd) nun ohne sie weiter mußten, sondern was soll nun aus der alten Predigerfrau werden, die bei ihr ist, u(nd) besonders aus dem etwa 17jährigen werdenden Lehrer, der sie bisher als ihr Arabatschi begleitet hat? Nach langem Hin u(n) Her beschlossen wir, daß sie alle vorläufig bei uns bleiben sollen [...] (p. 83).

23 juillet 1915 — [...] Juste avant l’arrivée de Miss Graffen, il y a trois jours, un groupe d’environ mille à mille cinq cents personnes est arrivé ici et campait près du cimetière turc, le long de la route de Mezré. Comme il ne s’y trouve pas [de point] d’eau, nous avons cru qu’elles partiraient bientôt. Du fait qu’elles étaient encore sur place le soir venu, nous leur avons envoyé, avec Mahmoud et les garçons, quelques seaux d’eau. Avant-hier matin, leur saptieh a demandé au nôtre si nous autoriserions quelques femmes à venir chercher de l’eau chez nous. Quoique nous ayons fait des réserves, nous l’avons naturellement admis tout de suite. Notre maison se transforma alors en un chaos tel que ceux qui ne l’ont pas vu ne peuvent s’en faire la moindre idée. Comme un torrent après une pluie diluvienne, ils se sont rués sur nous. Des cris, des querelles, des plaintes, des gémissements de nourrissons [...], des femmes malades en quête de médicaments, des affamés demandant de la nourriture, de l’argent, et des questions: qu’allons-nous devenir? Où nous envoient-ils? Que vont devenir nos biens? Vont-ils nous tuer? Que vont devenir nos enfants? Comment allons-nous trouver de l’eau et de la nourriture? Etc. La plupart ne voulaient pas entendre raison [...] On voyait naturellement aussi une misère inexprimable: des malades qui n’arrivent presque plus à avancer et qui sont obligés de marcher encore deux semaines, des petits enfants qui ne survivront plus très longtemps. Mais d’un autre côté, il faut remarquer que la plupart des femmes — il n’y a presque pas d’hommes, exceptés quelques vieillards et quelques garçons, les autres étant conduits à part, probablement attachés — sont tellement saines et robustes, qu’elles vont dans la plupart des cas très bien supporter tous les efforts physiques et qu’elles seront même plus saines après ( sic ). Trois (ou quatre) personnes seraient mortes dans ce camp, dont deux fillettes [...]

Notre Mihran prétend avoir entendu, cette nuit, comment les s aptieh hurlaient: «Donnez-nous de l’argent, donnez-nous de l’argent». Tous leurs draps et autres biens sont restés ici, car ils ne peuvent plus rien porter du fait que les chars à bœufs n’arrivent plus à avancer et qu’il n’y a pas ici d’autres bêtes de somme. Environ cinq cents autres personnes, de la région de Sivas aussi, sont passées ce matin et les ont rejoints. De même, cinq cents personnes sont arrivées hier aprés-midi et ont passé la nuit près du Köchnik.

J’ai oublié de mentionner que, d’après Miss Graffen, il y a encore quatre mille hommes arméniens dans l’ amele tabouri [=bataillon de travail] de Sivas [...]

Ce matin deux de nos enfants de Mandjaluk [=Mandjılık, vilayet de Sivas], que nous avions dû renvoyer chez eux au début de la guerre, sont arrivés: Roupèn, un aveugle de quinze ans, et Dikran, un enfant voyant de douze ans. Ils y sont renvoyés, avec la femme mentionnée ci-dessus. La sœur de Dikran, Azniv, est déja partie avec les autres, de même qu’Anton, un autre de nos garçons de Mandjaluk. Ils ont rapporté les nombreux pillages subis en chemin, bien qu’en exagérant de manière typiquement orientale [...]

Dikran a confirmé qu’il avait vu en route un groupe d’hommes isolés et ligotés qui étaient conduits dans une vallée. Par la suite, ceux qui les avaient emmenés seraient revenus avec leurs habits. De semblables rapports n’ont naturellement guère de valeur; mais on ne peut ni mettre en doute que des tels incidents se sont maintes fois produits, ni s’en étonner dans les conditions locales et la situation actuelle [...]

Il me faut rectifier un fait de la page 80. Miss Graffen avait en effet compté quarante-neuf cadavres entre Hassan Badragh et Malatia, donc pendant sa dernière journée de voyage. Jusqu’alors peu de gens étaient morts et enterrés. Cette dernière étape de 55 km était exceptionnellement chaude. Ainsi beaucoup de gens furent victimes d’insolation et c’est aussi à cause de cette chaleur inhumaine qu’on ne les a pas enterrés, car on ne voulait pas courir le risque d’avoir encore plus de victimes par égard pour les morts. On entend souvent des rapports concernant des Arméniens qui ont bien souvent été tués dans des villages de la région de Sivas.

