Herbert Adams Gibbons

Les Derniers Massacres d'Arménie

Et le Seigneur dit à Caïn : « Où est Abel, ton frère ? »
- Et Caïn répondit : «  Je ne sais pas ;
suis-je dont le gardien de mon frère ? »
(Genèses, Ch. IV, v. 9.)

Avant-propos

La guerre qui a éclaté en août 1914, a progressivement entraîné plusieurs nations, grandes ou petites, qui au début n’y participaient pas. D’autres, pareillement grandes ou petites, cherchent encore à garder une neutralité officielle, mais se sont trouvées engagées dans des controverses diplomatiques avec les deux groupes belligérants.

Sauf l’Amérique du Sud, tous les continents ont envoyé des contingents combattre en Europe. Les destinées de l’Afrique, de l’Asie et de l’Australie sont en jeu ; celles de l’hémisphère occidental seront, bien avant la fin de la guerre, influencées par le drame européen dans leur vitalité même. Nous pouvons donc sans exagération dire que cette guerre, provoquée par l’ultimatum de l’Autriche-Hongrie à la Serbie, est une guerre mondiale. Et, parce qu’ils sont encore au plus fort de l’action ou trop émus de sympathies ou d’antipathies, belligérants et spectateurs ne sont ni les uns ni les autres en situation de se former un jugement définitif sur les nombreux problèmes qui provoquèrent la lutte, pas plus que sur les divers sujets de controverses qui ont surgi comme conséquences du conflit, soit entre belligérants, soit entre belligérants et neutres.

Devons-nous cependant farder cette attitude d’attente, au point de suspendre TOUT jugement sur TOUS les événements survenus depuis août 1914 jusqu’à cette fin d’année ?

Les homme, au fond de leur cœur, ne sont pas indifférents ni sourds aux appels des innocentes victimes et des désespérés. S’il en était ainsi, nous aurions vraiment toute raison de croire qu’il ne reste plus rien de nos vingt siècles de civilisation chrétienne. Que certains effets soient discutables et certains événements obscurs, que certaines accusations et contre-accusations ne puissent être précisées, soit. mais il est d’autres qui peuvent l’être d’ores et déjà.

Tel est le cas pour les massacres des Arméniens de Turquie. Le forfait est bien nettement prouvé ; les responsabilités peuvent être, aujourd’hui même, définitivement établies ; un appel peut être fait à l’humanité en faveur de ce qui reste encore de la race arménienne dans l’Empire ottoman.

Je juge donc utile et indispensable, puisque aucun soupçon d’intérêt politique ne peut m’atteindre, d’attirer en ce moment l’attention du monde sur des crimes qui constituent la page la plus noire de l’histoire moderne. Je publie les faits et je signale les responsables.

Herbert Adams Gibbons
Paris, le 1er Décembre 1915.

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 Les Derniers Massacres d'Arménie
« La page la plus noire de l'Histoire moderne »

par Herbert Adams Gibbons

Paris, Nancy, Berger-Levraut, 1916

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