[...] Vor drei Tagen war ja, kurz vor Miss Graffen, eine Gruppe von etwa eintausend bis 1500 Menschen hier angekommen u(nd) lagerte am türkischen Friedhof an der Meserehstraße. Wir hatten gedacht, sie würden, da dort kein Wasser ist, nach kurzer Zeit weiterziehen; als sie abends aber noch da waren, schickten wir durch Mahmud u(nd) die Knaben einige Eimer Wasser hin. Vorgestern früh hatte der dortige Saptieh durch unseren fragen lassen, ob nicht ein paar Frauen von uns Wasser holen dürften, was wir natürlich trotz aller Bedenken sofort erlaubten. Nun ging es zwei Tage hier zu - wer es nicht gesehen hat, kann sich keinen Begriff davon machen. Wie ein reißender Strom nach einem Wolkenbruch (kam) es über uns. Ein Schreien, ein Zanken, ein Klagen, Wimmern von Säuglingen. [...] Kranke Frauen wollten Medizin, Hungrige Essen, Geld, ein Fragen: Was werden wir werden, wohin schicken sie uns, wie werden wir gehen können, was wird aus unserer Habe, werden sie uns töten, was wird aus unseren kleinen Kindern, wie werden wir Essen u(nd) Wasser finden usw. Belehrungen sind natürlich die wenigsten zugänglich [...] Man sah natürlich namenloses Elend: Kranke, die sich kaum schleppen können u(nd) nun etwa zwei Wochen zu Fuß gehen müssen, kleine Kinder, die kaum noch lange leben werden. Aber andererseits muß man sagen: Die meisten der Frauen — Männer waren fast nicht dabei, nur einige alte u(nd) einige Jünglinge, die anderen werden extra geführt, wohl gebunden — sind so gesund u(nd) kräftig, daß sie meistens sehr gut all die Anstrengungen überstehen werden, vielfach sogar noch gesünder werden (sic! die Hrsg.). In dem Lager hier sollen drei Personen (oder vier), darunter zwei kleine Mädchen, gestorben sein [...] (p. 83).
[...] Heute nacht behauptet unser Mihran gehört zu haben, wie Saptiehs immer brüllten: Gebt uns Geld, gebt uns Geld. Alle Betten u(nd) sonstige Habseligkeiten sind hier geblieben, denn jetzt können sie ja nichts mehr weiter mit sich tragen, da die Ochsenwagen nicht weiter gehen können u(nd) Tiere nicht da sind. Etwa fünfhundert andere kamen heute Morgen, auch aus der Sivasser Seite, vorbei u(nd) gingen mit ihnen zusammen, ebenso etwa fünfhundert andere, die gestern Nachmittag ankamen u(nd) die Nacht am Köschnik zugebracht haben.

Ich vergaß zu erwähnen, daß, wie Miss Graffen erzählt, in Sivas noch viertausend armenische Männer im Amelatabur (das heißt Arbeitsgruppe) sind [...] (p. 84).
[...] Heute früh kamen auch zwei unserer Kinder aus Mandjaluk (Mandschaluk, bei Sivas; die Hrsg.), die wir nach Kriegsausbruch geschickt hatten: Der blinde, etwa 15jährige Ruppen (Ruben; die Hrsg.) u(nd) der sehende, etwa zwölfjährige Dikran (Tigran; die Hrsg.). Die sind auch mit der oben erwähnten Frau wieder hierhergeschickt. Dikrans Schwester, Asniv, ist mit den anderen weitergeschickt, ebenso Anton, ein anderer unserer Knaben aus Mandjaluk. Die erzählten auch viel von Beraubungen unterwegs, wenn auch mit der landesüblichen übertreibung [...]
Dikran erzählte auch, er habe unterwegs gesehen, wie eine Gruppe Männer abgesondert, gebunden u(nd) in ein Tal geführt worden sei. Nachher seien die, welche sie weggeführt hätten, mit deren Kleidern zurückgekommen. Solche Berichte haben natürlich wenig Wert; daß jedoch derartige Dinge vielfach vorgekommen sind, kann weder bezweifelt werden noch unter den hiesigen Verhältnissen u(nd) jetzigen Umständen weiter befremden [...] (p. 85).
[...] Zu Seite 80 muß ich berichtigen, daß Miss Graffen zwischen Hassan Badragh u(nd) Malatia, also auf der letzten Tagereise, 49 Tote gezählt hat. Bis dahin waren wenige gestorben u(nd) waren begra-ben worden. Diese letzte Strecke von etwa 55 Kilometern ist besonders heiß, so daß viele den Hitzschlag bekamen u(nd) auch wegen der unsinnigen Glut nicht begraben werden konnten, wenn man nicht aus Rücksicht auf die Toten noch weitere Opfer haben wollte. Die Berichte, daß die Armenier in Dörfern vielfach getötet worden sind, hört man sehr oft, besonders von der Sivasser Gegend (p. 87).

24 juillet 1915 — [...] La veille, Hedwig et Miss Graffen ont rendu visite à la femme du mutessarif, puis lui-même les a rejointes. Hedwig va elle-même la raconter:

[...] «[Le mutessarif ] a apporté un volumineux document qui était arrivé la veille de Constantinople et concernait les Arméniens. Il a lu quelques passages à haute voix: “Les propriétés abandonnées par les Arméniens doivent être scellées par les autorités. Tout ce qui pourra leur être envoyé doit l’être aussitôt qu’ils auront gagné leur lieu de destination; les autre effets, tapis, etc., seront vendus et le produit [de la vente] leur sera envoyé. Là-bas on donnera à chacun d’entre eux autant de terrain qu’ils en possédaient ici. De l’outillage agricole et des semences leur seront distribués, les artisans recevant des outils. Pour les pauvres, le gouvernement construira des maisons, on construira également des écoles, etc.” D’après tout ce que le mutessarif nous a lu, les ordres sont impeccables: il faut espérer qu’on trouvera les gens qui conviennent pour tout réaliser [...]

[...] Miss Graffen lui a demandé quand les hommes qui ont été séparés de leur [convoi] parviendront à Ourfa. Ils y arriveront avant même les femmes, parce qu’ils n’ont pas d’enfants et de charges avec eux et marchent plus vite. Il a été impossible de les expédier avec les femmes, car si l’un d’entre eux avait [tenté] de fuir, il aurait dû être fusillé et même si un seul avait fui en se cachant au milieu des femmes et des enfants, on n’aurait pas pu tirer sur lui, sinon on aurait pu tuer les autres [...]

[...] [Le mutessarif ] a reçu soixante à quatre vingts demandes de femmes arméniennes de Malatia pour obtenir la permission de se convertir à l’Islam et pouvoir rester à Malatia, mais les Turcs ne l’acceptent pas et ne le souhaitent pas.

C’est le vali de Sivas qui a interdit à Miss Graffen de continuer son voyage, alors que le mutessarif souhaitait qu’elle parte avec le convoi. Il a ajouté, avec raison, que Miss Graffen risquait d’être attaquée ou de tomber malade et de mourir en chemin, et après on lui demanderait pourquoi il l’avait autorisée [à partir]. Aprés chacune de mes visites, je [=Hedwig Bauernfeind] sortais soulagée et nous ne pouvions tous deux nous empêcher de faire confiance au mutessarif, quoique nous soyons trompés de tous côtés.

[...] Gestern abend war Hedwig mit Miss Graffen bei der Mutessarifin, u(nd) er kam auch dazu. Davon mag Hedwig selbst erzählen.
[...] er (der Mutessarif; die Hrsg.) brachte ein sehr langes Schriftstück, welches gestern aus Konstantinopel gekommen war, betreffs der Armenier. Einiges las er vor: «Das Eigentum der Armenier, welches sie zurücklassen, soll von der Regierung versiegelt werden. Was ihnen an Wertsachen u(nd) Schmucksachen nachgeschickt werden kann, soll geschehen, d(as) h(eißt) sobald alle an ihrem Bestimmungsort angelangt sind; die anderen Sachen, Teppiche usw. sollen verkauft werden u(nd) das Geld ihnen zugestellt werden. Dort soll jedem so viel Land zugeteilt werden, wie er hier hatte. Landwirtschaftliche Geräte u(nd) Samen sollen sie bekommen, die Handwerker sollen Werkzeuge bekommen. Für die armen Leute sollen von seiten der Regierung Häuser gebaut werden, Schulen usw. sollen gebaut werden.» Nach allem, was der Mutessarif uns vorlas, sind die Befehle ausgezeichnet, wenn auch nur die rechten Leute da wären, sie zu verwirklichen [...]
[...] Miss Graffen frug, wann die Männer, die von ihnen getrennt worden seien, nach Urfa kämen. - Die kämen noch vor den Frauen hin, weil sie keine Kinder u(nd) Lasten mit sich hätten u(nd) schneller gehen könnten. Mit den Frauen hätten sie sie nicht schicken können; denn wenn einer versucht zu fliehen, soll er erschossen werden, - wenn nun einer zwischen den Frauen u(nd) Kindern flieht, kann doch nicht auf ihn geschossen werden, weil dann sicher andere getroffen würden [...] (p. 89).
[...] Von Malatia wurden ihm (dem Mutessarif; die Hrsg.) 60 bis 80 Gesuche überreicht von den armenischen Frauen, worin sie baten, zum Islam übertreten zu dürfen, damit sie in Malatia bleiben könnten. Es wird aber nicht angenommen u(nd) nicht gewünscht von den Türken.
Miss Graffens Weiterreise nach Urfa wurde von dem Sivas-Wali verboten. Der Mutessarif hätte lieber gesehen, wenn sie mitgegangen wäre. Doch sagte er sehr richtig, Miss Graffen könne überfallen werden oder erkranken u(nd) sterben auf dem Wege, dann käme an uns die Frage, warum habt ihr das erlaubt?! — Nach jedem Besuch, den ich dort machte, ging ich (Hedwig Bauernfeind, die Hrsg.) mit erleichtertem Herzen von dort weg, u(nd) wir beide können gar nicht anders als dem Mutessarif unser Vertrauen schenken, obwohl wir hier von so vielen Seiten betrogen wurden (p. 90).

27 juillet 1915 — Hier matin, j’ai envoyé les 5 dernières Ltq. que nous devions encore à Moustapha agha, et je l’ai fait venir pour parler avec lui de notre voyage et des affaires de notre maison [...] Au cours de l’entretien, il se révéla clairement qu’il a presque complètement perdu la raison et qu’on ne peut guère plus le prendre au sérieux. Que pas un seul Arménien ne gagnerait Ourfa, que tous et toutes, hommes, femmes et enfants seraient tués en chemin, que les alentours seraient couverts de cadavres, que tout le Kurdistan serait [aux mains] des Russes, etc., sont chez lui des idées fixes. Même si, sous l’influence du mutessarif, nous voyons les choses trop positivement aujourd’hui, les faits rapportés par Moustapha agha relèvent sûrement de la folie [...]

Hier soir, Bédros de Sivas, un aveugle de vingt ans que nous avions dû renvoyer chez lui en août de l’an dernier, est arrivé avec son pére. Il a raconté que lui et ses parents (huit personnes) sont dans un groupe de cent personnes qui vient juste d’arriver et va passer la nuit à Köchnik. Il a rapporté des histoires horribles de massacres, de meurtres les plus cruels et de pillages s’étant [produits] en cours de route. Dans les villages des alentours de Sivas, il se serait déroulé des scènes effroyables. Il paraît qu’en route on pille terriblement [les convois] et qu’on arrache les biens sous la menace. Deux fois, à Aladja Han et Hassan Tchélébi, des hommes ont été séparés pour, naturellement d’après l’opinion des Arméniens, être tués. Que l’on extermine les groupes d’hommes ou qu’on les conduise par des chemins inconnus à Ourfa reste une énigme. Ce n’est qu’à Ourfa qu’on saura vraiment combien d’hommes sont arrivés. Même si on ne tue pas autant qu’il faut apparemment le supposer, les souffrances qu’on impose à la population, par la faute de quelques milliers de canailles et de séducteurs, sont cruelles au dernier degré. Nous n’attachons guère d’importance aux autres rapports de Bédros, compte tenu de nos expériences jusqu’à ce jour [...]

Malgré toutes ses supplications, nous n’avons pas gardé Bédros, car il est grand, costaud et sain et qu’il n’est guère en danger du fait de sa cécité. Toute personne supplémentaire est une menace pour le maintien de la sécurité de toute notre maison à Mezré. Il nous paraît tout à fait naturel qu’il partage maintenant toutes les difficultés avec les siens. Si nous accueillons encore des gens, ce seront des personnes vraiment faibles et qui risquent de périr. Si, plus tard, on est en mesure de reprendre le travail ici, il ne sera pas difficile de faire revenir Bédros d’Ourfa. Nous sommes restés intraitables — il faut apprendre à l’être à présent. [Bédros] nous a même apporté des nouvelles d’autres protégés: l’aveugle et débile Kaloust mendierait et serait dans un état horrible; Yéprem aurait peut-être été tué, car dans son village presque tout le monde est mort (il mendiait également); Megerditch d’Amasia et Serpouhi de Sivas, deux aveugles, seraient aussi en voyage; le grand Haroutiun serait déja passé par ici [...]

Gestern früh schickte ich Mustapha Agha die letzten fünf Ltq., die wir ihm noch schuldeten, u(nd) ließ ihn hierher bitten, um mit ihm über unsere Reise u(nd) Hausangelegenheiten zu sprechen. [...] Im übrigen Gespräch zeigte sich deutlicher denn je, daß er fast völlig den Verstand verloren haben muß u(nd) kaum noch ernst zu nehmen ist. Daß keiner der Armenier nach Urfa kommen würde, daß alle, Männer, Frauen u(nd) Kinder, unterwegs getötet würden, daß hier in der Umgebung alles voll von Leichen wäre, daß ganz Kurdistan an die Russen fallen würde usw., das ist seine fixe Idee, der arme Mann. Sollten wir jetzt auch vielleicht unter dem Einfluß des Mutessarif viel zu hell sehen: Wie Mustapha Agha es darstellt, ist es doch sicher ein Wahnsinn [...] (p. 92).
[...] Gestern abend war auf einmal Bedros aus Sivas mit seinem Vater hier, ein etwa 20jähriger Blinder, den wir im August vorigen Jahres auch nach Hause geschickt hatten. Er zählte, daß er mit seinen Verwandten (acht Personen) mit einer etwa einhundert Personen betragenden Gruppe mit Ochsenwagen eben hierhergekommen sei, wo sie die Nacht in Köschnik verbringen würden. Er erzählte Schauergeschichten von Metzeleien, grausamsten Ermordungen u(nd) Räubereien unterwegs. In den Dörfern der Sivasgegend sei es entsetzlich hergegangen. Auf der Reise muß tatsächlich geradezu furchtbar gestohlen u(nd) unter Drohungen erpreßt werden. Zweimal, in Aladja Chan u(nd) Hassan Tschelebi, wurden auch wieder Männer abgesondert, nach allgemeiner Ansicht der Armenier natürlich, um getötet zu werden. Ob all diese Gruppen Männer immer getötet oder auf unbekannten Wegen nach Urfa geführt werden, bleibt ein Rätsel. Erst in Urfa wird man später feststellen können, wie viele Männer angekommen sind. Selbst wenn nicht so viele getötet werden, wie man annehmen zu müssen scheint: Die seelischen Qualen, die man dem Volke um der Schuld einiger Tausend Halunken von Verführern u(nd) Aufrührern zumutet, sind höchst grausam. Bedros sonstigen Erzählungen messen wir nach unseren bisherigen Erfahrungen nicht viel Bedeutung mehr zu [...]
Trotz aller Bitten behielten wir Bedros nicht hier. Denn er ist groß, stark, gesund, wegen seiner Blindheit kaum gefährdet. Jede Person erschwert die Insicherheitbringung unseres ganzen Hauses in Mesereh. Es scheint uns das Natürlichste, daß er jetzt all die Schwierigkeiten mit seinen Angehörigen trägt. Wenn wir noch jemand aufnehmen, werden es solche sein, die tatsächlich ganz hilflos u(nd) dem Verderben preisgegeben erscheinen. Wenn später hier die Arbeit wieder ordentlich aufgenommen werden kann, so ist es ja nicht schwer, Bedros aus Urfa zurückzurufen. So blieben wir hart — das muß man jetzt lernen [...] (p. 92).
[...] Von anderen unserer Pfleglinge brachte er (Petros; die Hrsg.) uns auch Nachrichten: Der blöde, blinde Kallust (Galust; die Hrsg.) bettelte u(nd) sei in einem furchtbaren Zustand, Jeprem vielleicht getötet, da in seinem Dorf fast alle getötet seien; auch er habe gebettelt. Megrditsch aus Amasia, Srbuhi aus Sivas, zwei kleine Blinde, mußten auch auf der Reise sein, der große Harutjun müsse schon hier vorbei sein [...] (p. 93).

28 juillet 1915 — [...] Des femmes et des enfants sont encore arrivés et également, tout à l’heure, une lettre de la première halte [du convoi] des gens de Sivas, à deux ou trois heures d’ici. Curieusement, il semble qu’ils soient encore là-bas. Nombre d’entre eux voudraient se réfugier chez nous. Il court des bruits de pillages et de massacres [...]

[...] Es kamen wieder Frauen, Kinder u(nd) vorhin auch Brief von dem zwei bis drei Stunden entfernten ersten Haltepunkt der Sivasleute. Merkwürdigerweise scheinen sie immer noch dort zu sein. Viele möchten bei uns Schutz suchen. Es kommen Gerüchte von Räubereien u(nd) Metzeleien [...] (p. 94).

29 juillet 1915 — Hier, Habèch a amené le petit Dikran qu’il avait trouvé dans la ville en train de pleurer et dans un état lamentable. Nous avons décidé de le garder et de le donner, pour ainsi dire, en cadeau à Habèch, pour qu’il soit ses «yeux», ce qui va être bien utile à Habèch durant notre absence. Et Habèch aime Dikran de manière touchante et va prendre bien soin de lui. Quand nous l’avons dit à Habèch, son visage rayonnait de bonheur, comme nous ne l’avions encore jamais vu. Nous voulons également accueillir Roupèn, mais jusqu’à présent on ne l’a pas encore retrouvé.

Ce matin, quelques femmes protestantes de Mezré sont arrivées. Elles nous ont apporté les premières nouvelles du couple Ehmann. M. Ehmann s’est un peu trop immiscé dans toutes ces affaires et a par conséquent des relations tendues avec le vali, ce qui a évidemment des inconvénients pour nos projets [...] On lui a laissé ses professeurs, mais il ignore jusqu’à quand. Il a dit: «Si vous m’ôtez un des mes hommes, je serai obligé de fermer la maison et de partir». Une missionnaire allemande de Mouch serait réfugiée à Mezré, car les Russes sont arrivés à Mouch (de ceux de Van pas de nouvelles). Quand elle a voulu accompagner les exilés jusqu’à Ourfa, on l’en a empêchée. Une Américaine serait partie pour Ourfa, mais depuis Dyarbékir on n’a plus eu de nouvelles d’elle. Les professeurs des Américains de Kharpout ont été très maltraités en prison et horriblement battus. Les familles, dont les hommes ont, à l’époque, été séparés d’elles, ont apporté d’immenses richesses. Trente-deux ânes chargés de soieries, de tapis, de bijoux et des centaines de pièces d’or attachées sur elles et leurs enfants, sans compter les trésors qu’ils ont laissés à Mezré. Elles n’ont pas été pillées en chemin. Mais une femme fut forcée, en cours de route, de céder sa belle fille de quatorze ans à un lieutenant turc. En cours de route, elles se sont réunies et, après avoir prié ensemble, ont décidé de se jeter dans l’Euphrate. Mais, alors qu’elles étaient sur le point de le faire, Dieu ou le diable les en aurait empêchées. Elles sont à présent ici et ignorent si leurs maris vivent encore ou ont été tués quelque part. Elles sont obligées d’écouter les horribles histoires et les mensonges des femmes de Malatia. Elles ne savent pas ce qu’elles vont devenir, si on va les faire mourir peu à peu dans les montagnes des alentours ou quoi que ce soit d’autre [...]

Ce matin, maître Megerditch, notre tailleur de pierre, et un maître turc sont venus chez nous. Tous les artisans arméniens ne sont pas encore en danger. Il n’y a pas d’hostilité à leur égard, mais l’avenir n’est pas très clair.

Un grand convoi de Sivas est passé à distance cet après-midi, avec des centaines de chars à bœufs. Dix à quinze mille personnes campent à présent près d’ici et n’ont pas encore repris la route.Elles sont toutes très inquiètes — nous avons des nouvelles d’elles. Rien ne prouve que les gens sont massivement tués en chemin, mais il y a tout de même lieu de le soupçonner [...]

Ce soir, j’ai rendu visite au mutessarif [...] J’y ai trouvé un mollah qui le consultait au sujet de l’approvisionnement des orphelins de Sivas qui rôdent dans la ville et dont le nombre s’élève maintenant à huit cents [...]

Gestern brachte Habesch den kleinen Dikran mit, den er in der Stadt weinend u(nd in einem jämmerlichen Zustand gefunden hatte. Wir beschlossen, ihn nun hier zu behalten u(nd) ihn Habesch sozusagen zu schenken, damit er sein «Auge» sei, was Habesch natürlich für die Zeit unserer Abwesenheit eine große Hilfe sein wird. Und Habesch liebt Dikran rührend u(nd) wird gut für ihn sorgen. Als wir es Habesch sagten, strahlte sein blindes Gesicht, wie ich es noch nie sah. Auch Ruppen wollen wir nehmen, bisher konnte er nicht gefunden werden. Heute morgen kamen einige protestantische Frauen aus Mesereh, die uns die ersten Nachrichten von Ehmanns brachten. Herr Ehmann soll sich auch sehr in all die Sachen gemischt haben u(nd) infolgedessen mit dem Wali auf gespanntem Fuße leben, was für unsere Pläne natürlich sehr ungünstig ist [...] Seine Lehrer hat man ihm bisher gelassen, aber wie lange noch, ist fraglich. Er soll gesagt haben: Wenn ihr mir einen meiner Leute nehmt, muß ich das Haus schließen u(nd) abreisen. Eine deutsche Missionarin aus Musch sei nach Mesereh geflüchtet, weil dort die Russen kamen (von denen aus Wan keine Nachricht!!!). Als sie mit den Verbannten über Diarbekr nach Urfa gewollt habe, hätte man sie nicht gelassen. Eine Amerikanerin sei nach Urfa abgereist, aber seit Diarbekr sei keine Nachricht mehr von ihr gekommen. Die Lehrer der Amerikaner in Harput seien im Gefängnis sehr schlecht behandelt und furchtbar geschlagen worden. - Diese Familien, deren Männer hier auch damals von ihnen abgesondert sind, haben ganz unermeßliche Reichtümer mit sich gebracht, 32 Esel voll Seide, Teppiche, Schmucksachen u(nd) überall auf sich u(nd) die Kinder Hunderte von Goldstücken aufgebunden, abgesehen von den Schätzen, die sie in Mesereh gelassen haben. Sie sind unterwegs nicht bestohlen. Wohl aber mußte eine Frau ihre schöne 14jährige Tochter unterwegs einem türkischen Leutnant geben! Einmal hätten sie sich unterwegs zusammen gefunden u(nd) seien sich in gemeinsamem Gebet einig geworden, sich in den Euphrat zu stürzen; als sie im Begriffe waren, es zu tun, hätte es aber Gott oder der Satan verhindert! Nun sind sie hier, wissen nicht, ob ihre Männer leben oder irgendwo getötet sind, müssen fortwähren(d) die Schauergeschichten u(nd) Lügen der Malatiafrauen anhören u(nd) wissen nicht, was aus ihnen werden soll, ob man sie alle nur hier in den Gebirgen allmählich verloren gehen lassen will oder was sonst [...] (p. 94).
[...] Heute Vormittag war auch unser Steinhauer, Megrditsch Warbed, mit einem türkischen Meister hier. All die armenischen Handwerker sind hier noch ungefährdet u(nd) auch unangefeindet; nur die Zukunft liegt dunkel vor ihnen.
Heute Nachmittag kam wieder in einiger Entfernung ein großer Zug aus Sivas durch, Hunderte von Ochsenwagen. Zehn- bis fünfzehntausend Menschen liegen nun hier in der Nähe u(nd) sind bisher nicht weiter geschickt. Sie sind alle in furchtbarer Angst; uns kam von dort Nachricht. Beweise, daß massenhaft Leute unterwegs getötet werden, sind nicht vorhanden, aber Verdacht liegt genug vor [...].
Heute Abend besuchte ich wieder den Mutessarif [...] Ich fand dort einen Mollah vor, der mit ihm über die Versorgung der jetzt auf achthundert angewachsenen Waisenkinder aus der Sivasgegend mit ihm überlegte, die jetzt sich in der Stadt herumtreiben [...] (p. 96).

31 juillet 1915 — Hier aprés-midi, un convoi comprenant environ mille à mille cinq cents personnes est passé, [venant] vraisemblablement de la ville de Sivas.

La réponse télégraphique à notre lettre en turc est arrivée de Mezré: «Je suis désolé, mais je ne peux pas vous accueillir dans les circonstances actuelles». Ce qui signifie que l’orphelinat allemand de Mezré ne va également pas pouvoir rester ouvert [...] Nous nous sommes immédiatement fait annoncer chez le mutessarif pour discuter des questions nécessaires avec lui [...] Nous lui avons montré notre télégramme de Mezré en lui demandant conseil. Il a dit qu’il le savait déjà, mais n’avait pas souhaité nous empêcher de faire nous-mêmes la démarche. Compte tenu du fait qu’il a reçu l’ordre strict de ne plus laisser un seul Arménien dans les six vilayets concernés, il est impossible que l’orphelinat de Mezré subsiste. Même si le gouvernement ne ferme pas les orphelinats et que les enfants de moins de quinze ans y restent, les Allemands n’en seront pas moins obligés de fermer leurs maisons eux-mêmes, car tous leurs collaborateurs doivent partir [...]

Quand nous sommes revenus, à 7h45, de chez le mutessarif, une fille épuisée, désespérée et se tordant de douleur était étendue dans la cour. Elle vient de Mandjaluk. Quelqu’un d’ici lui a conseillé de se réfugier chez nous. Elle paraît ne plus avoir toute sa tête. Elle a gémi et s’est lamentée toute la nuit; nous avons été incapables de dormir du fait de l’excitation; les plaintes de la jeune fille m’apparaissent comme la misère du peuple dans son entier, et j’ai eu l’impression d’être entouré, de tous côtés, de cris de détresse stridents. Une situation lugubre et atroce! Malgré tout, Dieu nous a imposé de tout voir, de tout savoir et de nous taire [...]

Gestern Nachmittag kam wieder ein Zug von etwa 1000 bis 1500 Leuten durch, offenbar aus der Stadt Sivas.
Aus Mesereh kam die telegraphische Antwort auf unseren türkischen Brief:»Leider kann ich euch unter diesen Verhältnissen nicht aufnehmen.» D(as) h(eißt) also, daß das deutsche Waisenhaus in Mesereh auch nicht bestehen bleiben wird. [...] Wir ließen uns nun sofort beim Mutessarif anmelden, um mit ihm das Nötige zu besprechen [...] Wir zeigten ihm unser Mesereher Telegramm u(nd) fragten um Rat. Er sagte: Das hätte er vorher gewußt, hätte uns nur nicht abhalten wollen, selbst zu fragen. Denn da der strenge Befehl gekommen sei, keinen einzigen Armenier in den betr(effenden) sechs Vilajets zu lassen, könnte natürlich auch das Mesereher Waisenhaus nicht stehen bleiben. Denn wenn die Regierung auch die Waisenhäuser nicht schließen würde, wenn auch Kinder unter 15 Jahren hierbleiben dürften, die Deutschen würden gezwungen werden, selbst ihre Anstalten zu schließen, da alle Gehilfen ja fort müßten [...] (p. 97).[...] Als wir um Viertel vor acht vom Mutessarif zurückkamen, lag hier auf dem Hof ein völlig erschöpftes, aufgelöstes, sich vor Schmerz am Boden windendes Mädchen, das aus Mandjaluk mitgekommen war u(nd) von jemand hier an der Straße den Rat bekommen hatte, bei uns Zuflucht zu suchen. Sie scheint nicht ganz klar bei Verstand zu sein. Die ganze Nacht stöhnte u(nd) jammerte sie; wir konnten sowieso vor Aufregung so gut wie gar nicht schlafen; nun repräsentierte mir das Klagen des Mädchens immer den Jammer des ganzen Volkes, u(nd) es war mir, als seien wir von gellenden Hilfeschreien von allen Seiten umgeben. Eine unheimliche, qualvolle Lage! Und doch hat uns Gott das auferlegt, das alles zu sehen u(nd) zu wissen - und - stille zu sein [...] (p. 99).

1er août 1915 — [...] Environ mille villageois de la région de Sivas viennent de passer. Il est inévitable que beaucoup meurent d’insolation [...]

[...] A l’instant, un [autre] convoi, comprenant au moins deux mille personnes, est passé, venant du côté de Sivas. Ce qui signifie qu’ils ne coupent plus la route de Mezré, mais laissent Malatia à leur droite [...]

Tout à l’heure, l’aveugle Maritza d’Arabkir, une grande fille de dix-sept ans que nous avions dû renvoyer chez elle à l’automne dernier alors qu’elle commençait à peine à devenir un être humain, est arrivée chez nous — elle était dans une église, en ville. Nous avons anéanti, en deux minutes, l’espoir qu’elle avait eu pendant quelques jours de pouvoir rester chez nous. Elle est repartie sans dire un mot et est sortie en sanglotant. C’est difficile à supporter, déchirant et on se sent complètement accablé [...]

[...] Eben zogen wieder etwa eintausend Dorfleute aus der Sivasgegend durch. Es kann nicht ausbleiben, daß viele am Hitzschlag sterben [...] (Seite 100 f.)
[...] Vorhin kam wieder ein Zug von mindestens zweitausend Personen von der Sivasseite hier durch, d(as) h(eißt) sie berühren hier die Meserehstraße nie mehr, sondern lassen ganz Malatia rechts liegen [...] (p. 102).

[...] Vorhin war die blinde Maritza aus Arabkir hier, die wir auch im vorigen Herbst entließen, ein etwa 17jähriges, dickes Mädchen, das gerade angefangen hatte, etwas Mensch zu werden. Sie war in der Stadt in einer Kirche. Ihre tagelange Hoffnung, hier bei uns bleiben zu können, mußten wir ihr nun in zwei Minuten zerbrechen. Sie fand kein Wort, drehte sich um u(nd) ging schluchzend heraus. Das ist schwer erträglich, das Herz tut einem weh, u(nd) man fühlt sich am ganzen Körper wie geschlagen [...] (p. 102).

5 août 1915 — Avant-hier, un convoi d’environ mille Arméniens est passé; hier un autre convoi a défilé durant près de deux heures [...]

Vorgestern kam wieder ein Zug von etwa eintausend Armeniern durch, gestern einer, der etwa zwei Stunden vorbeizog [...] (p. 102).

suite

15) C’est-à-dire le général Posseldt, commandant de la forteresse d’Erzeroum en 1915.

16)D’octobre 1914 à avril 1915, Thora von Wedel-Jarlsberg et Eva Elvers soignaient, à Erzeroum, des soldats turcs blessés, puis entrèrent au service de la «Croix rouge», à Erzindjan, d’où elles partirent le 21 juin 1915. Leurs observations sur la déportation des Arméniens d’Erzindjan ont été publiées sous le titre: «Bericht über die Ereignisse in Erzingjian Juni 1915», puis éditées en annexe du compte-rendu du procès contre Soghomon Téhlérian: Der Völkermord an den Armeniern vor Gericht: Der Prozeß Talaat Pascha, Neuaufl. Hrsg. u. eingel. von Tessa Hofmann, Göttingen-Wien 1985, pp. 129-130.

17)Christoffel rapporte à leur sujet que «De leur convoi, qui comptait environ dix mille personnes, même pas dix sont parvenues sur leur lieu de destination, Viran-Chéhir, ville à la périphérie du désert, entre Ourfa et Mardin» (Saat, p. 164).